Ce jour-là

extérieur hors des murs d’enceinte. Après les douzaines de répétitions dans la maquette de la résidence, j’étais habitué à me faire fouetter le visage par le vent des hélicoptères, en particulier quand l’équipe descendait à la corde sur un toit.
    Mais au lieu de se mettre en vol stationnaire au-dessus de la maison, le Black Hawk disparaît de l’autre côté du mur. Les pilotes ont dû nous voir nous écraser, et ils ont sûrement préféré larguer Chalk Two à l’extérieur.
    « Ne prenez pas le risque de mettre vos hélicoptères en danger, arrangez-vous simplement pour que les types puissent descendre, avait répété l’amiral McRaven pendant l’un des derniers briefings. Peu importe où, le plus important c’est qu’ils soient au sol. De là, ils sauront quoi faire. »
    Je suppose que Chalk Two n’a pas voulu prendre le risque d’une descente à la corde sur le bâtiment, après ce qui s’était passé pour nous. Le pilote a fait ce qu’il fallait.
    J’entends les premiers appels radio. Pour Chalk Two , le plan B prévoit que si l’équipe ne peut pas descendre à la corde sur le toit elle doit rejoindre le portail nord du périmètre.



Will et moi courons jusqu’à la porte d’entrée du C1, la maison annexe. Le seul bruit qui nous trahit est le crissement de nos bottes sur le gravier.
    Nous savons que Ahmed al-Kuwaiti, le messager de Ben Laden en qui il a le plus confiance, habite cette maison avec sa famille. Nous pensons y trouver au moins une femme et des enfants. La présence des enfants exclut la possibilité que le bâtiment soit piégé.
    Exactement comme dans la maquette et sur les photos, il y a une porte à deux battants, avec un vitrage sur les parties hautes. À droite de la porte, on trouve une fenêtre protégée par des barreaux. Aucune lumière ne filtre. Des draps cachent toutes les ouvertures, on ne voit rien à l’intérieur.
    Will prend position à gauche de la porte pendant que j’essaie la poignée en forme de L. Je l’abaisse deux fois, mais la porte est verrouillée.
    Will recule, tire la masse qu’il a dans son kit et en déplie le manche. Je le couvre.
    Il porte un coup puissant sur la serrure. La masse frappe le bouton de porte mais c’est insuffisant. Le loquet pend, il y a une grosse entaille, mais la porte tient bon. On recommence deux fois mais les portes sont en métal plein. On se rend compte qu’on n’y arrivera pas avec la masse.
    Will essaie de casser une vitre pour repousser le rideau et voir à l’intérieur. Il glisse la tête de la masse entre les barreaux, mais ils sont trop serrés et empêchent son bras de reculer pour frapper.
    Je murmure à Will « Explosif » en attrapant la charge de mon kit.
    Nous savons tous que le facteur temps est vital, d’autant que l’élément de surprise a disparu dès l’instant où notre hélicoptère s’est crashé. Will met sa masse de côté et couvre la porte avec son fusil.
    De l’autre côté du périmètre, on entend une explosion. C’est Chalk Two qui fait sauter le portail nord. J’entends à la radio : « Échec de la tentative. On va au portail Delta du périmètre. » Après avoir fait sauter le portail, ils sont tombés sur un mur de brique. L’équipe aurait dû être en train de donner l’assaut au deuxième étage à ce moment-là, et ils en sont encore à essayer d’entrer.
    «  Roger . Bien reçu. Je vous retrouve là-bas et j’ouvre de l’intérieur », répond Mike.
    Le portail Delta est à l’extrémité nord de l’allée qui sépare la zone du crash de l’hélicoptère du reste du périmètre. Mike se trouve à l’extrémité sud de l’allée, à côté de la maison annexe.
    L’opération s’accélère. On a dû atterrir il y a cinq minutes, et vingt-quatre hommes assiègent déjà les lieux. Il y a eu deux explosions en plus du crash du Black Hawk , ce qui nous prive définitivement de l’élément de surprise. Les occupants de la résidence sont en train d’organiser leur défense, c’est sûr.
    Agenouillé à droite de la porte, j’enlève l’adhésif de protection autour de la charge et la fixe au reste de poignée. Je m’agenouille toujours dans ces cas-là, car plusieurs fois en Irak, on m’a tiré dessus à travers la porte. Les ennemis ont tendance à arroser le milieu de la porte à l’aveugle, là où ils pensent que l’intrus se tient.
    Le troisième membre de mon équipe arrive. Il est l’un des derniers à être sorti du