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Cahiers secrets de la Ve République: 1977-1986

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1977-1986 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
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récupérer les choses avant l'automne 1983. Aujourd'hui, il faut regarder sans rien dire. »
    S'asseoir au bord du fleuve, en quelque sorte, et regarder passer les cadavres de ses ennemis...
    Nous revenons sur la campagne présidentielle : il me raconte que le 3 avril, donc quinze jours avant le premier tour, il a déjeuné à l'Élysée avec Giscard. Jean Lecanuet s'était joint à eux. « Nous lui avons dit qu'il fallait rectifier le tir. Ou, plus exactement, qu'il fallait revoir tous ses contacts avec la presse. Les thèmes qu'il avait choisi de développer pendant sa campagne ne posaient pas problème, à notre sens, car ils étaient constamment améliorés. Ce qui ne marchait pas, c'était en réalité son état-major, toute l'équipe qui était autour de lui à son siège électoral, rue de Marignan ! »
    Intérieurement, je souris quand il me dit cela : il est évident qu'il s'est senti écarté de cette campagne, au moins à ses débuts. Normal qu'il trouve qu'autour de Giscard il y ait eu trop de monde, notamment, insiste-t-il, « pas un seul vrai professionnel ». Le seul, évidemment, aurait dû être lui !
    Il pense cela si fort qu'il continue : « Le 8 avril, j'ai déjeuné avec Deniau et Pelletier. J'ai trouvé qu'ils étaient dans une pagaille intellectuelle complète ! Ils se félicitaient parce que l'organigramme était au point ! Comme si on gagnait une élection avec un organigramme ! Beaucoup trop de monde, beaucoup trop de moyens ! Il fallait un état-major le plus léger possible. En revanche, sur le terrain, il fallait faire donner les notables, les députés qu'on s'était au contraire ingénié à démobiliser ! »
    Ponia rougit d'émotion à ce souvenir : « Bernard Rideau a commis les erreurs habituelles : un excès de radicalisme franc-maçon de centre gauche. À force de faire du “riolaccisme 27 ”, nous avons perdu notre clientèle. Il fallait jouer les PME, les PMI, l'artisanat et le commerce : c'est cet électorat-là qui a bougé. On a gagné un franc-maçon et perdu dix électeurs du Parti républicain qui avaient voté Giscard en 1974 ! »
    Barre a-t-il été un atout ou un handicap, tout ce temps-là ? Ponia n'a nul besoin de réfléchir longtemps pour répondre à la question : « J'avais suggéré au Président de s'en séparer en juin dernier. On constatera que Raymond Barre laisse certes une bonne situation, que l'abandon des règles économiques qu'il a mises en place se révélera désastreux. Le seul problème est de savoir s'il est allé lentement ou s'il a sprinté vers la catastrophe ! »
    Pourquoi cette réticence de Giscard à changer de Premier ministre avant le début de la campagne ? Il me dit : « Qui prendre ? Jean-François Deniau ? Trop diaphane, quoique très proche de Valéry ! »
    Il en veut manifestement à Deniau à qui Giscard avait délégué l'organisation de sa campagne : « Confier à Deniau, qui n'avait jamais commandé à personne, l'organisation d'une affaire mettant en cause 200 personnes au QG de la rue de Marignan, et 800 autres sur le terrain dans toute la France ! »
    Il me confie que, dès le mois de février, Giscard lui avait dit : « J'ai perdu la partie avant décembre. Aujourd'hui, les jeux sont faits. »
    Son analyse : Giscard a laissé le terrain vacant en janvier et février. Il a même empêché que ses partisans se mobilisent sur le terrain « alors qu'il fallait faire un battage considérable autour du bilan, qui était bon. Son bilan social était bon, son bilan énergétique, son bilan sur le niveau de vie des Français étaient bons. Son bilan militaire était correct. Les caisses étaient pleines. Au lieu de cela il s'est tu, il nous a demandé de nous taire, tandis que nous avons entendu, dans un silence de mort de notre côté, Mitterrand dire que le bilan était mauvais. Il revenait peut-être aux ministres de le dire : il est vrai qu'ils étaient émasculés. Giscard n'a pas lâché les chiens dans les premières semaines, mais une fois qu'il a fini par les lâcher, il s'est aperçu que ses chiens étaient en réalité de gentils toutous ! ».
    Il ne peut s'empêcher, après cette phrase, de me dire avec tristesse : « J'ai la preuve que Riolacci et Rideau ont montré au Président, juste avant le démarrage de la campagne, un faux sondage me concernant, montrant que j'étais définitivement out  ! »
    Retour à l'analyse du scrutin : il voit plusieurs causes à

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