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C'était le XXe siècle T.2

C'était le XXe siècle T.2

Titel: C'était le XXe siècle T.2 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Decaux
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mobilisation militaire, mais une mobilisation totale de toutes les ressources de la nation  (68)  ».
    Le 23 juin, sous la présidence de Goering, le Conseil de la Défense du Reich a été convoqué. Le Reichsmarschall l’a informé que le Führer venait de décider d’incorporer sept millions d’hommes. Pour faire face à une guerre, on a jeté les bases d’un effort industriel colossal. Il a été décidé que les militaires prisonniers ainsi que les détenus des prisons et des camps de concentration seraient mis au travail dès que l’on se battrait. Himmler a précisé que l’on ferait « davantage appel aux camps de concentration ». Goering a également informé le Conseil que des « centaines de milliers de travailleurs originaires du Protectorat de Tchécoslovaquie seraient employés sous surveillance en Allemagne, particulièrement dans l’agriculture, et logés dans des baraquements ».
    Sous les ors, les lustres et les marbres de la grande salle officielle, autour de la longue table classique, les têtes attentives se penchent pour écouter le Reichsmarschall. Il semble qu’il annonce seulement les modalités de prochaines grandes manœuvres. Un seul de ces militaires a-t-il pu imaginer que le verdict qui tombait des lèvres méprisantes de l’obèse Goering signifiait la mort de millions d’hommes ? Un seul, oui, peut-être – et c’est Goering. Il ne veut être que l’interprète de la volonté de Hitler. En secret, il espère encore que l’on pourra éviter le recours aux armes.
    On s’est séparé sur des sourires et de chaleureuses poignées de main. Pendant tout le mois de juillet, le Conseil de la Défense nationale s’est réuni plusieurs fois. À vrai dire, les problèmes ne manquent pas. Si la majeure partie de l’armée allemande doit foncer sur la Pologne, il faut nécessairement envisager la possibilité d’une attaque française à l’ouest. Il n’est nullement certain que le « bluff » sans précédent qui, lors de l’invasion de l’Autriche et de la Tchécoslovaquie, a si bien réussi à Hitler, remporte le même succès. Le Conseil doit donc prendre « toutes dispositions pour que, le 25 août au plus tard, le Westwall (la ligne Siegfried) se trouve dans les meilleures conditions de préparation et doté du matériel qu’au prix d’un effort extrême on aura pu rassembler à cette date ».
     
    Depuis le 5 août 1939, les missions militaires anglaise et française chargées de discuter, à Moscou, d’une alliance entre la Russie soviétique, l’Angleterre et la France, naviguent en mer du Nord et en Baltique sur un cargo mixte pour gagner Leningrad. De là, rejoignant par chemin de fer Moscou, elles n’y parviennent que le 11. Ce voyage de six jours – alors qu’une journée d’avion aurait suffi – s’est révélé définitivement fatal à la paix. Adolf Hitler en a profité pour jeter les bases du plus incroyable retournement de l’Histoire : le pacte germano-soviétique.
     
    Inexorablement, le monde glisse vers la guerre. Étrangement, seul parmi les dirigeants allemands, Hermann Goering poursuit d’ultimes efforts pour éviter le cataclysme. Un petit groupe d’opposants cherche en vain à s’assurer des appuis au Grand Quartier Général. Le général Thomas, chef des Services économiques et de l’Armement de l’OKW (Oberkommando der Wehrmacht ), présente au général Keitel, son chef, un mémorandum affirmant qu’une guerre rapide et une paix rapide ne sont qu’illusion : « Une action contre la Pologne déclencherait une guerre mondiale à laquelle l’Allemagne, qui manque des matières premières et des ressources alimentaires indispensables, serait incapable de faire face. » Keitel, qui n’admet d’autre évangile que la pensée de Hitler, se récrie : « La Grande-Bretagne est trop décadente, la France trop dégénérée et l’Amérique trop indifférente pour se battre pour la Pologne. »
    Le 17 août, le général Franz Halder, chef de l’état-major général allemand, note dans son journal : «  Canaris contresigné Section I (Opération). Himmler, Heydrich, Obersalzberg : 150 uniformes polonais avec accessoires, Haute Silésie . » Pour comprendre ces lignes, il faudrait un nouveau Champollion. Seul le général Halder en connaît le sens. Il s’agit des préparatifs d’une opération destinée, au cas où l’Allemagne attaquerait la Pologne, à rejeter la responsabilité de cette attaque sur les

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