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Cahiers secrets de la Ve République: 1977-1986

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1977-1986 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
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angolais, ou du moins le rencontrer et négocier sur la poursuite de la construction du chemin de fer et l'extradition des gendarmes katangais.
    Même chose, selon lui, au Tchad : la France a aidé à la réconciliation nationale. Reste la Mauritanie, « problème que nous traînerons pendant des années ».
    Voilà qu'il passe maintenant au budget sur lequel il est assez drôle, car il n'épargne pas le ministre des Finances qui lui a succédé 49 . Giscard ne cache pas ses critiques : « Il a été mal présenté, mais, nous dit-il drôlement, quand on ne fait pas les choses soi-même, on ne peut pas se plaindre qu'elles soient mal faites. » On sent presque qu'il a souffert de ne pas l'avoir fait lui-même !
    Il ajoute son analyse – déconcertante, parce qu'il l'émet comme s'il était étranger aux propositions de sa propre majorité – concernant l'institution d'un impôt sur le capital : « Je n'y crois pas, dit-il. Regardez l'impôt sur les plus-values 50 . Il a été vidé de toute substance après que des tas de gens en ont accepté le principe. L'impôt sur le capital, ce serait la même chose ! »
    Sur ce sujet, il est vraiment très drôle : « On commencerait par exonérer les résidences principales, dit-il, puis le patrimoine agricole, évidemment. Resteraient au hasard quelques catégories sociales non représentées et sans lobbying, dont la taxation du capital ne rapporterait rien ! »
    Un mot sur l'opposition, surtout sur le Parti communiste : le PC est pour lui l'incarnation politique du retard de nos structures. « Il disparaîtra, assure-t-il, quand la France aura rattrapé ses retards. »
    Le seul moment où il s'irrite, ou plus exactement où il bronche : lorsque Olivier Chevrillon lui pose une question sur ses ressemblances avec Michel Rocard. Manifestement, Giscard n'aime pas qu'on le compare à qui que ce soit.

    13 septembre
    Conversation avec Gilles Martinet. Je le connais depuis très longtemps, et pourtant sa mécanique intellectuelle me fascine toujours : voilà un journaliste, devenu un des hommes politiques les plus brillants, les plus intelligents de la gauche, qui n'est jamais parvenu à devenir un leader ni de parti (il a perdu le PSU il y a près de dix ans), ni de mouvement, ni même de tendance. Je me demande souvent pourquoi. Sans doute est-il trop critique avec sa propre action, moins acteur qu'observateur du monde dans lequel il vit.
    Il n'aime pas Mitterrand, qui ne fait pas partie de son univers. Il s'est donc rapproché de Michel Rocard qu'il ne se gêne pas pour assaisonner de quelques bons mots. Aujourd'hui, parmi les responsables de l'échec du PS, il cite Rocard lui-même auquel il reproche – tout en continuant de le soutenir – de ne pas avoir suivi ses dossiers au moment de la réactualisation de l'année dernière.
    Il en voit un second : Jacques Attali, qui joue au « petit génie » de François Mitterrand. Celui-ci a toujours été convaincu qu'il n'existe pas de problème économique qu'une volonté politique ne puisse pas résoudre. Attali, lui, savait que ce n'était pas possible. Il s'est tu au lieu de parler.
    Gilles Martinet me raconte longuement la conversation qu'il a eue avec Mitterrand un jour du printemps 1977, sur le boulevard Saint-Germain :
    « Nous ne pouvons pas ne pas trancher les problèmes importants, lui disait Martinet, comme les nationalisations, la force de frappe !
    – Ne me demandez pas, lui aurait répondu Mitterrand, de raisonner aujourd'hui en homme d'État. Car si je ne raisonnais pas aujourd'hui en homme politique, je n'aurais aucune chance de raisonner un jour en homme d'État ! »

    25 septembre
    Journées parlementaires de l'UDF dans le beau site de Châteauvallon, au-dessus de la mer, près de Toulon. L'atmosphère extérieure est, disons, fraîche : les ouvriers des chantiers navals de La Ciotat, plutôt des durs, sont venus, dès l'ouverture des journées, manifester leur hostilité à la majorité. Jean Lecanuet, aujourd'hui président de l'UDF, est le premier à en faire les frais : sur la route qui l'amène à Châteauvallon, sa voiture se trouve un moment encerclée par la foule ; pare-brise et carrosserie défoncés à coups de pied, elle finit piteusement sa course. Le président de l'UDF, conduit par un chauffeur aux mains ensanglantées, fait une entrée remarquée.
    Raymond Barre, lui, arrive en hélicoptère. Pour ces premières réunions des élus du parti dernier-né de

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