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Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
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dîners mondains, hein ?
    – Comment cela s’est-il passé ? interroge Dayan, courtois.
    – Très bien, très bien.
    – Mais encore ?
    – J’ai envoyé ma démission à Mauroy !
    – Quoi ?
    – Oui. J’en ai assez. Je ne vais pas m’épuiser pour ces imbéciles ! »
    Dans la journée, l’affaire de la démission suit son cours. Josette Pontillon, l’assistante de Mauroy, apporte la lettre à celui-ci. Il appelle Mitterrand :
    « Si vous partez, lui dit-il, nous partons tous !
    – Non, restez, dit Mitterrand. J’en ai marre, il faut que je prenne un peu de champ ; nous verrons après la convention. »
    Le jeudi soir, au bureau politique, réuni en l’absence de Mitterrand, Mauroy fait un tour de table : tout le monde s’exclame que ce serait une catastrophe si Mitterrand s’en allait.
    Tout le monde sauf Gilles Martinet : « C’est du chantage, dit celui-ci, on ne va pas tout le temps céder à un chantage ! Il n’avait, il n’a aucune intention de démissionner, vous le savez bien. On ne gouverne pas un parti de cette manière ! »
    Georges Dayan lui répond vertement que Mitterrand en a marre de se décarcasser en vue de les faire tous élire pour des prunes !
    Je demande à Dayan s’il croit, lui, que Mitterrand avait vraiment voulu démissionner, si vraiment il était sincère. Dayan hésite avant de répondre : « Il était sincère le soir même. Le lendemain, il a pensé qu’il pouvait en tirer parti. »

    En matière de stratégie politique, Mitterrand, qui « évite de penser en ce moment » (Dayan dixit), n’en pense pas moins qu’il lui faudrait, en cas d’élection présidentielle, s’en aller à Latche, faire son de Gaulle à Colombey, et que cela lui serait profitable (d’où ce cirque avec sa démission, ce qui veut dire qu’il est à la fois sincère et hésitant).
    « Mais, dis-je à Dayan, et si les élections ont lieu comme prévu en 1976 ? »
    Dayan me dit que Mitterrand ne le croit pas, mais estime qu’elles sont à l’horizon 1974 (septembre ou octobre).

    19 décembre
    Vu Paul-Marie de la Gorce après la couverture du Point du 17 décembre : « Messmer doit partir », qui a produit un effet considérable sur l’opinion et les leaders politiques 35 .
    Sur le remplacement de Messmer, à Matignon même il y a eu beaucoup d’interrogations et d’inquiétudes, la semaine dernière. Dont les uns et les autres ont parlé à Messmer en personne. Une ou deux allusions de Michel Dupuch 36 , par exemple, dès le vendredi soir précédant la sortie de l’hebdomadaire, à propos de ceux qui inspiraient une campagne désagréable contre lui. Réponse de Messmer : « Ce sont peut-être les pétroliers qui se sont mis dans la tête que j’étais contre eux, ou bien les milieux patronaux. »
    Le vendredi soir, coup de téléphone d’Ithier de Rocquemaurel, président de Hachette 37 , pour dire qu’il n’était pas dans le coup.
    Il semblerait que, dans la journée du dimanche, Pompidou ait téléphoné à Messmer, à Sarrebourg, pour lui dire de ne pas croire qu’il avait l’intention de se séparer de lui.
    Lundi matin, il a reçu Marie-France Garaud, qui avait demandé rendez-vous bien avant (Dupuch a dit à la Gorce que le Premier ministre ne croyait pas du tout que le coup contre lui soit venu d’elle), puis il se rend à midi à l’Élysée, où Pompidou l’a rassuré en lui disant une nouvelle fois qu’il était bien décidé à le garder.
    Alors, question que se posent tous les collaborateurs du Premier ministre et le Premier ministre lui-même : pourquoi Le Point s’est-il lancé dans cette bataille ?
    Lundi après-midi, Paul-Marie de la Gorce rencontre André Chambraud 38 . Celui-ci plaide le coup journalistique. Matignon n’y croit pas : les membres du cabinet pensent qu’il y a bien eu un déjeuner entre les dirigeants de Hachette et ceux du Point , où tous sont tombés d’accord sur le titre du prochain numéro de l’hebdomadaire 39 .
    Toujours selon Paul-Marie de la Gorce, l’analyse du Premier ministre est celle-ci : « Il ne faut pas perdre de vue le fond politique de l’affaire. C’est ce que je représente politiquement qui est en cause : je représente ce qu’il y a de plus gaulliste dans le gouvernement et dans la politique générale. Il y a mon action passée au ministère des Armées, et puis il y a la politique actuelle : le patronat est contre mes projets sociaux ; un certain milieu

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