C'était de Gaulle - Tome II
propose Foyer « s'étend à tout, sauf aux assassinats, comme celui du commissaire Gavoury 1 , et sauf à l'organisation d'entreprises subversives — barricades, putsch, OAS.
« La date limite des faits amnistiables est celle du 20 mars 1962, les accords d'Évian. (Une discussion s'engage sur la date. Frey relayé par Foyer, propose celle du 1 er ou du 3 juillet, date de l'indépendance, ce qui couvre nombre des actions de l'OAS.)
Pompidou. — Je suis favorable. Nous voulons distinguer la subversion — tentatives contre l'État, contre son chef, contre le régime — et la guerre d'Algérie. C'est un fait que la guerre n'a véritablement pris fin qu'à partir du 1 er juillet.
GdG. — Qu'en pensez-vous, Monsieur Fouchet ? (Il ne s'adresse pas au ministre de l'Éducation nationale, mais à l'ancien Haut Commissaire en Algérie.)
Fouchet. — Je ne souscris pas entièrement à ce que dit le Premier ministre. La guerre était finie le 20 mars. Il n'y avait que des séquelles. Les villes étaient devenues folles. »
Joxe appuie Fouchet. Tous deux ont vécu au plus près les semaines convulsives entre Évian et l'indépendance. Ils ne pardonnent pas à l'OAS, qui a ruiné la belle construction d'Évian. Le Général arbitre avec plus de générosité, mais surtout de logique :
GdG : « Ce que Capitant 2 a mis en lumière très justement, c'est la distinction entre les faits de guerre survenus entre Français et musulmans en Algérie, d'une part ; et d'autre part, l'activité de ceux qui visaient, à la faveur des circonstances, à renverser la République, et qui ont bien failli la mettre dans leur poche.
«Indiscutablement, à part quelques agitateurs, les rapatriés d'Algérie ont une attitude fort convenable, une attitude nationale. Je suis favorable au 3 juillet. Les gens qui ont aidé le FLN, l'aspirant Maillot, le réseau Jeanson, etc. étaient en lutte contre l'État. Il ne faut pas les confondre avec les pieds-noirs. L'attitude des pieds-noirs est compréhensible et même excusable. »
Foyer entre dans des détails. Frey demande à être cosignataire.
GdG (agacé) : « Hâtez-vous ! »
(Tant que la décision n'est pas prise, le Général consulte, hésite. La décision prise, il veut une exécution immédiate.)
« La guerre d'Algérie a été une guerre civile entre les Français d'Algérie et les musulmans »
Après le Conseil.
AP : « Il y a encore trois détenus, dont Jeanson, pour complicité avec le FLN. Ils ne sont pas touchés par l'amnistie?
GdG.—Non.
AP. — Mais vous les gracierez ?
GdG. — C'est mon affaire. (J'ai posé une question de trop.) Leur cas n'est pas touché par la loi. Ils ont porté atteinte à la sûreté de l'État.
« Il y a eu deux sortes de délits. Les délits commis à l'occasion de ces affrontements réciproques ; là-dessus, les grâces ont déjà passé, et l'amnistie va passer. Et puis, à l'occasion de ces batailles , certains ont voulu porter atteinte à la sûreté ou à l' autorité de l'État. Alors ça, ça n'est pas encore amnistié et à l'heure qu'il est, ça ne doit pas l'être.
AP. — L'essentiel, c'est la distinction entre les pieds-noirs, et les autres ?
GdG (après m'avoir rabroué, il devient plus complaisant). — Oui, c'est ça l'essentiel. En Algérie, voyez-vous, il y avait une guerre civile entre les Français et les Arabes. Les Français avaient pour eux l'armée, et longtemps l'État français, pour se maintenir ; ils dominaient les Arabes. Les Arabes se révoltaient contre les Français d'Algérie, non contre la France. »
Une « guerre civile » : comme il l'entend, ce fut une guerre civile algérienne. Ceux qui sont impardonnables, ce sont ceux qui ont voulu en faire une guerre civile française.
LES INSTITUTIONS
1 Abattu à Alger, le 1 er juin 1961.
2 René Capitant, président de la Commission des lois, a demandé que l'amnistie ne s'étende pas aux crimes et délits commis en métropole.
Chapitre 11
« CETTE CONSTITUTION EST BONNE, IL FAUT LA GARDER »
Après le Conseil du 30 avril 1963, je dis au Général qu'on parle beaucoup d'un changement de Constitution, de l'adoption d'un régime carrément présidentiel, ou de transformer le septennat en « quinquennat ».
GdG : « Ça prouve que les gens n'ont toujours pas compris l'esprit de cette Constitution.
« Si nous passons au régime présidentiel, l'Assemblée perdrait son dernier pouvoir, celui de censurer le gouvernement ou de l'en menacer, et le Président
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