C'était de Gaulle - Tome II
comme General Motors ou IBM ?
« Les Américains exportent partout leur inflation, et à notre détriment. Ils veulent absolument investir à l'étranger, et ça ne leur coûte à peu près rien. Nous les payons pour qu'ils nous achètent !
Pompidou. — Le traité de Rome nous interdit de faire aucune discrimination entre les entreprises installées dans le Marché commun. Or, compte tenu des investissements étrangers très importants en Hollande, en Belgique, en Italie, nous ne savons comment faire pour empêcher ces entreprises d'essaimer ensuite chez nous.
« Est-il de l'intérêt français de laisser Ford s'installer en Italie, ou plutôt en France de manière à faire travailler des Français ? De toute façon, les investissements se feront et nous n'y pourrons rien. »
Pompidou, voici moins de trois ans, enchérissait sur la diatribe du Général contre l'invasion des capitaux américains 3 . Il est devenu beaucoup plus nuancé.
Quand le Général ne voit encore dans l'investissement étranger en France qu'une défaite de la France, son Premier ministre y voit une source d'activité. Le premier reste méfiant. Le second, sur ce point, me semble avoir des vues plus sereines et sans doute plus justes.
1 Jean-Maxime Lévêque, inspecteur des finances, conseiller technique à l'Élysée.
2 Ministre de l'Industrie.
3 Cf. p. 16.
Chapitre 13
« LE DOLLAR DÉCROCHERA UN JOUR OU L'AUTRE DE L'OR»
Salon doré, 18 septembre 1963.
GdG : « Les Américains vont beaucoup s'intéresser à la prochaine réunion du Fonds monétaire. Le système monétaire mondial ne fonctionne pas correctement. Il oblige la France et l'Allemagne à garder des dollars aux États-Unis, qui sont source d'inflation.
AP. — Alors, vous allez dénoncer ce système ?
GdG. — Pas tout de suite. Nous ne ferons pas encore cette fois de propositions révolutionnaires. Pompidou, Giscard et Couve m'ont conjuré de ne pas bousculer le pot de fleurs. Je reconnais que ce n'est pas immédiatement nécessaire de dire leur fait aux Américains. Mais ils ne perdront rien pour attendre. »
Le lendemain matin, je tamise cette confidence pour Pompidou : « Le Général m'a laissé entendre qu'il remettrait à plus tard... ». Le Premier ministre éclate de rire :
« Le Général voudrait dénoncer le système monétaire international, mais j'essaie de l'en dissuader. Ce n'est pas le moment ! »
Pour Pompidou, on ne prend jamais assez de précautions, ce n'est jamais le moment. Pour le Général, son Premier ministre en prend trop, et cette inopportunité sans cesse invoquée ne lui paraît qu'un prétexte pour se dérober devant l'obstacle.
« Il faut rendre à l'or son rôle de support essentiel »
Conseil du 16 septembre 1964.
Un an plus tard, Giscard rend compte d'une nouvelle réunion du Fonds monétaire international à Tokyo. Cette fois, par sa bouche, la France a sinon bousculé, du moins déplacé le « pot de fleurs ».
GdG : « Nous avons lu la communication que vous avez faite à Tokyo ; elle correspondait bien à ce que nous pensions devoir être dit. Ce système monétaire ne peut pas durer. Il est américain. Il n'est pas mauvais parce qu'il est américain, mais parce qu'il est déséquilibré. »
(En Conseil, le Général ménage ceux de ses ministres qui pourraient s'offusquer de son « antiméricanisme ». Il ne tient pas à renouveler l'incident de la démission des ministres MRP 1 .)
Après le Conseil, j'essaie d'aller plus loin : « Allez-vous prendre une initiative ?
GdG. — Giscard a dit tout haut à Tokyo ce que beaucoup pensent tout bas, à savoir que tout ne va pas pour le mieux dans le système actuel des règlements monétaires internationaux. Ce système, établi au gré des circonstances du moment, permet aux pays dits "à monnaie de réserve", c'est-à-dire les États-Unis et la Grande-Bretagne, de solder les déficits chroniques de leur balance des paiements. Il est en grande partie responsable du déséquilibre des règlements internationaux, ainsi que des tendances inflationnistes qui se manifestent actuellement un peu partout dans le monde.
« Il faut donc rendre pleinement à l'or son rôle de support essentiel du système mondial des paiements. Seul l'or, parce qu'il est inaltérable et qu'il inspire confiance, échappe aux fluctuations des soi-disant "étalons de change or" 2 et à l'égoïsme des politiques nationales.
AP. — Vous prônez un changement radical du système actuel ?
GdG. — Non,
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