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C'était de Gaulle, tome 3

C'était de Gaulle, tome 3

Titel: C'était de Gaulle, tome 3 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Peyrefitte
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intéressent, au moins indirectement.
    « Le résultat n'est pas du tout conforme à ce qui était attendu. Le gouvernement fédéral aura contre lui la majorité des Anglais. Il gouverne avec la presque totalité des Français et une minorité d'Anglais. Ça ne facilitera pas la solution du problème du Québec.
    GdG. — Vous dites que ça ne facilitera pas la solution du problème du Québec ? Oui, dans l'immédiat. Mais ça posera le problème du Québec d'une façon plus vigoureuse. Le Québec ira tôt ou tard à l'indépendance. »
    Couve ne répond pas, mais il me glisse à la sortie : « Le Général cherche l'éclat. Il se trompe. »
    Ce mot est terrible. N'est-il pas injuste ? Les éclats du Général et la courtoisie flegmatique de Couve ne s'excluent pas. C'est leur alliage qui est efficace. Je suis quand même un peu effaré : « Que voulez-vous dire ?
    Couve. — La passion du Général pour le Québec ne peut conduire à rien de bon. Notre devoir est de le retenir sur cette pente. »
    Pompidou se joint à nous. Il a dû entendre la dernière phrase de Couve et laisse tomber avec son éternel sourire, sa cigarette au coin de la bouche :
    « L'engouement du Général pour le Québec est une sorte de folie gratuite. »
    C'est le thème de la fidélité infidèle : pour bien servir le Général, il faut savoir s'opposer à lui...

    « Ottawa fait tout pour mettre des bâtons dans les roues de la "Révolution tranquille " »
    Je suis le Général dans son bureau. Les propos subversifs de son Premier ministre et de son ministre des Affaires étrangères m'ont-ils poussé à le provoquer ?
    AP : « Le Québec est responsable de sa propre éducation, de sa propre culture, du type de société qu'il veut choisir au sein de la Fédération canadienne. N'est-ce pas en somme ce que vous aviez voulu promouvoir au sein de la Communauté franco-africaine, le self-government ?
    GdG. — Quand nous avons créé la Communauté, je n'ai rien fait pour interdire à nos territoires d'outre-mer de devenir indépendants. Ils avaient pour ça deux moyens. Soit en refusant d'y entrer ; soit après y avoir séjourné quelque temps, histoire de ménager les transitions. La situation au Canada est bien différente. Ottawa, tout en faisant semblant hypocritement de favoriser la "Révolution tranquille" des Québécois, fait tout pour leur mettre des bâtons dans les roues.
    AP. — Le Quai d'Orsay considère qu'il nous faut jouer le Canada et non une province. Les communautés francophones, d'un océan à l'autre, sont avides de culture française, se pressent à l'Alliance française, se suspendent à nos consulats...
    GdG. — Ce sont bien des idées du Quai ! Dites-vous qu'un Québec fort et maître de ses décisions est le seul moyen de permettre la survie des Canadiens français, non seulement au Québec, mais hors du Québec. Si jamais les Français se font bouffer au Québec, ils se feront bouffer beaucoup plus vite encore là où ils sont éparpillés. Croyez-moi, il faut être maître chez soi pour survivre ! Au Québec, les Canadiens français peuvent être maîtres chez eux. »
    Il garde un instant le silence, puis reprend :
    « Pensez donc, ils sont six millions, perdus au milieu d'un océan de deux cent cinquante millions d'Anglo-Saxons ! Comment voulez-vous qu'ils résistent, s'ils ne forment pas le carré et si nous ne faisons pas la jonction avec eux ? (Le vocabulaire militaire revient de lui-même, dans une situation de péril.)
    AP (dans un sourire). — La garde meurt et ne se rend pas.
    GdG (n'appréciant nullement l'allusion à Waterloo, il me cloue au sol). — C'est le contraire ! Le Canada français meurt s'il se rend. Il vivra s'il refuse de se rendre. »

    « La Belgique, ça n'a rien de commun ! »
    La tentation est forte de revenir sur la Belgique 1 .
    AP : « Mais si vous encouragez le Québec à s'émanciper, n'allez-vous pas en faire autant avec la Wallonie ?
    GdG. — Non, non ! La Belgique, ça n'a rien de commun ! Les Français du Québec sont trop isolés, trop menacés par la masse anglo-saxonne pour pouvoir continuer à vivre en Français s'ils n'obtiennent pas d'être souverains. Les Wallons sont à nos frontières, ils peuvent aisément maintenir leur langue et leur culture sans risquer d'être étouffés.
    « Et puis, si le Québec s'émancipe des Anglais, ce ne sera pas pour se placer sous la souveraineté française. Tandis que si la Wallonie se sépare du royaume, elle demandera aussitôt

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