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C'était de Gaulle - Tome II

C'était de Gaulle - Tome II

Titel: C'était de Gaulle - Tome II Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Peyrefitte
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Américains. Dans le cas contraire, ceux-ci submergeraient l'Europe avec leurs excédents.
    Adenauer. — L'amitié franco-allemande est le résultat le plus important de toute mon activité pendant les quatorze années où j'ai dirigé la politique allemande. »
    1 Il démissionnera dans quelques jours, et sera remplacé le 16 octobre par Ludwig Erhard.
    2 Parti libéral allemand (Freie demokratische Partei, proche du patronat).
    3 Attendre et voir.
    4 Ministre des Affaires étrangères de RFA.

Chapitre 6
    «SOYONS ENSEMBLE L'EMBRYON D'UNE EUROPE INDÉPENDANTE »
    Rambouillet, 21 septembre 1963.
    On se retrouve au salon pour l'apéritif. Les invités sont arrivés 1 . Le Général exprime sa joie de recevoir le Chancelier pour « cette visite chargée de symboles. Plus encore : importante pour nos deux pays, puisqu'elle aura facilité, par la franchise de nos entretiens, après votre départ et après le mien, la poursuite de l'œuvre que nous avons entreprise. » Le Général associe au départ du Chancelier le sien propre : décision prise, ou simple courtoisie ?
    Le Chancelier marque de nouveau son émotion : « Vous savez, général, en perdant ses fonctions, on perd souvent ses amis. Ce proverbe s'est vérifié déjà par deux fois dans ma vie. D'abord, lors de la prise du pouvoir par le Parti national-socialiste. Plus tard, lors de ma destitution par les Anglais comme maire de Cologne. Plus je vais, plus je considère que l'amitié franco-allemande constitue l'œuvre capitale de mon passage à la Chancellerie. Et l'amitié personnelle que j'ai nouée avec vous, général, est une des rares joies qui aient accompagné mon activité politique. »
    Le Général, ayant sans doute peur de laisser le Chancelier trop longtemps debout, le fait asseoir et s'assied à son côté, l'interprète derrière eux. Les chaises se rapprochent. Un petit cercle se forme, muet. Le Chancelier poursuit : « Avant de me retirer complètement, j'aimerais encore renforcer cette œuvre commune. Après avoir quitté la Chancellerie, je continuerai à œuvrer activement en faveur de l'amitié franco-allemande. »

    « Plus le temps passera, plus notre accord trouvera d'applications »
    De part et d'autre, le ton reste un peu formel : c'est une conversation entre deux grands hommes qui se retrouvent dans l'au-delà, un entretien parmi les asphodèles des champs élyséens. Mais au bout d'un moment, les dames se lassent et, se laissant aller à leur vivacité, se mettent à bavarder entre elles. Du coup, les deux hommes d'Etat reprennent le ton de leurs entretiens en tête à tête. Le Chancelier poursuit :
    « Je voudrais que, dans le domaine militaire, les liens se raffermissent entre nous. Cependant, il ne faut pas oublier que les Américains sont notre seule protection réelle contre le danger soviétique.
    GdG. — La présence des Américains, pour longtemps encore, est une nécessité, et l'OTAN en est une autre. Mais cette organisation a été créée à une époque où ni l'Allemagne ni la France n'avaient repris leur réalité. Il importe maintenant que nous existions par nous-mêmes et soyons ensemble l'embryon d'une Europe capable de devenir vraiment européenne, c'est-à-dire indépendante. Plus le temps passera, plus notre accord trouvera de champs d'applications.
    Adenauer. — Ne serait-ce que les stages effectués en Allemagne par des troupes françaises et en France par des unités allemandes. L'accueil des troupes françaises par la population allemande a été très chaleureux.
    GdG. — Je ne pense pas que cet échange d'unités entre nos deux pays, qui a surtout une valeur symbolique, résolve le problème de la coopération entre nos deux armées. »
    Pour le Chancelier, la bouteille est à moitié pleine. Pour le Général, elle reste encore à moitié vide.
    Adenauer : « Avec le prestige que vous avez redonné à la France, général, vous seriez assuré de pouvoir créer avec succès un institut diplomatique international pour la formation des diplomates de tous les pays. Il y viendrait des étudiants de partout.
    GdG (peu enthousiaste). — Ouais.
    Adenauer. — Vraiment, général, si vous établissiez à Paris cet institut, il vous suffirait d'y faire une conférence tous les six mois (voyant que le Général n'embraye pas, le Chancelier abaisse ses prétentions) ...ou tous les ans. Cela aurait un immense rayonnement. Vous auriez là un grand moyen d'influence pour la France. »
    Le Général reste de marbre.

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