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Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
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fait peur, les communistes ont fait peur, Mitterrand surtout a fait peur. Pas la moindre autocritique chez eux. Ils ont perdu, mais ils n’y sont pour rien ! Il s’agit d’un éreintement de Mitterrand, le pelé, le galeux, d’où leur vient tout le mal.
    Cela, c’était avant la réunion. Pendant, ils n’ont osé rien dire, car ils ont peur de ce Mitterrand qui a fait peur aux Français.
    Les radicaux ont tout de même demandé que la stratégie d’union de la gauche soit abandonnée.
    Abattu, encore qu’il s’efforce de ne pas le montrer, Mitterrand ne me dit pas grand-chose. Il refuse de croire que ce sont les images de sa conférence de presse qui ont attiré sur la gauche entière les foudres électorales. Après tout, tous les mouvements de gauche ont perdu, et le centre aussi. Cela, il n’y est pour rien, non ? Il est plus furieux, il me semble, que désespéré par la défaite. Tout de même, il ne s’attendait pas à ce que l’échec – son échec – soit aussi retentissant.

    12 juillet
    Pompidou remplacé par Couve de Murville : la nouvelle est tombée le 10, alors que personne ne s’y attendait. Je reprends la chronologie :
    Le 30 mai, Pompidou avait constitué un nouveau gouvernement. La présence de René Capitant, que je savais hostile à Pompidou (il me l’avait dit en mai), ne m’avait pas même étonnée, car après tout c’est un inconditionnel du Général et les inconditionnels se font rares, par ces temps troublés ! La permutation entre Debré et Couve de Murville était apparue assez incompréhensible, mais, à part cela, les Français, « ensuqués », comme on dit à Nice, par les événements de mai, n’ont accordé aucun intérêt au remaniement ministériel. Il était normal à leurs yeux que, acteur essentiel de la victoire gaulliste, Georges Pompidou reste le chef du gouvernement. D’où notre stupeur lorsque, il y a quarante-huit heures, le Général l’a limogé.
    Le lendemain, il a eu droit à une lettre de remerciements du Général qui n’explique rien, sinon qu’il l’appelle son « cher ami 30  ».
    Pourquoi ce départ ? Peut-être Pompidou était-il devenu trop populaire ? Les sondages de l’IFOP lui donnaient en pleine crise, avant la fin mai, 40 % d’opinions favorables, contre 15 % seulement à de Gaulle. Était-ce trop aux yeux du Général ?
    Nous essayons, avec Claude Imbert, Georges Suffert, Catherine Nay, de mettre nos ressources et nos enquêtes en commun. Ce qui nous apparaît, c’est que le jeudi 30 mai, après le retour de De Gaulle de Baden-Baden, sur le coup de midi, Georges Pompidou lui aurait proposé sa démission. Le Général l’aurait écartée. Et c’est Pompidou qui aurait insisté à ce moment-là pour que le Général renonce à son idée de référendum pour dissoudre l’Assemblée nationale et annoncer des législatives.
    Le 1 er  juillet, me dit Georges Suffert qui le sait de source sûre (je ne sais s’il a vu Pompidou lui-même, je ne le pense d’ailleurs pas, mais c’est tout comme : Guichard ?), Pompidou aurait tenu à de Gaulle un langage de ce genre : « Je ne serais pas hostile à prendre quelque repos. Mais si vous voulez me garder, etc. » Le 3, Pompidou se demande s’il n’a pas commis une bourde et fait savoir au secrétaire général de l’Élysée qu’il est prêt à conduire le prochain gouvernement. Le 5, il reçoit quelques rédacteurs en chef, dont Georges Suffert. Il ne dit mot de son éventuel départ, parce qu’il croit encore que le Général ne souhaite pas sa démission.
    Le 6, samedi, Georges Pompidou est prévenu à l’heure du déjeuner : Couve de Murville le remplacera à Matignon. (Je vais vite, car tout cela sera plus développé dans la prochaine cover-story du journal.) Le 11, pour la rentrée parlementaire, c’est Couve qui a officié.
    Les gaullistes disent de lui que ses « roses poussent en dedans ». Façon de dire qu’il n’a rien d’un homme politique tel qu’on l’imagine. Pompidou, lorsqu’il est arrivé à Matignon, était inconnu de la classe politique, mais était madré, auvergnat, il sortait de chez Rothschild, il avait été directeur de cabinet du Général, il lui a fallu peu de temps pour prendre place parmi ses pairs. Ce Couve-là, « champion du monde du lieu commun », comme disent pas mal de ses collègues parlementaires, est fidèle au Général depuis qu’il l’a rallié en 1943.Un signe : à part Pompidou, il était

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