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C'était De Gaulle - Tome I

C'était De Gaulle - Tome I

Titel: C'était De Gaulle - Tome I Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Peyrefitte
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nullement.

    Je lui,réponds que j'aimerais mieux rester modestement secrétaire d'État à l'Information. Me frôle alors l'idée que Pompidou pourrait m'assener une réponse analogue à celle que le Général avait faite à Baumgartner : «Vous n'êtes plus secrétaire d'État à l'Information.» Mais non, il est beaucoup plus patient qu'en avril dernier, quand il formait son gouvernement.
    AP : «Boulin a eu le mérite de créer cette structure nouvelle, mais son budget a été établi sur l'hypothèse d'un retour de 70 000 rapatriés pour 1962, alors qu'ils seront dix fois plus nombreux. Ça ne m'exalte pas, la perspective d'une morne bataille avec les Finances pour accueillir ces lamentables victimes d'un exode qu'on a refusé de prévoir. Et vous allez me chercher, comme pourme punir d'avoir décrit l'an dernier 1 cet exode tel qu'il se produit!
    Pompidou. — N'exagérons rien. Justement, vous serez bien accueilli par les pieds-noirs. En tout cas, je n'ai pas d'autre solution.
    AP. — Pourquoi ne nommeriez-vous pas Fouchet directement aux Rapatriés?
    Pompidou. — Vous voulez rire? Il leur a fait ses adieux de l'autre côté de la Méditerranée, il ne peut pas les accueillir de ce côté-ci!
    AP. — Alors, pourquoi pas ministre chargé des relations avec le Parlement? Dumas serait enchanté de devenir ministre des Rapatriés.
    Pompidou. — Vous ne connaissez pas encore le Général! Il a une grande affection pour Fouchet, auquel il pense pour sa succession. Et il ne tient pas le Parlement en grande estime. Si je lui faisais une proposition pareille, il serait furieux.»

    « Nous en reparlerons à mon retour d'Allemagne »
    J'admire l'habileté de Pompidou à jouer sur l'échiquier gouvernemental, et le respect filial avec lequel il épargne au Général tous ces tracas. En regard, il faut bien que je me reproche ma rigidité mentale: ce département ministériel que je repoussais en avril comme un cadeau empoisonné, voilà que je refuse de m'en séparer? C'est risible. Pompidou a eu la bonté de m'épargner les sarcasmes que je mérite.
    Mais je ne peux m'empêcher de m'en ouvrir au Général.
    Salon doré, à l'issue du Conseil du 3 septembre 1962. J'explique au Général que je me plais à cette mission de porte-parole, à mes relations avec les journalistes, et que je regretterais d'avoir à y renoncer. Les yeux s'agrandissent derrière les verres-loupes:
    « Vous vous plaisez avec les journalistes! (Il répète son exclamation d'un air ébahi. Puis il laisse passer quelques secondes.) Nous en reparlerons à mon retour d'Allemagne. Je verrai avec le Premier ministre s'il ne trouve pas une autre solution. Rien ne se passera d'ici là. »
    Par correction, je raconte à Pompidou ma requête, que j'ai jetée dans le Salon doré comme une bouteille à la mer. Il ne peut réprimer une impatience: «Et qu'est-ce qu'il a dit ? » Il est clair qu'il m'en voudrait terriblement, si sa combinaison s'écroulait. Ilveut régler l'affaire pendant l'absence du Général. Ai-je d'autre choix que de m'incliner?

    « Vous entrez dans leur jeu »
    Que de fois le Général m'a mis en garde contre mon intérêt pour la presse! Puisque je dois m'éloigner d'elle, c'est le moment de repenser à ce qu'il m'a dit d'elle. Je feuillette mes notes de ces dernières semaines.

    Après le Conseil du 16 mai 1962, où l'on a évoqué la tournée des popotes d'Argoud en Allemagne, le Général me met en garde: «Cette affaire n'a pas l'extension énorme que lui ont donnée les journaux. Une information judiciaire est en cours. La règle veut qu'on ne parle pas d'une affaire qui est à l'instruction. De toute façon, on en dit toujours trop. Je veux bien que vous laissiez filtrer prudemment quelques petites choses pour essayer d'appâter les journalistes, mais je doute que vous y arriviez. Il n'y a rien à faire avec des gens qui sont de parti pris et qui ne veulent pas remettre en cause leurs préjugés. En tout cas, pas un mot, même en privé, sur Argoud ni sur ce genre d'affaires! »

    Après le Conseil du 6 juin 1962, le Général: «Il me revient que vous vous entendez bien avec les journalistes. C'est mauvais signe.
    AP. — Il faut quand même tâcher de faire passer des idées — les vôtres. Ils en sont souvent si éloignés! Il faut bien obtenir d'eux un minimum de sympathie!
    GdG. — Vous dites ça, mais, en réalité, vous entrez dans leur jeu. Vous faites semblant de les comprendre. Et vous finissez par adhérer à ce

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