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Cahiers secrets de la Ve République: 1977-1986

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1977-1986 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
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du congrès radical. Je lui demande comment résumer la dernière séance. « Mélange de jalousies et de médiocrité », dit-il sans ajouter un mot.

    25 mai
    Alain Trampoglieri me parle de la bagarre entre Jean-Pierre Soisson et Jacques Blanc (des titans, ces deux-là !).
    Dîner chez Paule de Baumont où je suis assise à côté d'André Bettencourt qui me parle longuement de l'Afghanistan et de l'Iran qui, dit-il, va tomber à son tour. C'est un ami d'avant guerre de Mitterrand : il est pourtant critique et gentil pour VGE, qu'il a l'air de connaître mieux que personne, et féroce sur François Mitterrand : « Je le connais très bien, il n'est pas social-démocrate et il ne le deviendra jamais ! » Tout de même, il était en train de préparer l'entrée des communistes au gouvernement français, non ? Il n'en revient pas.
    Michel Debré : Jacques Chirac lui prépare, pense-t-il, le pire traitement. Il n'en veut pas, c'est sûr, comme tête de liste aux futures élections européennes 37 . Debré le sait et il est décidé à foncer sans attendre. Vers quoi ? Il veut l'Europe des patries, mais, quoi qu'il fasse, il passera pour antieuropéen. Ce qui est d'ailleurs, en France, une position capable de « faire des voix ».

    1 er  juin
    Conversation avec François Mitterrand après qu'il a annoncé, lors d'une émission de France Inter, que « le Programme commun était forclos ! ».
    Voici en substance, et parfois au mot près, ce qu'il m'a dit :
    « Les communistes se sont cassé la figure en entamant une campagne sur le virage à droite des socialistes. Ils l'ont fait alors que toute la France s'en fichait éperdument. Ils ont été contraints d'en arriver à montrer qu'eux-mêmes pouvaient faire peur. Le discours que Marchais me contraignait à tenir, c'était : “Ils sont avec moi, vous n'allez tout de même pas voter pour eux !”
    « J'aurais été dans mon village que je n'aurais pas voté pour ces gens-là !” »
    Il passe à son entrevue avec Giscard, immédiatement après les élections. La conversation commence (pendant une demi-heure) par des considérations générales :
    VGE : « Au xix e  siècle, le choc de la société industrielle a provoqué une grande instabilité : les régimes qui se sont succédé n'ont pas su dissoudre leur contentieux : aucun n'a donc dépassé vingt ans, jusqu'à la III e  République. Et encore, à l'intérieur de ces vingt ans, les différentes périodes ont été remplies d'accidents.
    « Personne, a-t-il ajouté, n'a résolu les contentieux de la société moderne. Moi, c'est ce que je m'applique à faire. Ce qui explique que j'aie gagné. J'évite l'accumulation des contentieux ! »
    François Mitterrand : « C'est une analyse que j'approuve à peu près entièrement, à cette différence près que vous aviez perdu ! Vous êtes dans la situation de Louis-Philippe en 1847. Si vous êtes encore là, vous ne le devez pas à votre analyse des contentieux ni à votre capacité de les résoudre ! Vous le devez à la division de la gauche. Vous n'avez pas les moyens politiques de votre compréhension de l'Histoire. La vérité est que vous ne disposez pas des forces sociales suffisantes. Vous me rassurez parce que, dans trois ans, vous serez dans la même situation qu'en 1978. »
    VGE : « Mais j'avais prévu, moi, l'évolution du Parti communiste ! »
    François Mitterrand : « Peut-être, mais vous me donnez là une explication tactique : vous comptez sur les erreurs de vos adversaires ! Cela n'a rien à voir avec votre théorie des contentieux ! »
    Dans une autre partie de la conversation, VGE dit : « Je ne suis pas socialiste, je ne suis pas social-démocrate et je n'essaierai pas de l'être. Mais je laisserais, s'il le fallait, se dérouler une opération sociale-démocrate, car, dans ce cas, la France pourrait vivre. C'est l'hypothèse que vous représentiez qui était inacceptable ! »
    Abordant un de ses thèmes favoris, Mitterrand parle maintenant du temps. Je ne l'interromps pas : « Je n'ai pas le temps des autres, c'est certain. J'ai 61 ans, et tous les problèmes au sein du Parti socialiste viennent de mon âge. Si j'avais 45 ans, le Parti aurait très bien digéré son échec aux dernières législatives et ne se poserait pas de problèmes sur son avenir.
    « Mais si je n'ai pas le temps des autres, j'ai mon temps à moi, mon temps mental. Un homme de 45 ans est obsédé par l'échec du

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