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Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
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Après lui, tombe l’annonce des élections des candidats « conventionnels » qui tous, à quelques centaines, à quelques dizaines de voix parfois, s’emparent des sièges qui appartenaient à la majorité. Une exception seulement, je crois, celle de Charles Hernu qui à Saint-Étienne, dans la Loire, n’est pas parvenu à battre Neuwirth. Cela ne m’étonne pas : j’étais allé une seule soirée suivre la campagne de Charles Hernu qui, parachuté à Saint-Étienne quelques semaines avant le scrutin, ne me semblait pas pouvoir, quels que soient ses talents réels de bateleur, faire assez d’ombre à Neuwirth pour l’empêcher d’être élu.
    Claude Estier est dans un bureau au fond du couloir, le téléphone à l’oreille. Il reçoit les résultats bureau de vote par bureau de vote : 100 voix de plus à un moment, 50 voix de moins que son adversaire à d’autres. Des chiffres en accordéon qui le laissent tour à tour enthousiaste et fourbu.
    Lorsque François Mitterrand arrive rue de Lille, largement après 22 heures, Claude Estier est le seul « conventionnel » à rester dans l’incertitude. Mitterrand s’arrête auprès de lui, vérifie les chiffres que celui-ci lui tend, trouve cela prometteur. C’est à ce moment que tombe le dernier coup de téléphone de la mairie du 18 e qui donne, en chiffres définitifs, Claude Estier vainqueur. Mitterrand, perdant l’impassibilité qui est toujours la sienne, tombe dans ses bras, sous les flashes des photographes.
    Au total, la Fédération a 116 élus, dont 16 conventionnels. Avec le PSU, Mendès France et d’autres, la gauche a 193 sièges contre 133 sortants 8 . 40 députés perdus du côté de la majorité. Quatre ministres du gouvernement battus 9 .
    Jacques Chirac est élu en Corrèze, mais les jeunes loups pompidoliens ont perdu partout ailleurs.
    15 mars

    Pour enfoncer le clou, et montrer que ses jeunes loups à lui sont plus chanceux que ceux de la droite, Mitterrand parcourt l’Assemblée nationale, les salles des Quatre-Colonnes et des Pas-Perdus, escorté des nouveaux élus de la Convention des institutions républicaines, tous ravis. Je vois André Rousselet, élu à Toulouse, escorter Mitterrand avec une sorte d’élégance nonchalante dont il ne se départ semble-t-il jamais. Georges Fillioud, ex-journaliste à Europe 1, gagnant dans la Drôme, arbore l’air conquérant d’un envoyé spécial en reportage en zone dangereuse. Georges Dayan, nouvellement élu dans le Gard, a souvent accompagné Mitterrand quand celui-ci était ministre de la IV e République ; il est celui qui connaît le mieux les lieux, ainsi que Claude Estier, qui, journaliste parlementaire, hante depuis longtemps les couloirs et les coursives du Palais-Bourbon.
    Paul Cléricy, que je n’appelle plus que « le miraculé de Nice », s’arrête en me voyant derrière la table de presse dans la salle des Pas-Perdus et vient me remercier. Il sait que c’est moi qui, par hasard, ai signalé son cas aux membres du concile qui négociaient au soir du premier tour les désistements des communistes.
    Explication de François Goguel 10 , spécialiste des élections, à qui le général de Gaulle a demandé une étude : les candidats de la V e République ont recueilli au deuxième tour un pourcentage de voix plus élevé qu’au premier, mais ils n’ont pas bénéficié d’un bon report des suffrages du Centre démocrate et des divers droite.
    Conclusion de Goguel, cité par L’Express  : « Le gaullisme a pâti au deuxième tour d’avoir paru trop bien réussir au premier. »

    On me raconte que dès lundi dernier 11 , Mendès France a téléphoné à François Mitterrand à une heure où il savait le trouver chez lui, à 9 h 30. Il lui a dit – c’est Dayan qui me le raconte – que, sans attendre le résultat des négociations entre le PSU, son parti et la Fédération, il avait décidé de s’apparenter au groupe des Fédérés à l’Assemblée nationale.
    Mitterrand n’attendait pas si tôt ce coup de téléphone. Il a souvent, depuis janvier dernier, montré son agacement à l’idée que Mendès et le PSU fassent monter les enchères en réclamant, avant de conclure un accord avec la Fédération, l’élaboration d’une politique et d’un programme communs à toute la gauche – et acceptable par eux.
    Le seul problème, c’est que Mendès a fait savoir qu’il n’accepterait aucune discipline de groupe. Guy Mollet a dit à Mitterrand

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