C'était de Gaulle - Tome II
- Bourgès Maunoury pressait les Israéliens de s'associer à l'opération. Ils s'y refusaient. La seule raison qui pourrait les décider, c'est que la France s'engageât à associer les savants israéliens aux recherches sur la bombe A, que Pierre Mendès France, en décembre 1954, avait décidé de pousser. Guy Mollet, au bout de quelques jours, accepta cette condition. Israël non seulement entra en guerre dans les jours où les Franco-Britanniques arrêtaient leur attaque et se retiraient sans gloire. La coopération franco-israélienne pour les applications militaires de l'atome se poursuivit jusqu'à ce que le Général l'ait apprise. Il l'arrêta aussitôt, comme il avait dénoncé, dès le début de juin 1958, l'accord Chaban-Delmas-Strauss pour une fabrication franco-allemande de la bombe atomique.
3 La première fois, c'était le 8 mai 1962 (cf. tome I, p. 290). L'expression fut rendue célèbre beaucoup plus tard par le général Ailleret, dans un article de la Revue de Défense nationale de décembre 1967.
4 Elle remonte à l'été 1962, quand la France s'apprêtait à reprendre ses relations diplomatiques avec la Tunisie, interrompues après l'agression tunisienne contre Bizerte, en juillet 1961. L'armée tunisienne avait alors sommé l'amiral commandant à Bizerte d'évacuer la place. Sur son refus, elle avait attaqué. Elle avait été repoussée avec de lourdes pertes.
5 Dans C'était de Gaulle, tome I, p. 414.
Chapitre 6
« QUE LA FRANCE SE LANCE DANS LE PACIFIQUE, ÇA A QUELQUE CHOSE D'INCROYABLE »
Au Conseil du 22 janvier 1964, Messmer rend compte d'une semaine passée à inspecter les travaux du Centre d'essais du Pacifique. « C' est une entreprise immense ; surtout sur un atoll désert, à 1 200 km de Tahiti et à 20 000 de Paris. On doit construire tout ce qu'il faut pour la vie des hommes, casernements, nourriture, usine pour dessaler l'eau de mer ; à Tahiti même, les logements pour les familles, car faire venir femmes et enfants est la meilleure manière de prouver qu'il n'y a aucun danger. À Mururoa, 500 hommes balisent, draguent, bâtissent des quais, construisent un terrain d'aviation, ainsi qu'à Hao, autre atoll, base logistique et aérienne pour les gros avions. À Fangataufa, second champ de tir, atoll sans passe, il faut en creuser une. Le personnel est jeune, enthousiaste, travaille sans mesurer sa peine douze heures par jour et six jours par semaine. Sur les 500 hommes, il y a eu un seul volontaire pour aller prendre du repos à Tahiti.
GdG. — Il faut quand même qu'ils y aillent !
Messmer. —Aux escales de Sydney et de Los Angeles, des journalistes avaient envahi le terrain d'aviation. J' ai préféré me borner à une conférence de presse à Tahiti. C'est la rentrée politique de la France dans le Pacifique. »
« Que la population polynésienne trouve son avantage dans l'arrivée des militaires »
Palewski intervient : les questions atomiques, c'est lui ! « Les scientifiques du CEA préparent les installations nucléaires. Ils ont acquis au Sahara une grande expérience. Ils résolvent les problèmes avec élégance. Ils respectent les délais. Ils coordonnent parfaitement des mouvements simultanés et complexes. »
Le Général tire les conclusions :
« 1. Le démarrage paraît satisfaisant. 2. Pour emmancher le présent avec l'avenir, il faut un gouverneur à Tahiti. Celui que nous avons est au bout de son rouleau. Nommons quelqu'un qui joue sa carrière là-dessus. 3. Il ne faudrait pas, après cette activité intense, qu'il y ait un reflux, que les commerces tombent, que les bâtiments soient désaffectés. 4. Il faut un grand port à Papeete, sans que les crédits soient dépassés.
(Puis le ton s'élève à mesure que l'horizon s'élargit.)
« Quand j'y étais passé, en 56, j'avais senti qu'il y a un monde du Pacifique. Que dans ce monde-là, la France se lance dans une grande entreprise, ça a quelque chose d'incroyable. Les Anglo-Saxons tiennent Hong-Kong, Singapour, Formose, l'Australie, la Nouvelle-Zélande, les Hawaï, l'Alaska, la Colombie britannique, la Californie, bref, tout le Pacifique. Quand nous ne bougions pas, on ne disait rien. Mais que nous apparaissions, ça semble scandaleux. »
Triboulet plaide pour le profil bas : « L'arrivée de la France dans le Pacifique est un pavé dans la mare. Il y aurait lieu d'éviter les conférences de presse » (une pierre dans le jardin de Messmer).
Le Général : « Le fait qu'on réalise ce
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