Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen

Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
Vom Netzwerk:
sur sa gauche, et Pompidou pourra s’appuyer sur Edgar Faure et sur Giscard.
    « C’est contre cette nouvelle alliance, m’explique-t-il, que les barons gaullistes se sont mobilisés. Mais voter aujourd’hui au perchoir pour Chaban, c’est en réalité voter contre Pompidou. »
    Il en profite pour faire un de ces bons mots qu’il affectionne et qui le font rire lui-même, tant ils sont méchants : « Chaban n’est pas un débile mental, il est un débile fiscal 8  ! »
    Il me laisse entendre, je le cite le plus exactement possible, que, « si Pompidou choisit de ne pas se représenter en 1976, il aura la responsabilité de son successeur : il choisira inévitablement l’homme qui peut lui faire honneur par la suite. Et celui qui peut casser la dynamique de la gauche. Même s’il ne l’aime pas, il n’y en a qu’un : c’est Giscard. »
    Il ajoute : « La victoire à la présidentielle dépendra, comme aux législatives, de celui qui sera accepté par le centre. Là où sera le centre, sera l’élection. Et le centre ne votera pas pour un gaulliste. »

    Plus tard, dans l’après-midi, conversation avec Maurice Couve de Murville.
    « Si j’avais été Pompidou, me dit-il, j’aurais agi autrement. Il ne faut jamais faire d’immobilisme. Ou du moins faut-il donner l’impression qu’on n’en fait pas. »
    L’ouverture ? « Ce qui me paraît essentiel, c’est la politique qu’on fait, et non avec qui on la fait ! »
    Quant au nouveau Parlement élu : « Ce sera un Parlement où la gauche existera et se fera entendre. N’importe quel président de l’Assemblée sera contraint d’essayer de donner un rôle au Parlement. »
    Il ajoute de façon surprenante, avec une gouaille inattendue : « Ça donnerait du ragoût, comme dirait le Général ! »

    21 mars
    Paul Granet me confirme qu’un déjeuner a réuni, lundi dernier, les barons gaullistes et que, agacé par cette sorte de fronde, Pompidou aurait convoqué Chaban pour lui dire (voir supra ) qu’on ne devenait pas deux fois Premier ministre en descendant du perchoir.
    Il me parle du problème particulier d’Achille Peretti, qui était président de l’Assemblée nationale avant le scrutin de mars et qui, aujourd’hui, considère qu’il ne peut laisser la place qu’à Chaban-Delmas. Et pas à Edgar Faure, qu’il redoute.
    Edgar Faure, me raconte Granet, n’avait jamais pensé à se présenter, jusqu’au jour où il est allé à l’Élysée. « Pompidou veut d’abord éviter Chaban. Il veut couvrir la majorité parlementaire d’un homme à lui. » Comment Edgar l’est-il devenu, cet homme à lui ? Apparemment grâce à Marie-France Garaud, qu’il voit, avec ou sans Pierre Juillet, au moins une fois par semaine.
    Mais l’entretien qui a été essentiel pour le décider a été le dialogue avec Giscard, avant-hier, 19 mars, pendant lequel celui-ci a tracé devant lui des perspectives d’avenir. Pour bien visser l’alliance, Giscard lui a envoyé Ponia une heure plus tard.
    Pendant ce temps, les fauristes, eux, s’installent boulevard Raspail dans des bureaux repeints à neuf. Hier, une trentaine de députés étaient présents autour d’un buffet froid arrosé de vin fou du Jura.

    Coup de téléphone de François Gadot, un des hommes à tout faire – ou de confiance, comme on voudra – d’Edgar. Il me raconte que la rencontre entre Giscard et Edgar a eu lieu rue de Rivoli. Les deux hommes étaient seuls. Leurs buts convergent : un rapprochement avec Edgar Faure donne à Giscard l’image de centre-gauche qu’il recherche. En faveur d’Edgar, Giscard est désormais proche de Pompidou ; il barre Chaban, qu’Edgar n’aime pas (parce que, m’a dit Granet, il lui fait en quelque sorte concurrence sur son analyse de la « nouvelle société », fonds de commerce d’Edgar). Voilà pourquoi, entre Edgar Faure et Giscard d’Estaing, l’alliance est peut-être contre-nature, mais efficace.

    Hier, mardi 20, Edgar est au Conseil économique. Il rentre ensuite à son bureau, où son équipe politique est en train de lire l’interview accordée par Chaban à Pierre Sainderichain dans le quotidien Sud-Ouest . Chaban y déclare : « Edgar Faure a bien voulu me dire qu’il ne serait pas candidat contre moi. » Il ajoute qu’« Achille Peretti, excellent président de la précédente Assemblée, a déclaré publiquement qu’il se retirerait si je faisais acte de candidature ».
    Edgar est

Weitere Kostenlose Bücher