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C'était de Gaulle - Tome II

C'était de Gaulle - Tome II

Titel: C'était de Gaulle - Tome II Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Peyrefitte
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une famille allemande pour les vacances. C'était un petit village de Forêt-Noire, chez un vicaire. Le dimanche, on allait à Fribourg en diligence. On s'installait dans une brasserie vers midi et on n'en bougeait pas jusqu'à minuit. On buvait de la bière, on racontait des histoires, on mangeait, on digérait, on jouait. Les dames se promenaient sous les arbres. C'était le grand événement. Et puis, on rentrait en pleine nuit, toujours en diligence. Il y a de ça à peu près soixante ans. Alors, il m'en est bien resté quelque chose, mais, dans la conversation, cela me réclamerait un trop gros effort.
    Adenauer. — Et vous, Madame, vous en avez fait aussi ?
    Mme de Gaulle. — Oui, quand j'étais jeune fille. Nous avions des gouvernantes allemandes. Mais j'ai à peu près tout oublié. Il faudrait que je m'y remette ; seulement, je suis trop vieille et je n'ai pas assez de volonté. »
    Le sujet de la langue étant épuisé, il faut bien en trouver d'autres. La fille d'Adenauer demande à Mme de Gaulle : « Vous ne fumez pas ? Vous n'avez jamais fumé ?
    Mme de Gaulle. — Si, autrefois. (Pince-sans-rire.) Cela reviendra peut-être sur mes vieux jours ; mais alors, si je m'y remets, ça sera la pipe. »
    Éclats de rire. Nous ne parvenons pas à nous imaginer le spectacle. Mme Reiners reprend gravement : « Oh oui, ce serait bien int'ressant ! »

    Mme de Gaulle : « Au lieu d'aller au café »
    Nous avons depuis longtemps avalé la crème de laitue. Voici déjà les filets de sole cherbourgeoise. Il faudra tenir encore quandviendront les pintadeaux rôtis, en attendant les crêpes flambées. Les silences commençant à s'allonger, je finis par me jeter à l'eau, en interpellant Adenauer en allemand.
    AP : « Vous avez trois fois plus de téléviseurs en Allemagne, Monsieur le Chancelier fédéral, que nous en France. Que pensez-vous de l'influence de la télévision sur le public ?
    Adenauer. — Pas beaucoup de bien ! C'est mauvais pour l'esprit de famille. Les gens se mettent devant leur appareil et ne vivent plus que pour les images. Ils ne s'intéressent plus aux autres. Il n'y a que l'écran qui compte.
    Mme de Gaulle. — Mais on peut dire, en revanche, que les hommes reviennent plus vite le soir pour voir la télévision chez eux, au lieu d'aller au café (le Général aurait dit : au bistrot). Alors, même s'ils ne s'intéressent pas beaucoup à leur famille, au moins ils vivent dans leur famille, au lieu d'y échapper.
    Adenauer. — Ah oui, vraiment, vous croyez ? Mais pour les jeunes, cela ne me paraît pas bon. Ils ne pensent plus qu'à ça. Ça leur donne de mauvais exemples. »
    Mme Reiners suggère que nous avons moins de téléviseurs parce que notre redevance est plus chère. Le Général embraye aussitôt sur la question de la publicité à la télévision. Les Allemands l'ont, et il la leur envie.
    GdG : « Il serait logique que nous en fassions autant chez nous, au moment du lancement de la deuxième chaîne. Pourquoi tout le monde le ferait-il, et nous pas ? Pourquoi laisser à la presse le monopole de la publicité ?
    AP. — Il faudrait prendre des précautions pour que la publicité ne soit pas envahissante.
    GdG. — Tout ce que je demande, c'est qu'on ne dise pas : "De Gaulle se rase avec un rasoir Gillette. De Gaulle a le sourire Gibbs." »

    « Il veut être empereur ; en dessous, ça ne l'intéresse pas »
    Le riesling 1959 n'a pas encore fait son effet. La conversation se traîne. J'essaie de la relancer, le Général ne faisant aucun effort.
    AP : « Nous essayons, avec votre secrétaire d'État à l'Information, Günther von Hase, de mettre sur pied un " Intervilles " franco-allemand. Cela pourrait contribuer utilement au rapprochement des deux peuples. »
    Le Chancelier se fait expliquer en quoi consiste le jeu « Intervilles ». Le Général, fort satisfait de cette idée :
    GdG : « Oui, c'est un jeu très bien fait et qui intéresse beaucoup le public. Ça devrait avoir un grand succès ! On est pris. On prend parti. Ainsi l'autre jour, j'étais pour Dax contre Tarbes. Mais j'ai perdu.
    AP. — Pourquoi aviez-vous pris parti pour Dax, mon général ?
    GdG (très détendu). — Parce que le maire est gaulliste. C'estMax Moras (me précise-t-il, devinant mon ignorance, mais sans la dissiper). Malheureusement, nous avons perdu. »
    (Ce Max Moras doit être un « vieux-gaulliste », un ancien du RPF. Le Général n'est donc pas si impitoyable que certains le disent à l'égard

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