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Cahiers secrets de la Ve République: 1977-1986

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1977-1986 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
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Giscard à donc décidé d'envoyer les parachutistes français sur Kolwezi contre les Katangais. Tout cela dans un contexte plus large, celui de la sécurité de tout le continent africain, me dit-on à l'Élysée, où l'Éthiopie menace la Mauritanie et le Tchad : le gouvernement a jugé qu'il y avait là un grave danger de déstabilisation du Zaïre, et au-delà, sans doute la conquête prévue par l'Éthiopie de l'Érythrée, « dernier obstacle à la poussée soviétique vers la mer Rouge ».
    « Moscou, ajoute mon informateur élyséen, a donné le feu vert à ses alliés éthiopiens pour envahir l'Érythrée. L'opération va ouvrir les voies de l'océan Indien et de l'Atlantique sud, créant une ceinture rouge de l'Angola à la Rhodésie. »
    Dans les faits, l'opération de Kolwezi, décidée par Giscard, a comporté des risques militaires et diplomatiques, mais elle a été une réussite, selon l'Élysée, même si la France, en l'occurrence, s'est retrouvée isolée.
    Aujourd'hui, débat à l'Assemblée nationale sur la politique extérieure de la France.
    « Pourquoi intervenons-nous ? demande Mitterrand, qui reste le porte-parole du PS, même si beaucoup continuent de lui reprocher l'échec de la gauche aux législatives. Ce ne sont pas les accords de coopération qui expliquent la présence de l'armée française dans les opérations en cours. S'agit-il d'une action humanitaire ? Oui, mais ce ne sont pas les premiers arguments donnés par le Conseil des ministres le 17 mai dernier. Il s'agit de défendre qui contre qui ? poursuit-il. Les pouvoirs établis. Contre qui ? Qui combattons-nous au Tchad ? Nous n'en savons rien. Faisons des hypothèses : Hissène Habré ? On se bat contre la Libye, elle-même considérée comme agent de l'URSS ? Disons-le ! Au Zaïre, qui combattons-nous ? Les Cubains, agents de l'impérialisme soviétique ? Les Katangais ? Au nom de qui, pour qui et avec qui ? »

    14 juin
    Conférence de presse de Valéry Giscard d'Estaing. Son premier objet est de se féliciter de ce que les Français aient fait le « bon choix », comme il l'avait dit à Verdun. Sa démonstration est sans appel : la France entre dans une période où il n'y a plus d'élection avant longtemps. Le Président peut désormais « poursuivre ses efforts en direction de l'ouverture politique et créer les conditions d'une cohabitation raisonnable ».
    Les rencontres avec les leaders politiques ? « Ces rencontres, à mes yeux, étaient normales. C'est le départ d'une pratique nouvelle qui sera poursuivie. »
    Au fond, tout cela, il l'avait déjà dit à ses interlocuteurs, de gauche ou de droite, puisque Mitterrand m'en avait fait le récit. Pourtant, entendre le président de la République confirmer son intention de continuer l'ouverture marque un véritable tournant dans la vie politique du pays. Voilà qui change considérablement l'atmosphère !
    Parmi les autres annonces de la conférence de presse, la proposition de limiter à deux le nombre des mandats politiques nationaux, de moraliser le financement des partis politiques. Réformer la société ? « Je m'y efforcerai », répond-il sobrement.
    Gérard Carreyrou 39 lui demande comment il envisage la campagne présidentielle de 1981. « Les élections de mars ont mis fin à cinq ans de campagne électorale ininterrompue. Ne comptez pas sur moi pour la faire commencer à nouveau. »
    Gilbert Mathieu, du Monde , essaie d'opposer la politique économique de Barre à celle de Giscard. « Il n'y a pas deux politiques économiques, il n'y en a qu'une ; celle que conduit Raymond Barre est celle que je lui ai demandé de conduire. »
    L'objectif essentiel est le plein-emploi, la reprise de la croissance, le recul de l'injustice sociale. Programme social-démocrate, en effet : François Mitterrand l'avait bien compris, après sa conversation de l'autre jour en tête à tête avec lui. Il est évident que Giscard aujourd'hui se sent très à l'aise, après la victoire de mars et malgré les opérations en terre étrangère dont, au demeurant, il est fier.
    Il termine avec brio sur sa volonté de « faire entrer la France dans le troisième millénaire ».
    Franchement, je ne l'ai jamais entendu aussi bon. La victoire lui a donné des ailes.

    20 juin
    Pierre Hunt, devenu un des hommes du Président – après avoir été un des hommes de Chaban-Delmas à Matignon –, me parle de la volonté européenne de Giscard,

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