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C'était de Gaulle - Tome II

C'était de Gaulle - Tome II

Titel: C'était de Gaulle - Tome II Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Peyrefitte
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réduits à 24 000 hommes. C'est pas mal.
    « Ces troupes sont là-bas parce que nous avons passé des accords pour le maintien de l'ordre public. C'est infiniment normal pour des États tout nouveaux, qui sont vulnérables. Ils peuvent être d'un jour à l'autre la proie de n'importe quel coup de main. Avec quelques porteurs de mitraillettes, quelques étudiants communistes, quelques zigotos qui s'intitulent "syndicalistes ", le tout disant qu'ils sont le peuple, et avec mille crève-la-faim qui sont dans les rues, on peut toujours s'emparer du palais du Président. Alors, ces États naissants, il est tout naturel que la force française puisse intervenir à tout moment, à leur demande. »
    Il a sous les yeux une feuille de son écriture, où il a dû résumer un dossier qu'il se sera fait remettre, soit par Foccart, soit par le chef d'état-major particulier. « Au Cameroun, en 60 et 61. Au Congo, en 60, pour arrêter les massacres de Poto-Poto. En 60 encore, pour protéger des Congolais à Libreville et des Gabonais à Pointe-Noire. Au Tchad, en 63. Au Niger, où le capitaine N'Dialo, rebelle, s'est soumis. En Mauritanie, en 60 et 61.
    « Ça, c'est le maintien de l'ordre intérieur. Il y a naturellement aussi le maintien de la sécurité extérieure de la Mauritanie, vis-à-vis du Maroc. Si le roi s'est abstenu d'attaquer, c'est parce qu'il savait que nous ne le laisserions pas faire.
    « On a bien vu, dans les nouveaux États qui ne sont pas d'origine française, comment ça se passait. Pour toute l'Afrique orientale anglaise, il y a eu des mouvements de subversion qui ont amené les gouvernements du Kenya, du Tanganyka, de l'Ouganda, à demander le concours des forces britanniques. Et au Congo belge, il a fallu faire intervenir des forces extérieures, celles de l'ONU ou soi-disant telles, qui n'y sont guère arrivées. Au Burundi, les forces belges qui restaient encore sont intervenues à la demande de tout le monde, à cause des massacres qui se produisaient entre les Bahutus et les Batutsis 2 ; s'ils ne l'avaient pas fait, il y aurait eu des dizaines de milliers de morts. Alors, tout le monde a trouvé ça naturel.
    « Il ne s'agit pas d'intervenir dans les affaires intérieures de ces pays-là. Mais dans la mesure où le gouvernement légal nous le demande, nous évitons que des conjurations qui sont en réalité des escroqueries ne dégénèrent en guerres tribales — dans des pays où la démocratie n'est pas encore établie par la force de la tradition. L'expérience montre que mieux vaut, avant que les désordres s' enveniment, une intervention rapide, comme un coup de lancette pour faire crever un abcès. La démocratie, ils ne peuvent pas encore la connaître ; ils n'ont pas encore leur réalité d'État et ils ne l'auront pas de longtemps.

    « Dans nos colonies, il n'y a jamais eu d'État »
    AP. — C'est votre doctrine : aider ces États naissants, s'ils connaissent des troubles graves et nous demandent notre aide ? GdG. — C'est une obligation, pour faciliter l'installation de ces États. Il leur faut du temps et de l'aide pour arriver à s'établir. C'est vrai au point de vue financier et économique ; aussi, au point de vue de l'ordre public ; sans que cette aide implique de la part de la France le moindre choix de personnes. Dans les cas où nous ne sommes pas intervenus, pour Olympio et Youlou, c'est que nous n'y avons pas été invités.
    « Dans l'état de gestation où se trouvent ces États, c'était la seule solution. C'étaient des territoires où il n'y avait pas d'États et où il fallait en constituer. C'est facile à l'Égypte, qui avait un État depuis longtemps, de dire : "Je suis un État." Mais, dans nos colonies, il n'y en a jamais eu. Ce sont des situations impossibles, au point de vue ethnique, administratif, économique, et ainsi de suite ! Alors, forcément, il faut leur permettre de prendre figure. »
    Après un silence, il conclut : « Il y a quelques années encore, la France faisait tout dans ces pays. Elle ne peut pas tout cesser du jourau lendemain. Notre but est de permettre à ces États de se passer complètement de nous ; mais ça ne peut être que progressif. »
    Pourquoi me donne-t-il autant d'informations détaillées ? Pourquoi est-il beaucoup plus précis sur la doctrine qu'en Conseil des ministres ? Alors même qu'il ne fait aucune réserve sur l'emploi que je peux en faire devant la presse ? Peut-être le Général ne tient-il pas à s'engager

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