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Cahiers secrets de la Ve République: 1986-1997

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1986-1997 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
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vrai qu’elle ne casse pas trois pattes à un canard...
    J’entraîne mon interlocuteur sur le terrain politique, ce qui n’est pas pour lui déplaire. Il me confirme que François Léotard et Alain Juppé avaient bien conclu, l’hiver dernier, un accord sur le remaniement. C’est Jacques Chirac qui, depuis le Japon où il était en voyage officiel, en a interdit la réalisation après une explication relativement désagréable avec Alain Juppé. D’où les positions contradictoires qu’a sans arrêt adoptées, depuis plusieurs mois, le président de l’UDF. À l’été et à l’automne, il a collé à Alain Juppé. À l’hiver, il a été retoqué par Jacques Chirac (avec l’aide de Dominique de Villepin). « Enfin, continue Bayrou, il a pris ses distances en sortant à la télévision cettephrase sur les “trois boutons” selon laquelle Chirac, pour sortir de la situation actuelle, avait le choix entre un référendum, une dissolution et un changement de Premier ministre. Depuis, me dit-il, pas mécontent de cet état de choses, il vasouille... »
    À propos du débat sur l’immigration, il me confirme que c’est Jacques Chirac qui a voulu l’inscrire à l’ordre du jour. « Moi, me dit-il, j’ai dit dès le mois de juillet 1996 que je n’en voyais pas la nécessité. Que tout débat profiterait aux agitateurs. Je n’ai pas été entendu. »
    Cette phrase jette un éclairage particulier sur l’affichage de ce débat sur l’immigration. J’ai décrit Juppé comme traînant les pieds. Si Bayrou dit vrai, et si Chirac a vraiment voulu que majorité et opposition se déchirent sur le projet de loi Debré, c’est parce qu’il voit l’utilisation électorale qui peut en être faite par sa majorité : d’un côté, contre les socialistes, dénoncés comme irresponsables, prêts à accepter une immigration massive ; de l’autre contre l’extrême droite lepéniste, hostile à ce que le moindre étranger mette le pied sur le territoire français.
    25 février
    La deuxième lecture du texte sur l’immigration à l’Assemblée nationale, qui a lieu aujourd’hui, a été précédée dans Le Monde d’aujourd’hui (daté du mercredi 26) par une grande mise au point d’Alain Juppé, visiblement touché par le procès fait au gouvernement sur sa conception des valeurs républicaines. Comment ne sommes-nous pas du même côté ? demande-il presque douloureusement à la gauche. Il explique avec clarté que la politique de l’autruche face à l’immigration est intenable : « Les socialistes, écrit-il, le savent bien, que le gouvernement est aux antipodes de la conviction de l’extrême droite selon laquelle c’est de l’étranger que nous vient tout le mal. Ne tombons pas, adjure-t-il une dernière fois, dans l’amalgame entre immigration légale et immigration clandestine ! » Il assure qu’il y a une politique républicaine de l’immigration, la sienne, basée sur plusieurs certitudes : oui à l’accueil des étrangers, oui au droit d’asile et à l’immigration régulière ; oui encore à l’aide au développement ; non à l’immigration illégale.
     
    À 16 h 15, cette après-midi, dans l’hémicycle, Jean-Louis Debré est seul à son banc. Les ministres ne se sont pas précipités pour l’assister. Dans son discours, il oppose une France repliée sur elle-même à une France ouverte à tous, acceptant sans réserve toutes les immigrations. « Aucun pouvoir ne gagne à céder par faiblesse ou par lâcheté, dit-il avec la voix et l’intonation de son père. Nous sommes prêts, dit-il encore pour résumer son propos, à accueillir en France les étrangers qui aspirent à partager notre destin. »
    16 h 45 : Debré a terminé, Pierre Mazeaud prend la parole au nom de la commission des lois : « Trop, c’est trop ! explose-t-il. Entre le délire xénophobe de quelques-uns et les appels à la désobéissance de pétitionnaires irresponsables, il est temps de dire : ça suffit ! » Il convient qu’en première lecture, ses « collègues de la majorité », comme il les appelle, ont eu des initiatives exagérées. Et profite de cet aveu pour, se tournant vers les socialistes, dire que leur « entrée en fanfare dans le débat rappelle celle des carabiniers ». Il présente un ensemble d’amendements au texte Debré sur les centres d’hébergement, la régularisation des étrangers qui vivent en France depuis plus de quinze ans, il redit que les

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