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Cahiers secrets de la Ve République: 1986-1997

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1986-1997 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
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ont suffi pour leur mettre le moral à zéro.
    Le premier est celui du dérapage des dépenses sociales. On s’attendait à 15 milliards, le « trou » atteint 45 milliards – trois fois plus ! Les dérives continuent et s’accentuent. On ne peut certes en accuser le plan d’Alain Juppé sur la Sécurité sociale, puisqu’il n’a pas encore été appliqué. N’empêche, c’est un rude coup pour ceux qui viennent de commencer à payer le 5 % de cotisation supplémentaire.
    Deuxième chiffre, deuxième choc : l’enquête annuelle de l’INSEE indique que le nombre de chômeurs s’est accru de 165 000 entre mars 1995 et mars 1996 ; 12,6 % de la population française est au chômage, sans parler des suppressions d’emplois annoncées un peu partout. Alain Juppé, au supplice, a écouté sans les interrompre (« pour une fois », me dit un des présents) ceux des députés qui se demandaient, iconoclastes ou séguinistes, si les choix du gouvernement étaient les bons, et si même – l’expression a été employée – il n’y aurait pas d’autre politique.
    Raymond Barre, que je rencontre dans la salle des Quatre-Colonnes, estime qu’on ne pourra pas indéfiniment faire porter sur les citoyens actifs le surplus de charges engendré par la montée du chômage. Michel Péricard lui-même 25 me parle de « la nécessité de donner à la politique de l’emploi un peu plus de contenu ». Il me suffit de regarder son visage pour mesurer son inquiétude. C’est que tous prennent conscience, en cette fin de session parlementaire, que l’échec est peut-être devant eux.
    Conséquence de ces mauvais chiffres : hier, Jacques Barrot a annoncé aux syndicats que la hausse du SMIC se limiterait cette année à sa stricte revalorisation légale, qui est de 0,34 %. En juillet 1995, le gouvernement Juppé avait augmenté le SMIC de 4 %, ce qui n’avait pas eu les effets escomptés sur la consommation.
    On a l’impression que, face au chômage, le gouvernement – et le Président – ne sait plus à quel saint se vouer 26 .
    28 juin
    J’ai été hier matin le témoin, ou plus exactement l’instigatrice, sans le vouloir, d’un léger couac gouvernemental. Au micro de RTL, Jean-Pierre Raffarin, ministre du Commerce et de l’Artisanat, défendait le petit commerce face aux grandes surfaces, ce qui est strictement son boulot. Dans les domaines comme la distribution ou l’hôpital, a-t-il insisté, il faut revenir à la dimension humaine. Pourquoi a-t-il dit : l’hôpital ? La contradiction avec Jacques Barrot, ministre du même gouvernement, est évidente : celui-ci ne cesse de tenter de démontrer, sans y parvenir, qu’il faut fermer les petits hôpitaux, qui coûtent cher et dispensent des soins moins efficaces que les grands.
    Ce n’était pas là un gros « couac » – un petit, tout simplement. Significatif des difficultés que rencontre un gouvernement quand il veut à la fois soutenir les petits commerçants et rationaliser les structures publiques.
    En revanche, un qui ne change pas d’idée, quitte à marteler ses arguments d’un média à l’autre, c’est Nicolas Sarkozy : il vient ce matin, houspillant Juppé, de répéter aux auditeurs qu’il fallait une baisse des impôts, tout de suite, sans attendre !
    1 er  juillet
    Et, pour tout arranger, re-voilà les « affaires » ! Il ne manquait plus que cela. Au départ, l’histoire de l’appartement loué par la Ville de Paris au fils du maire, Dominique Tiberi, remis à neuf à cette occasion. Pas de quoi monter au plafond lorsqu’on compare ce que cela a dû coûter aux innombrables « trous » dus à une gestion approximative en d’autres secteurs.
    Mais l’affaire est allée bien plus loin : que le juge Halphen ait été empêché de pénétrer au domicile des Tiberi par l’officier de police qui l’accompagnait, que l’ordre de contrecarrer l’action du juge ait été donné par le directeur de la Police judiciaire, Olivier Foll, que l’on s’interroge sur l’identité du supérieur hiérarchique qui a donné cet ordre, ministre ou directeur de cabinet – on est stupéfait en l’occurrence par la maladresse, l’amateurisme des responsables gouvernementaux.
    Quant aux magistrats, ils se sont hâtés de classer l’affaire. L’ont-ils fait de leur propre chef, sans intervention du ministère de la Justice ? Peu probable !
    Le calvaire de Juppé continue.
    8 juillet
    Ministre du Travail

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