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C'était de Gaulle - Tome II

C'était de Gaulle - Tome II

Titel: C'était de Gaulle - Tome II Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Peyrefitte
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à notre nature, à notre histoire, d'être favorables à la paix des hommes et au rapprochement des chrétiens. Nous souhaitons que la politique qu'il a commencée soit poursuivie. C'est l'intérêt de la France.
    « Il est possible que cette politique doive être reprise en étant plus dirigée. On se fait facilement entortiller ; ça a été le cas de Jean XXIII, surtout à la fin du Concile. Il est souhaitable que le nouveau pape ne se laisse entortiller par personne. On voit ce que je veux dire. (Précisément : je ne le vois pas, et je doute que mes collègues le voient mieux que moi.)
    « En tout cas, le déclenchement qui s'est produit pendant le pontificat de Jean XXIII doit se poursuivre et se poursuivra. Nous n'y verrons pas d'objection, bien au contraire. Nous avons donc,à la veille du conclave, à prendre des positions discrètes, mais déterminées. »
    (Ainsi, le Général se comporte plus en responsable de « la fille aînée de l'Église » qu'en Président de la République laïque ; mais il agit ainsi parce que « c'est l'intérêt de la France ».)

    Après le Conseil, j'interroge le Général sur les énigmes ou les ellipses de son oraison funèbre. Je commence par l'accessoire :
    AP : « Savez-vous déjà comment sera composée notre délégation pour les funérailles ?
    GdG. — Ne le dites pas encore, il faut d'abord prévenir le Vatican. Couve, naturellement. Il est protestant, tant mieux : puisque Jean XXIII a voulu jouer l'œcuménisme, on lui en donnera. (Rire.) Mais on encadrera ce huguenot par de bons catholiques, Burin des Roziers, Wladimir d'Ormesson 1 et La Tournelle 2 .
    AP. — Que vouliez-vous dire, quand vous avez appelé Jean XXIII " un bonhomme " ?
    GdG. — Il avait l'air d'un brave curé de campagne. On se moquait de lui. Et il a fait plus, en quelques années, pour faire évoluer l'Église, qu'en quatre siècles tant de papes qui étaient des grands seigneurs. Peut-être, justement, par naïveté.
    A.P. — Vous trouvez que le Concile, jusqu'à maintenant, a été dans son ensemble positif ?

    « L'Église s'était crispée depuis quatre cents ans dans une attitude réactionnaire »
    GdG. — Vous savez, l'Église, devant le schisme des protestants (curieux qu'il emploie cette expression, généralement réservée aux orthodoxes, plutôt que celle d' hérésie, comme s'il ne voyait pas de différence doctrinale majeure entre protestants et catholiques), s'était crispée dans une attitude conservatrice et même, tranchons le mot, réactionnaire, qu'elle avait gardée en gros depuis quatre cents ans. Disons, pour simplifier, qu'elle avait refusé le monde moderne. Il fallait en finir avec cette attitude de rejet. L'esprit du temps l'exigeait. Jean XXIII a lancé cette grande affaire de l' aggiornamento. Ce n'était pas si simple. Il fallait beaucoup d'estomac, ou beaucoup d'innocence.
    AP. — Mais vous avez dit qu'il s'était laissé entortiller ?
    GdG. — Je crains qu' il soit allé trop vite. Il fallait donner un coup de neuf. Mais il a subi l'influence d'une coterie qui prétendait toutrévolutionner d'un seul coup. Il y a toujours des gens qui veulent aller si vite qu'ils détruisent tout. Pour construire, il faut mettre le temps de son côté. Je ne suis pas sûr que l'Église ait eu raison de supprimer les processions, les manifestations extérieures du culte, les chants en latin. On a toujours tort de donner l'apparence de se renier, d'avoir honte de soi-même. Comment voulez-vous que les autres croient en vous, si vous n'y croyez pas vous-même ?

    « Jean XXIII a ouvert toutes grandes les vannes et n'a pas pu les refermer »
    « Il n'a pas pris ses précautions pour que ça n' aille pas trop vite et trop loin. Il a ouvert toutes grandes les vannes. Il n'a pas pu les refermer. C'est comme si un barrage s'était rompu. Il est dépassé par ce qu'il a déclenché.
    AP. — Vous pensez que son successeur doit reprendre les choses en main ?
    GdG. — Il est souhaitable pour la France qu'on ne revienne pas sur le mouvement qu'il a lancé. Mais il faudrait qu'il domine le tumulte et ne se laisse pas emprisonner par une camarilla.
    AP. — Vous avez parlé de prendre des positions déterminées pour le prochain conclave. Que pouvons-nous faire, en pratique ?
    GdG. — À quoi croyez-vous que sert notre ambassade au Saint-Siège, si ce n'est pour exercer discrètement une influence auprès des cardinaux influents, en tout cas sur les Français ?
    AP. — Vous pensez qu'un

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