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Cahiers secrets de la Ve République: 1977-1986

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1977-1986 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
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écourtées : j'ai hésité, puis dit oui.
    Autant la perspective d'appartenir à un cabinet, fût-ce celui de l'Élysée, me rebutait, car je trouvais que ce n'était pas ma place, autant Radio France me paraît intéressant, même si je ne connais rien au fonctionnement administratif de la maison ronde. Sait-on jamais pourquoi on dit oui ou non ? En tout cas, c'est fait : j'ai dit oui.
    Sans mesurer ce que je mesure ce soir : fini, sans nul doute, ces notes politiques quotidiennes. Fini, les congrès politiques, les sessions parlementaires, la salle des Quatre-Colonnes où j'ai rencontré la terre entière et écrit des milliers d'articles. J'arriverai néanmoins, j'en suis sûre, à continuer de m'intéresser à la politique, en espérant que je ne serai pas trop loin du terrain, comme on dit. Je prends de toute façon la résolution de continuer la rédaction de ces cahiers, quitte à en consacrer d'autres, en parallèle, à Radio France et à ses couloirs. Même si j'écris moins sur la politique, j'écrirai encore, dès que j'en aurai le loisir, et même si je ne l'ai pas.
    Pierre Mauroy me dit que, proposant mon nom pour Radio France en même temps que celui de Pierre Desgraupes pour Antenne 2, François Mitterrand a accepté en ajoutant : « C'est d'accord, mais ce sera sur votre contingent, alors ! » J'apprends à cette occasion que Mitterrand et Mauroy sont tombés d'accord pour se partager les nominations. Ainsi, après que Mauroy a avancé mon nom, Mitterrand a immédiatement tranché : Jacques Boutet sera président de TF1 à la place de Jean-Louis Guillaud, et Guy Thomas, le bouillant journaliste d'Europe 1, prendra les commandes de FR3 47 .
    Mauroy ajoute en me rapportant cette conversation qu'il ne sera pas interventionniste et que son cabinet ne le sera pas davantage.
    Je lui demande : « Et l'Élysée ? »
    Il me répond en s'esclaffant : « Ça, j'en suis moins sûr ! »

    5 août
    Dîner chez Roger Stéphane qui veut me faire rencontrer le directeur de France Culture, Yves Jaigu, que je ne connais pas. Pourquoi ? Parce qu'il craint qu'à peine arrivée à la présidence de Radio France, on ne me demande sa tête. Qui ça, on  ? Le pouvoir, dit Stéphane sans plus de précision. Sans chaleur non plus, car il n'a jamais aimé Mitterrand (on se souvient de la fameuse émission de télévision où il lui avait demandé à partir de quand il s'était senti socialiste !).
    Ce Jaigu, lui avais-je dit la première fois qu'il m'avait fait part de ses craintes pour quelqu'un qui était un de ses meilleurs amis, pas précisément à gauche, ce Jaigu, je ne le connais pas. Je ne vois pas pourquoi je le garderais avec moi s'il me tire dans les pattes. Je pensais même, pour dire la vérité, que s'il fallait accorder à un moment donné un gage au pouvoir, autant que ce fût lui, puisque précisément je ne le connaissais pas !
    Donc, Roger Stéphane a organisé, sans attendre, un dîner sur sa terrasse, rue Psichari, par une belle soirée d'été. Le charme a pris. Nous sommes restés à parler de tout pendant plusieurs heures. L'un parlait de Malraux et de Gide, l'autre des journées de Salamanque. Nous nous sommes quittés en jurant de nous revoir, dans cette formation, le plus souvent possible. Jaigu n'a pas essayé une seconde de parler de France Culture. J'ai trouvé cela plutôt élégant.
    Quelques heures hors du temps...

    13 août
    J'ai Mitterrand au téléphone, soulagé par la fin du drame avec l'Iran. La veille au soir, les Français retenus contre leur gré à Téhéran depuis plusieurs jours ont finalement eu l'autorisation des autorités iraniennes de regagner la France. La crise durait depuis le début du mois, après que, fin juillet, les deux principaux opposants au nouveau régime iranien ont demandé et obtenu l'asile politique en France.
    Mitterrand trouve que sa position dans ce moment difficile n'a pas été bien expliquée par la presse. La France avait bien accepté de recueillir Bani Sadr et son compagnon d'infortune, mais à condition qu'ils ne se livrent pas à des démonstrations publiques. La réaction des Iraniens, celle d'interdire quelques jours après au gouvernement français de faire revenir à titre préventif près de 200 ressortissants français a exposé Mitterrand à sa première crise internationale de grande importance. Il soutient que la presse française n'y a rien compris. Je lui fais valoir que les services de l'Élysée, loin de

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