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Cahiers secrets de la Ve République: 1977-1986

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1977-1986 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
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installer dans son bureau par le général Vandermeersch, il a pointé du doigt le quartier où les soldats français devaient être parachutés !
    « Au fond, il n'hésite pas à prendre des risques. Il s'est engagé à dix-huit ans dans la 2 e DB ; en 1962, il a pris le parti du général de Gaulle alors que tout le groupe des Républicains indépendants avait basculé contre. En 1969, il a pris le risque de ne pas suivre le Général, en refusant d'approuver le référendum sur la décentralisation et le Sénat. Le “oui mais”, de ce point de vue, a été une prise de risques ! Les choix politiques, pour lui, supposent la prise de risques. »
    Nous revenons un instant sur ce qui a été, dans la vie politique de Giscard, son seul vrai traumatisme jusqu'à aujourd'hui : son éviction du gouvernement Pompidou sous de Gaulle en 1966.
    « Le choc de 1966, confirme-t-il, a été capital dans sa tactique politique : le “oui mais”, la condamnation de l'“exercice solitaire du pouvoir” ne lui ont rien appris sur le plan du caractère, mais cela lui a servi sur un plan tactique ; cela l'a fait exister. Il aurait eu très peu de marge de manœuvre s'il était resté au gouvernement. Sa chance a finalement été cette éviction qui lui a été si douloureuse ! »

    27 juin
    Depuis cette longue conversation avec Ponia, je n'ai rien écrit sur ce carnet. Je repense à ce que Yves Guéna m'a raconté il y a quelques jours : Giscard a reçu à déjeuner récemment les membres des bureaux des groupes parlementaires. L'ordonnance de la table élyséenne les a tous laissés sans voix : « Face au chef de l'État, m'a raconté Guéna, un trou. Comme si personne n'avait le poids suffisant, ne devait avoir l'honneur de se trouver face à lui. Je me trouvais donc à droite du trou, légèrement décalé par rapport au Président. »
    Ce protocole, à certains égards ridicule, traduit exactement ce que Giscard pense de lui-même : pas un domaine qui lui échappe ! C'est son ambassadeur personnel, Ponia, qu'il envoie en Iran la semaine dernière pour recueillir le sentiment du chah sur les périls qui l'entourent. C'est lui, et lui seul, qui a imaginé la distribution aux salariés d'actions représentant jusqu'à 5 % du capital des entreprises, et qui en a fait la proposition lors de sa dernière conférence de presse : les ministres intéressés, dont le Premier ministre, en avaient été simplement avisés.
    Où en sont donc les relations avec Raymond Barre ? Il me semble qu'il y a entre eux le seul partage des tâches auquel consente Giscard. Qui a condamné l'« exercice solitaire du pouvoir » ? Il me semble que, de jour en jour, depuis mars dernier, Giscard intervient de plus en plus.
    Peut-être faut-il également raconter l'entrevue entre Giscard et Maurice Faure, que celui-ci m'a racontée hier. Ils ont donc parlé essentiellement de l'Europe, sur laquelle VGE sollicitait l'avis de Maurice Faure. La première question de VGE porte sur l'Espagne qui n'a aucun problème, contrairement à la France, avec la distribution des fruits et légumes. « Pourquoi ? », demande le Président. Maurice Faure répond comme il le peut : que les Espagnols se sont dotés d'une distribution décentralisée, plus adéquate à la circulation des denrées alimentaires.
    Du coup, le Président lui a demandé de manière informelle de rechercher les moyens d'éviter les trop fortes distorsions entre l'Europe du Nord et l'Europe du Midi.
    Puis ils passent aux affaires intérieures : « Vous n'êtes pas à votre place dans l'échiquier politique, dit Giscard à son interlocuteur. Mais c'est vous-même qui n'avez pas voulu changer de situation ! »
    Maurice Faure prend acte, effectivement, de l'ouverture que vient de lui proposer le chef de l'État. Il ne croit plus possible une victoire de François Mitterrand dans l'avenir, tout en pensant que la fin de l'union de la gauche n'est pas encore certaine. Il me dit, non sans philosophie : « Ça ne tient peut-être plus debout, mais, à la base, ça marche encore ! »
    Et comme la base, ce sont ses électeurs...
    Il accepterait éventuellement un poste non politique, une grande ambassade, par exemple, qui lui permettrait de continuer à pouvoir entrer la tête haute dans ses villages du Lot, sans avoir donné aux autres ni à lui-même l'impression d'abandonner Mitterrand à son sort.

    Georges Dayan est très malade. Je l'apprends aujourd'hui. Rupture

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