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Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
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furieux. Il n’a jamais, jure-t-il, dit à Chaban qu’il était prêt à se retirer devant lui. Il veut préparer un communiqué de démenti. Ses amis lui suggèrent plutôt de se faire interviewer aussi sec sur une radio périphérique. Gadot appelle Henri Marque et Jean Ferniot à Radio Luxembourg, lesquels acceptent avec joie d’alimenter la polémique entre Chaban et Edgar sur le perchoir.
    Edgar se prête à toutes les questions et en profite pour dire qu’il est et restera candidat. Ce qu’une dépêche, tombée à 19 h 53, confirme : Edgar Faure y déclare que sa candidature « n’est pas un jeu, ni un ballon d’essai, ni une combinaison ». Et qu’il ne se retirera évidemment pas.
    Quelques minutes plus tard, Ivan Levaï l’appelle pour Europe 1. Edgar recommence sa démonstration.

    22 mars
    L’ébullition continue. Achille Peretti, l’occupant du perchoir qui voudrait bien le rester, me confirme sa position : il souhaiterait que le groupe UDR le désigne comme candidat à la présidence de l’Assemblée nationale. Il reste persuadé que Pompidou ne s’est pas mêlé des candidatures : « Il n’a rien dit à personne, se justifie-t-il. Il peut avoir des désirs ou des souhaits. Mais il n’est pas dans son rôle d’intervenir. Il ne faut pas faire parler Pompidou, pas plus qu’il ne fallait faire parler le Général. »
    Il ne cache pas que, dès juillet dernier (donc quelques jours seulement après le départ de Chaban de Matignon), il a certes dit à ce dernier que, s’il avait envie de retrouver le perchoir, il lui céderait sa place. Aujourd’hui, tout compte fait, si c’était à lui, Peretti, qu’on proposait la place, il ne dirait pas non.
    Il a dîné avec Chaban la semaine dernière et lui a dit : « Qu’est-ce que tu attends pour être candidat ? » Chaban lui aurait répondu : « Je ne suis pas encore décidé. Je suis très sensible à ton geste. Merci ! »

    Ce jeudi 22 au matin, François Gadot me rappelle : « Vous pensez bien qu’Edgar ne se serait pas lancé dans cette histoire sans avoir vu le président de la République. Il a vu également à ce sujet Pierre Messmer, Michel Debré et Alain Peyrefitte. »
    Le plus tiède pour soutenir Edgar est paradoxalement Joseph Fontanet, qui dit pourtant qu’il votera pour lui. « Que voulez-vous, a-t-il confié à Guy Claisse, hier, on ne peut pas faire du neuf avec Chaban ! »

    Vu Xavier Marchetti à l’Élysée dans l’après-midi.
    Chaban veut attendre son tour pour la présidentielle, me dit-il, mais il préfère plutôt patienter à l’hôtel de Lassay qu’ailleurs. Marchetti déplore le manque d’unité de la majorité, qui menace de se scinder entre Chaban et Edgar Faure dès le premier vote : « Quand la gauche approche de 47 %, ça devient dangereux de se diviser. »
    Il me dit qu’à l’origine, si Pompidou n’a pas découragé Edgar de se présenter au perchoir, c’est parce que ce dernier lui avait annoncé son intention de constituer un groupe parlementaire fauriste. C’est pour le décourager de le faire, parce qu’il jugeait que l’existence d’un tel groupe compliquerait la tâche du gouvernement, que Pompidou l’a poussé vers l’hôtel de Lassay. Parallèlement, il a donc dit à Chaban : « Ne bougez pas. »
    J’en ai un peu assez de cette querelle du perchoir. On se lasse de savoir qui a dit quoi à qui, et qui a fait quoi à qui. J’interroge Marchetti sur Messmer. Pompidou aurait dit mardi dernier – il y a deux jours – qu’il n’allait pas faire un gouvernement pour deux mois, et que Messmer serait en piste au moins jusqu’à 1975 9 .

    2 avril. Rentrée parlementaire
    On commence par voter pour la présidence de l’Assemblée nationale. Raymond Marcellin, occupé par les manifestations lycéennes,vote le premier avant de s’éclipser. C’est Edgar qui l’emporte sans difficulté avec 274 voix contre 180 à Pierre Mauroy.
    Edgar tout seul : dans les jours qui précèdent, Chaban, lassé de toutes les difficultés qu’il a rencontrées sur sa route, s’est retiré 10 . Je me demande s’il a cru Pompidou lorsque celui-ci lui a dit qu’il ne redeviendrait pas Premier ministre une seconde fois ni président de la République à l’avenir en descendant du perchoir 11 .
    Edgar Faure debout fait son premier discours de président à 18 heures. Il parle brillamment, avec son inimitable diction, de la « cause qui nous est supérieure »,

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