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C'était de Gaulle, tome 3

C'était de Gaulle, tome 3

Titel: C'était de Gaulle, tome 3 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Peyrefitte
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est sensible aux objections qu'on fait à son idée première. Mais quand il corrige le compte rendu qu'on lui présente le lendemain, il ne se sent pas absolument lié par la décision qu'il a prise sur le moment. C'est lui qui l'a prise, éclairé par les avis exprimés en Conseil ; il est en droit de la modifier, sans que cela change rien aux avis des uns et des autres.
    Mais dans ce cas particulier, l'explication est à compléter. Les Armées ont dû se livrer à une puissante contre-attaque, après ce Conseil de défense qui ne les satisfaisait pas. Le chef d'état-major particulier de l'Elysée épouse volontiers le point de vue de l'état-major des armées. Il peut chaque soir faire valoir ses arguments auprès du Général. Je ne dispose pas d'un avocat aussi bien placé. Dans l'esprit du Général, le souci du moral des armées l'a emporté, mais je suis sûr qu'il n'oubliera pas la nécessité de protéger nos ressources de plutonium.

    « Il est possible que ce soit à l'échelle de l'Europe et non de la France »
    Le même Conseil de défense du 10 novembre 1966 a dû aborder un autre sujet délicat : ce qu'il est convenu d'appeler le programme « Hydrogène- Oxygène » pour les futurs moteurs de fusée.
    Le Général me donne tout de suite la parole, que je passe au ministre des Armées, « seul responsable de ce programme ».
    GdG (irrité de ma défausse) : « Je connais la position du ministre des Armées. C'est votre sentiment sur l'intérêt scientifique du programme qui nous intéresse.
    AP. — Le programme me semble avoir deux aspects :
    « 1) L'aspect scientifique, qui concerne les études et recherches sur les basses températures — cryogénie, viabilité des composants électroniques dans le froid, etc. Ces études ont un intérêt qui déborde de beaucoup l'application balistique ; il faut, à mon avis, essayer de les sauver.
    « 2) L'aspect industriel : mettre au point un moteur propulsant le troisième étage d'une fusée lourde. Or, nous n'avons ni les moyens financiers, ni les moyens matériels de fabriquer, dans le délai nécessaire, les premier et deuxième étages, ni un satellite lourd que cette fusée serait capable de mettre en orbite géostationnaire. Je comprends donc le ministre des Armées qui estime ne pas avoir l'utilisation de ce moteur.
    « Cependant, il y a une possibilité d'utilisation européenne, qui nous permette d'assurer la survie de notre programme et d'une partie de nos équipes. Mais cet aboutissement n'est pas assuré et n'est probablement pas pour demain.
    Couve. — Il faudra deux ans de négociation avant de décider nos partenaires.
    Pompidou. — Je n'ai aucune confiance dans les Anglais ni dans les Allemands. Il faut être clair. Ou bien nous pouvons dégager les sommes nécessaires sur le plan national pour sauver ce programme, ou bien on le laisse tomber. »
    Après quelques échanges techniques, le Général se range à ma position. Il admet avec une netteté surprenante que l'Europe est le véritable horizon du programme Hydrogène-Oxygène : « Il faut voir si nous pouvons développer ce programme avec les Européens. Il est possible que ce soit à l'échelle de l'Europe, alors que ce ne serait pas à l'échelle de la France. Faisons donc ce que nous pouvons pour voir si nos partenaires acceptent de s'y associer. »

    « Nous pouvons, donc nous devons fabriquer des bombes A »
    Salon doré, lundi 5 décembre 1966.
    AP : « Les Chinois, contrairement à ce que dit la presse, semblent assez loin derrière nous au point de vue balistique, puisqu'ils sont pour le moment dans l'incapacité de mettre un satellite sur orbite. Ils ne paraissent pas nous devancer au point de vue nucléaire : pas de réactions thermonucléaires dans leur troisième explosion, celle de mai dernier ; très faible puissance de l'explosion d'octobre.
    « Cependant, leurs expériences produisent chaque fois un très grand effet psychologique et, par conséquent, beaucoup de dissuasion. Ils ont choisi, selon toute apparence, une politique de recherches et de prototypes, non une politique de fabrication.
    GdG. — Même si nous sommes rassurés sur la réalité des progrès chinois par rapport aux nôtres, est-ce qu'il n'y a pas lieu de s'inquiéter de la rapidité de leurs progrès, par rapport à la relative lenteur des nôtres ?
    AP. — C'est la question de fond. Il en découle une autre : ne devrions-nous pas remplacer une politique de stocks par une politique de recherche ?

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