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C'était de Gaulle, tome 3

C'était de Gaulle, tome 3

Titel: C'était de Gaulle, tome 3 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Peyrefitte
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    Étonnante continuité de De Gaulle, me fait-il observer. Trois ans plus tôt, le 4 septembre 1963, il avait écrit en marge d'une note sur la visite du Premier ministre du Canada : « Nous pouvons développer nos rapports avec le Canada tel qu'il est encore. Mais nous devons avant tout établir une coopération particulière avec le Canada français et ne pas la laisser noyer dans l'ensemble des deux Canadas. »
    Mais en trois ans, le Québec est devenu à Paris une pomme de discorde dans le petit monde diplomatique. Le Quai d'Orsay, en corps, ne cache pas son hostilité à la prédilection gaullienne pour le Québec. En revanche, un « lobby québécois » réunit quelques prosélytes du Québec : René de Saint-Légier, conseiller diplomatique, et Gilbert Pérol, chargé de la presse, à l'Élysée ; Jean-Daniel Jurgensen, directeur d'Amérique, et Martial de La Fournière, au Quai d'Orsay ; le député Xavier Deniau ; Philippe Rossillon, secrétaire général du Haut Conseil de la langue française, et mon conseiller diplomatique Bernard Dorin.

    « Un État fondé sur notre défaite d'autrefois »
    Saint-Légier me raconte en riant que Leduc, notre nouvel ambassadeur à Ottawa, a transmis, sur le ton de l'approbation, l'invitation du gouvernement d'Ottawa à célébrer le « centenaire du Canada ». Ottawa s'est en effet servi de ce centenaire pour obtenir que l'Exposition universelle de 1967 se tienne à Montréal. Leduc a suggéré au Général d'adresser des voeux au gouvernement canadien pour l'année de ce centenaire.
    Le Général a rugi : « Le centenaire du Canada, c'est comme si on voulait fêter en 1989 le bicentenaire de la France ! Le Canada a été fondé il y a plus de quatre cent vingt ans, quand Jacques Cartier en a pris possession au nom de François I er . Après notre défaite en 1759, il y a eu un siècle d'asservissement et, depuis 1867, une subordination institutionnelle. Nous n'allons pas commémorer cette malheureuse date de notre histoire ! » Il a apposé sur le télégrammel'apostille : « Il n'est pas question que j'adresse un message au Canada pour célébrer son " centenaire ". » Suit cette notule : « Nous n'avons à féliciter ni les Canadiens, ni nous-mêmes, de la création d'un État fondé sur notre défaite d'autrefois et sur l'intégration d'une partie du peuple français dans un ensemble britannique. Au demeurant, cet ensemble est devenu bien précaire. »

    « Si j'y vais, ce sera pour faire de l'Histoire »
    Février 1967.
    Saint-Légier me prévient que le Général est décidé à se rendre au Québec sur le Colbert, frère du De Grasse ; à remonter le Saint-Laurent ; à débarquer à Québec sur les traces de Jacques Cartier, avant de se rendre à Ottawa. Secret absolu, tant que les élections ne sont pas passées, car la seule annonce de la manière dont le Général compte organiser son itinéraire peut provoquer un clash avec Ottawa.

    Dans la Caravelle au retour de Cherbourg, 29 mars 1967.
    Après le lancement du sous-marin Redoutable, Messmer et moi nous asseyons dans la Caravelle aux côtés du Général. Avant que les moteurs ne se mettent en marche, Messmer l'interroge : « Alors, mon général, vous vous rendrez au Québec ?
    GdG. — J'ai reçu trois invitations : l'une du maire de Montréal, Drapeau ; l'autre du gouverneur général, Vanier ; la troisième, du Premier ministre québécois, Johnson. Je n'aurais sûrement pas accepté les deux premières. Mais il est probable que j'accepterai la troisième. Dans ce cas-là, je n'irai pas au Québec pour faire du tourisme. Si j'y vais, ce sera pour faire de l'Histoire. »
    Dire qu'il se répète tant en petit comité, et que ses propos publics vont stupéfier.

    « Il ne faut que des drapeaux du Québec ! Il en faut partout ! »
    Visite de Johnson, 18 mai 1967.
    Daniel Johnson, Premier ministre du Québec, fait une visite officielle à Paris pour préparer celle du Général au Québec. Une guerre des drapeaux éclate entre l'ambassade du Canada, qui exige qu'à l'accueil d'Orly il n'y ait que le drapeau fédéral à feuille d'érable, et la délégation générale du Québec, qui ne veut que les fleurs de lys de l'étendard québécois. Couve de Murville tranche : « Il n'y aura pas de drapeaux du tout ! » Le Général, alerté par le « lobby québécois », casse la décision de son ministre des Affaires étrangères : « Il ne faut que des drapeaux du Québec ! Il en faut partout ! » Ce qui est

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