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Cahiers secrets de la Ve République: 1977-1986

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1977-1986 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
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les futures législatives. Giscardiens et chiraquiens iront donc en ordre dispersé à la bataille.
    Qui conduira l'ex-majorité ? Même si Giscard ne le veut pas, Chirac semble tout de même le mieux placé. Avant Raymond Barre, en tout cas, si toutefois celui-ci en exprimait le désir. Avant Poniatowski, réapparu dans les jours sombres et dont la cote, après la défaite d'avant-hier, a bizarrement remonté. Et sûrement avant Jean Lecanuet, qui, depuis le début, lucide et désabusé, a vu Giscard courir à sa perte.

    18 mai
    Incroyable, l'atmosphère des jours que nous vivons : élu le 10 mai, Mitterrand est Président sans l'être. Sa première semaine de pouvoir, il l'a passée la plupart du temps chez lui, à remercier ses équipes, à encourager quelques parlementaires, ou encore à faire ses adieux aux conseillers généraux de la Nièvre.
    Jeudi seulement, le 21, viendra le moment des décisions politiques : la nomination du Premier ministre et du gouvernement, et surtout la dissolution de l'Assemblée nationale. Pierre Mauroy reste favori pour Matignon. Le gouvernement, paraît-il, est déjà à moitié constitué.
    Une fête est prévue, le soir, place de la Concorde, pour marquer la prise de pouvoir socialiste, et, du même coup, le départ de la campagne des législatives. Si les deux tours ont lieu les 14 et 21 juin, les candidats doivent se déclarer dès le début de la semaine prochaine.
    Il faut dire aussi que ces jours, longs pour Mitterrand, le sont sans doute encore plus pour Giscard. Pour la première fois dans l'histoire de la V e  République, un Président sortant cédera la place à son successeur. Cette fois, c'est VGE en personne qui devra remettre à François Mitterrand le code atomique. Il quittera ensuite l'Élysée après une courte cérémonie de passation des pouvoirs qui ne sera sûrement pas des plus agréables pour lui.

    19 mai
    Qui n'a pas vu, hier après-midi, entrer dans le misérable couloir de l'« antenne présidentielle », 6, rue de Solferino, le chef du protocole de l'Élysée, Jean Mérimée, sinistre, solennel et figé, suivi des chargées de presse de Giscard, Évelyne Richard et Marie-France Sodini, ainsi que d'un représentant de la préfecture de police, ne connaît rien à ce qu'on appelle l'alternance. Tous ont été reçus par André Rousselet, costume rayé impeccable, chemise giscardienne et cigare aux lèvres. Le socialisme à visage plus qu'humain...
    Dans les couloirs toujours encombrés de cartons et de dossiers à peine emballés ou déballés, à la pagaille du déménagement socialiste, on mesure l'ampleur du changement. Après vingt-trois ans d'opposition arrivent au pouvoir des gens qui, pour la plupart, n'ont jamais exercé de fonctions gouvernementales. Qui n'ont jamais connu les contraintes du pouvoir. Qui n'en ont jamais éprouvé non plus les délices.
    Tout cela, à ce qu'il m'apparaît, fait un peu peur aux Français, même lorsqu'ils l'ont voulu. Du coup, chacun à gauche essaie de rassurer.
    Jacques Delors annonce, s'il est ministre de l'Économie et des Finances, son intention de garder à ses côtés le plus grand nombre de fonctionnaires de l'ancienne équipe gouvernementale : le directeur du Trésor, par exemple, Jean-Yves Haberer, ancien collaborateur de Michel Debré dont celui-ci ne cessait d'ailleurs de me faire l'éloge, ces derniers mois.
    « Pas de chasse aux sorcières ! » ne cessent de dire les conseillers audiovisuels de Mitterrand. « Pas de valse des préfets ! » ajoute l'entourage de Pierre Mauroy, qui a d'ailleurs l'intention – c'est ce qu'il m'a dit hier au téléphone – de prendre l'actuel préfet du Nord-Pas-de-Calais, qu'il connaît depuis longtemps et avec lequel il a eu, quoique dans l'opposition, de bons rapports, André Chadeau, comme directeur de cabinet.
    Bref, la classe politique reste la classe politique, la classe dirigeante reste la classe dirigeante. Par-delà toutes les majorités, elle assure la continuité.
    Dans le protocole choisi, même désir d'affirmer des valeurs désormais présidentielles : c'est en voiture découverte que François Mitterrand remontera, jeudi, les Champs-Élysées. Et on jouera La Marseillaise au rythme d'avant Giscard 25 .
    Tout est fait pour rassurer l'Argent, les Douanes, la Bourse ! Ce qui rassure beaucoup la droite, c'est, paradoxalement, la perspective des élections législatives : la plupart des militants et responsables politiques du RPR

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