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Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
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ne peux pas la laisser passer !” » Et Marchais n’a pas moufté.
    Bref, tout le monde se convainc de la nécessité de se débarrasser de Marchais. « Il fait trop de mal au Parti communiste, me dit Estier, et à la gauche tout entière. »
    Des grenouillages inouïs doivent se dérouler dans les couloirs du PC. D’autant plus que les réactions des uns et des autres sont imprévisibles. Témoin Paul Laurent qui, à la dernière réunion du comité de liaison entre communistes et socialistes (le 20 ou le 21 mai), s’est montré jovial, plaisantin, alors que le 22 février il était apparu telle la statue du Commandeur à la même réunion du même comité de liaison.
    2 juin
    Sa vie et son régime au ministère de l’Intérieur ont fait grossir Ponia de plusieurs kilos en un an. Il reste pétillant, avec des yeux minuscules dans un visage cramoisi. C’est de Chirac qu’il me parle avec un mélange de condescendance et de certitude :
    « Vous oubliez, me dit-il, que Chirac est un homme de Giscard.Il n’aura pas de problèmes avec Giscard, jamais ! Nous avions parié sur Chirac avant le deuxième tour de 1974. Cela a été un choix difficile. C’est pourquoi, vous vous rappelez, Giscard a pris tout son temps avant de constituer le gouvernement. Nous avons parié à ce moment-là non pas que Chirac casserait l’UDR, mais qu’il assurerait son contrôle sur le mouvement gaulliste. Peut-être pensions-nous que le contrôle serait un peu moins absolu et qu’une petite partie de l’UDR s’en irait. »
    Façon de confirmer, au contraire, que Ponia ne croyait pas que Chirac garderait l’UDR unie. Sa façon de dire « nous », quand il parle de Giscard et de lui, est un aveu : de ce couple, Chirac est exclu.
    9 juin
    Vu Roger Chinaud, qui aurait dit à Chirac, il y a quelques jours, à propos de ses incessantes virées politiques en province auprès des cadres et des militants de l’UDR : « Vous faites trop de choses le dimanche : vos activités tiennent plus d’un voyageur de commerce que d’un Premier ministre. »
    11 juin
    Yves Guéna me parle des futures assises de l’UDR, qui doivent avoir lieu à Nice dans trois jours. L’UDR joue la place de premier parti de la majorité : « Nous avons l’organisation de masse, l’électorat de masse. Les militants attendent en rongeant leur frein, et protestent. Ils ont envie d’en découdre. Dans la campagne qui s’annonce, Chirac, contrairement à Ponia, est hostile aux primaires entre candidats RI et candidats UDR. Il pense que les primaires désorientent les électeurs, il souhaiterait qu’il n’y en ait que 10 %, pas plus ! Nous n’avons aucune raison d’abandonner nos élus. »
    Je ne vois pas comment cela peut s’arranger entre les Républicains indépendants et les gaullistes, entre Giscard et Chirac. « Il y a une solution, risque Guéna, c’est que Chirac quitte l’UDR et devienne le chef de toute la majorité. Cela peut passer si Giscard dit aux siens : vous allez nous faire perdre la bataille. Après tout, il n’est pas dramatique pour Giscard que l’UDR reste majoritaire après avoir gouvernéavec lui pendant trois ans. Les assises, me confie-t-il, s’inscrivent dans cette optique. »
    Si je le suis bien, Chirac se pose depuis six mois la question du cumul entre ses fonctions de secrétaire général de l’UDR et de Premier ministre. La charge est beaucoup trop lourde. D’un autre côté, personne ne tiendra le mouvement aussi bien, avec le même brio que lui. S’il se retire du secrétariat général, il se demande si tout ne va pas s’effilocher. Le problème, c’est le choix du moment : s’il abandonne le secrétariat aux assises, ce sera beaucoup trop tôt ; en octobre, ce sera trop tard.
    Je comprends, dans ce qu’il me dit, que Chirac est tenté d’accepter la proposition de Giscard, celle qui faisait sourire Dominati quand il m’a dit : « Pensez ce que vous voulez, je vous dis que nous n’aurons pas d’ennuis avec Chirac » ; il abandonnerait l’UDR en septembre, par exemple, pour devenir le chef de la majorité.
    D’ailleurs, à Matignon, Serge Maffert ne me dit pas autre chose : la stratégie de Chirac a été que l’UDR reste un mouvement sûr de lui, soudé, renouvelé dans son image, dans son vocabulaire, dans ses attitudes politiques. Il voulait « assurer l’héritage ». C’est fait. Aujourd’hui, il faut assurer la survie de la majorité tout entière autour de

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