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Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
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pour un naufrage qui n’a pas encore eu lieu ! Du coup, les chaloupes aussi ont coulé !” »
    Je l’interroge sur la personnalité de Pierre Juillet. Six mois avant le remaniement à l’occasion duquel lui, Jobert, est devenu ministre des Affaires étrangères, les deux hommes ne se parlaient déjà plus. Lorsque Jobert est allé au Quai, Juillet, lui, devait retourner à ses moutons. « Pour solde de tout compte, me rapporte Jobert, il devait recevoir le Conseil constitutionnel. Édouard Balladur, à mon départ, m’a dit : “Alors, je vais rester seul à l’Élysée ! – N’y comptez pas trop, lui ai-je répondu, Juillet revient toujours...” »
    Juillet, ajoute-t-il, n’a jamais aimé Chaban. Cela remonte à très loin, peut-être à la IV e  République. « Moi, en 1972, j’étais au contraire hostile au limogeage de Chaban dans les conditions où il s’est passé. Je suis un sentimental, je trouvais que l’on pouvait respecter les formes. »
    Juillet et Madame Garaud (il ne l’appelle que comme ça) ont interprété la pensée de Pompidou. « C’est très dur, appuie-t-il, le métier de conseiller. Il faut rester dans l’ombre. On peut à tout moment décrocher son téléphone et dire : “Le président veut que...” Et ça marche, même si le président n’est pas au courant. Il faut s’estimer soi-même pour savoir résister à cette tentation.
    « Juillet se serait comporté en veuve abusive ?
    – Oui, mais avant le veuvage ! » me répond-il drôlement.
    Il parle de Chaban en livrant un tout autre son de cloche que Chirac :
    « Pompidou disait très souvent depuis six mois que le mieux placé, s’il devait y avoir des élections, serait Chaban. Il y avait des problèmes entre eux, certes, mais cela ne l’empêchait pas de dire ça. Que voulez-vous, on fait avec ce qu’on a ! Il a bien essayé d’imposer Messmer, mais la greffe n’a pas pris, on l’a bien vu. Si la greffe avait pris, tout aurait été possible, mais ça n’a pas été le cas. Et Messmer a perdu l’UDR. Parce que Pierre Juillet a voulu en faire l’ennemi numéro un des barons gaullistes, alors qu’il fallait au contraire les rallier à lui. Et c’est cette lutte avec les barons qui a tout brouillé ! »
    Il me parle enfin, douloureusement, de la mort de Pompidou. Ce dernier était atteint depuis 1969 de cette maladie « qui n’était pas, contrairement à ce que madame Giroud a dit dans son papier, la maladie de Waldenstromm ». Il avait plus de globules blancs que de rouges, c’était plutôt une leucémie. « Pitsounda, me révèle-t-il aujourd’hui, a été effroyable. Il ne mangeait plus rien. Le déjeuner du mercredi a failli être décommandé. Depuis plus de six mois, Édouard Balladur suivait les progrès de la maladie : un jour ça allait bien, un autre il était épuisé. Il avait déjà été malade, une première fois, en 1967, puis il y avait eu une rémission jusqu’en 1972. Nous pensions qu’il allait connaître un autre répit. Mais le traitement à la cortisone a été terrible : les vaisseaux éclataient de partout. Il est mort d’une hémorragie intestinale, et d’une infection que son organisme, ouvert à tous les vents, n’a pas supportée. »
    17 avril
    Les « 43 21  », qui n’étaient d’ailleurs que trente-cinq à cette occasion, se sont réunis hier, boulevard Malesherbes, presque clandestinement, dans les sous-sols de l’Union des caisses centrales de la Mutualité agricole, avant d’affronter le groupe parlementaire au complet à l’Assemblée nationale.
    Ils ont trouvé là quatre cents élus, salle Colbert, parmi lesquelsdes sénateurs UDR venus du palais du Luxembourg, des anciens parlementaires battus en 1973, les élus du Conseil de Paris, sans oublier les membres UDR du Conseil économique.
    Curieuse atmosphère : chacun ou presque pense aujourd’hui que Chaban sera devancé par Giscard. Les sondages y sont, évidemment, pour quelque chose : celui que j’ai sous les yeux ce soir montre que pour la Sofres, Chaban stagne à 26 %, tandis que Giscard est passé de 27 à 28 %, Mitterrand, lui, montant en une semaine de 36 à 40 %. Mais Chirac en a d’autres, émanant sans doute des RG, auxquels il fait allusion durant cette réunion, carrément catastrophiques mais non vérifiables : 27 % pour Giscard, et 22 % seulement pour Chaban, en chute libre.
    Pourtant, Claude Labbé, président du groupe parlementaire UDR, veut

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