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Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
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naïve. Claude Estier me révèle que ce qu’on m’a raconté de Guy Mollet et de sa magnanimité vis-à-visde Mitterrand est complètement faux. En réalité, Guy Mollet pousse pour que la fusion soit réalisée le plus vite possible parce que, dans l’état actuel des choses, elle donnerait au Parti socialiste une influence prépondérante. Il a révélé publiquement 14 l’existence d’un protocole secret qui aurait été signé en décembre 1965, protocole qui précisait les détails techniques pour une fusion avant le 1 er janvier 1968. Pourquoi avoir fait cette révélation aujourd’hui ?
    Il est en réalité d’autant plus pressé qu’il veut prendre le dessus sur Mitterrand pendant qu’il en est temps. Et, par exemple, il est hostile à voir ce qu’on appelle les « adhérents individuels » s’organiser en courant. Pourquoi ? Parce qu’il sait bien que lesdits adhérents individuels se réclament davantage de François Mitterrand que de Guy Mollet. L’union n’est encore pas pour demain, même si ce dernier, précisément, essaie d’apparaître comme son meilleur garant. Apparence et réalité de ce grand stratège, qui craint Mitterrand au plus haut point.
    Du coup, les conventionnels, réunis le 15, ont déposé motion sur motion pour aboutir à la création d’un parti démocrate socialiste ouvert aux adhésions individuelles – derrière, bien sûr, François Mitterrand.
    11 mai

    Grèves annoncées et suivies, motion de censure, ordonnances, pouvoirs spéciaux, délégation de pouvoirs demandé par Pompidou au Parlement dans les domaines économique et social, rien ne manque à ce mois de mai, à un tel rythme que je n’ai guère eu le temps d’écrire. D’autant que je viens tout juste d’être accréditée à l’Assemblée nationale, et qu’il s’y passe tout le temps quelque chose, car la présence physique de la gauche ne cesse de se faire sentir depuis l’hémicycle jusque dans les couloirs.
    La motion de censure, notamment, fait du bruit, parce que c’est la première fois que l’opposition est assez forte pour créer la surprise. Et aussi parce que la décision de Georges Pompidou de demander une délégation de pouvoirs dans les domaines économique et social ne fait pas l’unanimité de la majorité. Les républicains indépendants, avec Valéry Giscard d’Estaing et Poniatowski, reprochent au gouvernement de repousser tout débat sérieux avant la fin de l’année, ladélégation de pouvoirs étant valable jusqu’au 31 octobre. Edgard Pisani, ministre de l’Équipement, vient de claquer la porte du Conseil des ministres fin avril sur ce sujet.
    Il n’y a guère que les gaullistes de gauche qui soient favorables à ces ordonnances qui, entre autres, envisagent la participation des salariés aux fruits de l’expansion, combat dont Louis Vallon, puis René Capitant, se sont fait depuis belle lurette les porte-parole au sein de l’UDT 15 .
    C’est dans ces circonstances que Waldeck Rochet a proposé aux socialistes le dépôt d’une motion de censure commune à la gauche.
    Malgré le refus de Félix Gaillard, de Max Lejeune et de Maurice Faure de la signer, sans doute pour ne pas rompre les liens possibles avec les centristes, un texte commun a été rédigé le 11 mai. Les premiers signataires en sont Mitterrand, Waldeck Rochet, Guy Mollet, Étienne Fajon et René Billères 16 .
    La motion n’a arithmétiquement pas de chance d’être acceptée 17 , mais c’est le fait qu’elle ait été déposée qui nourrit un climat inouï dans la majorité.
    16 mai

    Dans ce climat, le général de Gaulle a choisi, avant le vote de la motion de censure, dont il sait qu’elle ne changera rien à la vie gouvernementale, d’intervenir, mardi 16, par une conférence depresse. Je n’y assiste pas, car je suis à la cité Malesherbes, chargée de recueillir les premières réactions de Guy Mollet qui se contente, lui, de le regarder à la télévision. À l’image, seules les tentures ont changé dans la grande salle de l’Élysée. Pour la quinzième fois, deux ventilateurs type Exposition coloniale brassent de l’air chaud sous les dorures de la salle des fêtes de l’Élysée.
    Le cérémonial reste le même. Les ministres, sagement groupés à la droite du président sont raides sur leur chaise. On voit à plusieurs reprises Georges Pompidou sortir son mouchoir pour s’éponger le front.
    Deux sujets au menu. Le premier est de politique intérieure : que

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