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Cahiers secrets de la Ve République: 1986-1997

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1986-1997 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
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nature humaine, qu’il n’y a pas eu, qu’il n’y a jamais eu, entre le tonitruant ministre de l’Intérieur et le gentil, si gentil ministre de la Justice, Pierre Méhaignerie, la moindre divergence de vues à propos de l’affaire Schuller-Maréchal. Il n’empêche : on ne prête qu’aux riches ! Et Charles Pasqua aujourd’hui ne remplit plus, auprès d’Édouard Balladur, les fonctions auxquelles son ralliement semblait le destiner. Car enfin, Pasqua était, dans le dispositif présidentiel du candidat Édouard Balladur, un des atouts maîtres de celui-ci. Leader aimé et reconnu du mouvement gaulliste, il s’était fait le chantre de l’unité des Français et du RPR. Et, on le sait, avait rencontré un véritable écho auprès des militants, qui ne voulaient à aucun prix d’un affrontement fratricide entre les deux « fils » de Georges Pompidou.
    Inlassablement, pendant des mois, le ministre de l’Intérieur a estimé possible d’organiser une vaste consultation de la base du RPR, des « primaires » à l’américaine. Qui dira d’ailleurs s’il n’a pas pensé un instant remporter lui-même, à cette occasion, la victoire dans le cœur des militants ? En tout cas, Pasqua avait laissé croire à tous les cadres et tous les militants du parti gaulliste qu’un choix tragique pouvait leur être évité. L’échec des primaires ruina cette stratégie. Dès lors, il avait choisi d’accrocher son destin à celui d’Édouard Balladur, dans le souci de lui apporter à la fois, sur sa gauche, la caution populaire du gaullisme, et sa propre caution sécuritaire à droite.
    Pour se tailler un costume de Premier ministre à défaut de celui de Président auquel ses collaborateurs aspiraient pour lui – ils me l’ont souvent dit –, Pasqua avait fait, depuis 1993, un parcours sans faute. À l’Intérieur, il s’était entouré d’une équipe pluraliste et ouverte, avec des hommes venus de la gauche mitterrandiste, comme Jean-Claude Barreau, premier prêtre défroqué et marié ; de collaborateurs venus de chez Philippe Séguin, comme Henri Guaino, ou encore de milieux centristes, comme Pierre Bordry. Sans oublier son fidèle William Abitbol, venu, lui, des milieux de la droite plus dure.
    Pasqua avait élargi son domaine en ne s’occupant pas seulementde police et de sécurité, mais aussi d’aménagement du territoire, projet auquel Balladur avait rogné un peu les ailes mais qui, malgré cela, avait nourri son ambition et sa croyance en une France républicaine, « décentralisée dans la centralisation », comme aurait dit Edgar Faure. Président du conseil général des Hauts-de-Seine qu’il ne voulait abandonner pour rien au monde, même pas, comme on le lui demanda souvent, pour la mairie de Nice-la-Belle, il a su faire de son département un laboratoire.
    Bref, il était, en cas de victoire à la présidentielle, un des premiers-ministrables de Balladur, idéal surtout pour liquider les chiraquiens ou ce qu’il en resterait au sein de l’état-major du RPR. Il aurait été capable de faire du réformisme musclé, capable de fédérer, malgré les hurlements certains de la gauche, Français de droite et réformateurs sociaux. Il n’aurait pas ouvert à la gauche, non, mais il aurait misé sur le soutien populaire.
    Seulement voilà : l’affaire Maréchal-Schuller est intervenue à point nommé pour bousculer ce beau plan de carrière. Même si la bonne foi et surtout le bon sens doivent créditer sa défense, il semble bien que Charles Pasqua, pour les jours qui viennent, soit plus un poids, pour le candidat Balladur, qu’un moteur auxiliaire.
    17 février
    Grand-messe de Jacques Chirac à la porte de Versailles tandis que, le matin même, Valéry Giscard d’Estaing venait de lui donner un coup de pouce. Dans une lettre ouverte à Édouard Balladur, Giscard a en effet écrit, vachard : « Je n’ai pas vu dans ce que vous avez présenté (le 13 février) d’actes forts de gouvernement. »
    Le meeting de la porte de Versailles tombe d’autant mieux pour Chirac que Balladur, lâché par une partie des soutiens qu’il attendait à l’UDF, n’est plus, pour la première fois, le roi des sondages. Il perd 7 points dans le sondage IFOP / L’Express de cette semaine et la Sofres enregistre de son côté, avec TF1 et RTL, une baisse de 3 % de celui qui menait jusque-là la course en tête. Certes, il devance encore Chirac, mais l’écart se resserre entre les

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