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Cahiers secrets de la Ve République: 1977-1986

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1977-1986 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
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qui font mine maintenant de gommer les cinq ans de Programme commun, de ne les avoir jamais voulues, ces cinq années-là, aucun de ceux-là n'a jamais été proche de moi. J'ai contre moi la gauche intellectuelle, je l'ai toujours eue. Rappelez-vous la présidentielle de 1965 : les mêmes étaient déjà à l'écart, critiques.
    « Bien sûr, ils rêvent d'une social-démocratie à la sous-Schmidt, mais ce projet-là est précisément celui qui va dans le sens de Giscard : il ne peut pas être retenu par la gauche. »
    Je lui demande s'il ne finit pas par être las de cette opposition, de ces défaites.
    « Oh, ça me lasserait si je ne faisais que cela ! Mais j'ai d'autres sujets de préoccupation pour l'esprit. J'ai commencé à écrire mon prochain livre. »
    Une pause. Comme toujours quand il sent venir la solitude, il se met donc à écrire. Il me lit les quatre pages qu'il a rédigées hier dans le train sur sa dernière visite en URSS et sa rencontre avec Souslov qui lui avait dit à Moscou : « Le PC français est libre de toute directive internationale. »
    « La gauche finira par gagner, murmure-t-il presque pour lui-même, mais elle gagne plus lentement, voilà tout ! »
    Il me reparle du PC, pour dire à quel point ceux qui expriment aujourd'hui leur hostilité à son égard sont en fait profondément anticommunistes. Ce qui ne l'empêche pas de me redire en ces termes ce qu'il m'avait dit l'autre jour : « C'est un crime, ils nous ont assassinés, c'est le plus grand crime communiste depuis la guerre ! »
    Bon. Le voilà reparti à l'horizon 1981. Sans l'ombre, je crois, d'une autocritique. Se contente de me dire : « Les articles d'Arthur Conte sont imbéciles : j'aurais, selon lui, été dupe des communistes, moi qui ai toujours dit que les communistes n'avaient pas changé ! Depuis des années, je dis que la crise avec les communistes éclaterait tôt ou tard, je ne savais pas quand, avant ou après les élections, mais que, de toute façon, il fallait qu'elle éclate ! »
    Quoi qu'il en dise, je le sens écorché vif par la défaite.
    Il termine en me posant une question que je n'attendais pas. Je viens de déménager et il me demande mon adresse. Je la lui donne : j'habite rue de Verneuil. Il me dit innocemment : « Ah oui, c'est le quartier, quoi... » Il veut dire : le quartier d'Anne Pingeot, que je sais habiter rue Jacob, ou par là, et dont Danièle Molho m'a dit qu'elle avait une fille qui ressemblait à Mitterrand.
    Danièle Molho l'a rencontrée un jour, récemment, à Saint-Germain, en sa compagnie. Les deux suivaient une petite fille sur une bicyclette à quatre roues. C'est la première fois que j'ai entendu parler d'une enfant de Mitterrand. J'ai tellement vu de femmes autour de lui depuis plus de quinze ans que je ne sais plus discerner le vrai du faux.
    Si je repasse dans ma tête les dernières séquences, je me dis que, bien sûr, sa présence répétée à Saint-Germain-des-Prés n'est pas due au hasard. Après le petit déjeuner de France Inter, je m'en souviens maintenant, Mitterrand avait voulu que je le raccompagne en voiture, alors que son chauffeur nous suivait. Je l'avais fait souvent, à d'autres périodes de ma vie. Je me souviens, dans les années 1970, de l'avoir souvent, après des réunions politiques, déposé en bas de la rue Lepic. Je n'ai appris que plus tard qu'une chanteuse célèbre l'attendait en haut de la butte Montmartre.
    La dernière fois, fin février, après l'émission d'Inter, il m'a demandé de le laisser devant les Deux Magots. Près de la rue Jacob, donc, où il se rendait, je le sais maintenant.
    L'idée de le laisser seul, en pleine campagne électorale, au milieu de la rue, m'a fait peur. Je lui ai dit que je ne voulais pas prendre cette responsabilité : je me suis donc arrêtée à sa demande, mais j'ai reculé jusqu'à la voiture de son chauffeur, qui, nous suivant, s'était arrêtée également.
    Il a piqué une sorte de colère brève à l'idée que je contrecarrais ses projets, n'a pas attendu et est parti à pied vers la place Saint-Germain, nous semant du même coup, le chauffeur et moi. Et peut-être la voiture banalisée des flics qui nous suivaient...

    3 mai
    Conférence de presse de Georges Marchais. Interrogé sur le débat démocratique, il répond qu'il s'en félicite, qu'il s'en réjouit à l'avance. Il apostrophe les journalistes à sa manière gouailleuse :
    « Vous, nous dit-il non sans un

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