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Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
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aujourd’hui : le décor planté marque effectivement la victoire de l’UDR au sein de la majorité. Mais tout peut encore changer, car Lecanuet et Giscard, nous dit-il, avaient conclu un accord sur la représentation proportionnelle, chère aux centristes, avant le ralliement de Lecanuet à Giscard. Et de cette représentation proportionnelle, l’UDR ne veut pas. Par conséquent, le jour où on arrivera aux élections, Giscard dira, six semaines avant la date du scrutin, qu’il en revient au scrutin à la proportionnelle pour séparer les communistes des socialistes, et donc pour créer un bloc destiné à équilibrer l’UDR. Il ajoutera : « Tout ce que je n’ai pas fait, c’est à cause de l’État-UDR » ; il désignera les gaullistes à la vindicte publique, et l’UDR sera laminée.
    Puis il revient sur ses rapports avec Pompidou en se défendant d’avoir fomenté le moindre complot contre lui, pas plus en 1969, dans son discours sur la « nouvelle société », qu’en 1972, lorsqu’il a sollicité un vote de confiance des députés. Tout – sa disgrâce, surtout – a été fomenté par Pierre Juillet. Lorsque, au moment du référendum sur l’entrée de la Grande-Bretagne dans le Marché commun, Juillet a voulu quitter l’Élysée, il est venu trouver Chaban pour lui faire ses adieux : « Je m’en vais, lui a-t-il dit, vous avez gagné. Vous restez Premier ministre et je considère que c’est une catastrophe pourla France. Vous êtes dangereux, car on ne sait pas ce que vous êtes ni ce que vous voulez. Vous êtes gaulliste, ça, sûrement, mais vous avez engagé une politique insupportable. Votre idée de débloquer la société est stupide, et elle nous vaudra du mal. Nous allons à l’échec, mais je ne peux plus rien faire : vous avez gagné ! »
    Chaban reste néanmoins persuadé que Pompidou, au-delà de tous les malentendus soigneusement entretenus, avait fait de lui son héritier. Il aurait même, me dit-il, envisagé de lui redonner un poste de Premier ministre en 1975, juste avant les élections prévues pour 1976.
    Je trouve assez piquant – et sûrement pas dû au hasard – que, toutes les fois qu’il me voit, et où que ce soit, Chaban juge bon de revenir sur ce qui a pu l’opposer à Georges Pompidou. Car, après tout, il le sait, c’est moi qui ai publié dans L’Express le fameux article « Pompidou a choisi Giscard ».
    19 juin
    Yves Cannac, que je vois aujourd’hui, introduit une nuance de taille dans la définition de la majorité : si Giscard est le chef de la majorité présidentielle, Jacques Chirac est désormais pour Giscard le chef naturel de la majorité parlementaire . Mais il n’est que cela.
    « Il faut évidemment qu’il y ait la plus grande coïncidence possible entre les deux majorités. Le fait qu’il appartient à Jacques Chirac d’organiser la majorité parlementaire ne signifie pas que le Premier ministre décharge le président de tout. À l’égard du pays, c’est le président, et non Chirac, qui est responsable. Chirac est un homme qui se veut le fidèle interprète des orientations fixées par le président, avec une marge de manœuvre qui est effectivement personnelle. »
    Même interprétation à Matignon, où l’adjointe de Serge Maffert m’a dit, à peine avais-je quitté Cannac : « Le Premier ministre est le chef d’état-major du président. »
    Il faudra dater de la fin juin 1975 le premier gros chahut, à l’intérieur du PS, contre Mitterrand. Le bât de Mitterrand – vaincu l’année dernière... car s’il avait gagné ! – blesse le Ceres.
    23 juin
    Nous déjeunons, Irène Allier et moi, avec Michel Jobert. Il n’a plus qu’une certitude : que la situation économique est très mauvaise et que tout ce que le Premier ministre annonce va se casser la gueule !
    Nous commandons notre menu, et le hasard fait que nous prenons tous trois la même chose.
    « C’est comme à l’UDR, plaisante Irène.
    – Non, répond Jobert. Nous, à l’UDR, on nous aurait dit : “Prenez-tous des grillades !” Et nous nous serions levés en criant : “Vive Chirac !” »
    25 juin
    Déjeuné avec Tomasini. Il me raconte comment, en 1973, à la veille des élections, Chaban lui a demandé de trouver un fichier parmi les plus larges de noms à qui envoyer lettres et documents de propagande de l’UDR. On aurait pu trouver le fichier des abonnés à EDF, mais c’est Chaban qui lui aurait conseillé

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