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C'était de Gaulle, tome 3

C'était de Gaulle, tome 3

Titel: C'était de Gaulle, tome 3 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Peyrefitte
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Nous avons une mentalité de magasiniers (quand je dis "nous", je veux dire "les Armées" ; mais j'ai pour règle de ne jamais mettre en cause un collègue en son absence, ni devant le Président ni devant le Premier ministre). Mais la vraie dissuasion n'est-elle pas celle qui consiste à convaincre le monde entier que nous sommes capables de fabriquer les armes les plus puissantes et que nous les fabriquons ? En revanche, la dissuasion qui s'attache au fait d'entreposer quelques engins de plus ou de moins n' est-elle pas relativement faible, pour un prix très élevé et pour une grosse consommation de précieuses matières fissiles ? Il me semble que nous faisons trop de perfectionnisme en matière d'armes. Nous ne devrions pas chercher à remplacer une version par une autre tout juste un peu meilleure. Il suffirait de garder le secret sur le niveau de nos stocks. De même, pour les armes tactiques, pourquoi chercher à les stocker en grand nombre ? Ce n'est pas là qu'est la vraie dissuasion !
    GdG (il a écouté avec beaucoup d'attention et répond posément, point par point). — La différence entre les Chinois et nous, c'est que les Chinois ne sont pas capables de fabriquer industriellement des armes atomiques en série. Le niveau de leur industrie ne le permet pas. Kossyguine me l'a confirmé 1 . Ils en sont au stade du laboratoire. Ils ne peuvent faire que quelques essais.Nous autres, au contraire, nous avons la possibilité d'en fabriquer autant que nous voulons. Nous pouvons, donc nous devons en fabriquer.
    « Et puis les Chinois ne cherchent pas à changer de politique internationale. Ils n'ont pas besoin d'avoir sous la main une force de dissuasion immédiatement disponible dans le jeu planétaire. Ils peuvent continuer leur politique sans avoir à se désengager à l'égard de personne. Au contraire, nous avions depuis 1958 à nous désengager de l'OTAN et à rompre toutes sortes de fils à la patte. Il nous fallait donc une arme indiscutable, dont tout le monde connaisse bien l'authenticité. Nous ne pouvions pas nous en passer. C'est pourquoi j'ai beaucoup tenu, personnellement, à la bombe atomique accompagnant le Mirage IV.
    « En revanche, le SS BS 2 , je n'y tenais pas beaucoup. C'est Pompidou qui y tenait. Lui et son entourage, ils voulaient absolument que le relais de la bombe du Mirage soit assuré à partir du moment où le Mirage serait un peu dépassé, et en attendant que les sous-marins soient opérationnels. Mais il s'avère que nous n' aurons pas de retard, ni dans la fabrication des sous-marins, ni dans la fabrication des MS BS 3 . Par conséquent, cette génération des SS BS paraît un peu superfétatoire. Je ne verrais pas d'inconvénient, pour ma part, à ce qu'on la supprime ou en tout cas à ce qu'on la réduise, compte tenu de cet élément nouveau qu'est la réalisation satisfaisante de notre programme de sous-marins et de MS BS, ce qui est évidemment capital 4 .

    « Il y a toujours des marioles qui se vantent de savoir et veulent le montrer »
    « Quant à l'arme tactique, je n'y tiens pas plus que ça, je ne trouve pas qu'elle renforce la dissuasion, puisqu'elle suppose que la dissuasion n'a pas fonctionné. La force de dissuasion, la force stratégique n'est pas faite pour qu'on s'en serve, mais pour qu'on ne s'en serve pas. Mais l'arme tactique était nécessaire pour le moral de l'armée de terre. Il fallait bien donner quelque chose aux artilleurs. Ç'aurait pu être les SS BS du plateau d'Albion. Ça leur aurait suffi. Mais il n'y a plus assez de polytechniciens dans l'artillerie. Il y en a encore pas mal dans l'aviation. Alors, on a donné les SS B S à l'armée de l'air.
    « Quant au secret, ne vous faites pas d'illusion. On a beau prendre toutes les précautions, tout finit par se savoir. Il y a toujours un service d'espionnage qui infiltre un secteur sensible, il y a toujours des marioles qui se vantent de savoir et veulent le montrer, il y a toujours des inconscients qui bavardent sur l'oreiller, il y a toujours des faibles ou des malades qui cèdent à un chantage.
    AP. — Mais maintenant que nous aurons pris notre indépendance par rapport à l'OTAN et que notre politique se sera affirmée dans le monde, ne devrions-nous pas consacrer nos efforts à l'accélération de la mise au point de l'arme thermonucléaire, plutôt que d'utiliser des forces et des ressources précieuses à fabriquer en série un matériel dont on sait bien qu'on n'a pas l'intention de se

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