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C'était le XXe siècle T.2

C'était le XXe siècle T.2

Titel: C'était le XXe siècle T.2 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Decaux
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ceux qu’il a lui-même sélectionnés ? Naujocks n’en est pas certain. Les choix opérés par Heydrich le sont souvent en dépit du bon sens.
    Avant le grand départ, Naujocks se rend dans le bureau de son chef. Solennellement il prononce le serment de garder le silence sur l’ Opération Himmler  : à toutes les personnes mises dans le secret du projet – une trentaine –, on a demandé le même serment.
    Heydrich serre la main de Naujocks. Une poignée de main « froide et molle », dira Naujocks à Gunter Peiss.
     
    Le 23 août, le roi des Belges, parlant au nom des chefs d’État des puissances du groupe d’Oslo (Belgique, Pays-Bas, Luxembourg, Finlande et les trois États scandinaves), exprime par radio le souhait ardent « que les hommes dont dépend le cours des événements acceptent de soumettre leurs différends et leurs revendications à une négociation ouverte ».
    Le 24 août, le pape Pie XII lance sur les ondes un appel en faveur de la paix. Le même jour, le président Roosevelt adresse un message à Hitler et au président de la République polonaise, les suppliant de régler leurs conflits sans recourir aux armes. Le 28 août, le roi des Belges et la reine des Pays-Bas offrent leur médiation « dans l’espoir d’éviter la guerre ». Le 31 août, dans l’après-midi, le pape fait tenir des notes aux gouvernements d’Allemagne, de Pologne, d’Italie et des deux puissances occidentales, « suppliant au nom de Dieu… les gouvernements allemand et polonais… d’éviter tout incident », et conjurant les gouvernements anglais, français et italien d’appuyer son appel : « Le pape, ajoute-t-il, répugne à abandonner l’espoir que les négociations en cours puissent mener à une solution juste et pacifique. »
    Le journaliste américain William L. Shirer, qui a passé ces jours historiques à Berlin, commente avec amertume : « Aussi nobles d’expression et d’intention que fussent ces appels de la part des neutres, ils ont quelque chose d’irréel et de pathétique lorsque nous les lisons aujourd’hui. Ils donnent l’impression que le président des États-Unis, le pape et les chefs d’État des petites démocraties du nord de l’Europe vivaient sur une autre planète, et qu’ils ne comprenaient pas mieux ce qui se passait que si les événement s’étaient déroulés dans Mars. »
    Le 27 août, le gouvernement allemand a annoncé que « le rationnement des produits alimentaires, du savon, des chaussures, des textiles et du charbon entrerait en vigueur dès le lendemain ». Le week-end du dimanche 28 a été chaud, étouffant. La guerre ? Les Berlinois semblent ne pas vouloir y penser : ils se rendent en foule sur les bords des lacs et dans les bois qui entourent la capitale.
     
    Sept hommes, des civils, viennent de descendre de deux Ford noires V8. Portant une valise, chacun pénètre dans le hall de l’ Oberchlesischer Hof , le meilleur hôtel de Gleiwitz : une belle bâtisse blanche toute neuve. Sur les fiches qu’on leur tend, ils inscrivent tous qu’ils sont ingénieurs des Mines. À l’hôtelier venu les accueillir, ils expliquent qu’ils sont à Gleiwitz pour procéder à des recherches géologiques. De fait, pendant tout leur séjour à Gleiwitz, les « ingénieurs » recueilleront des roches et des échantillons de terre. Toutes leurs fouilles s’opéreront autour de la maison de la radio.
     
    « À Gleiwitz, dira encore Naujocks à Nuremberg, je demeurai quatorze jours en attente… Entre le 25 et le 31 août, j’allai voir Heinrich Muller, le chef de la Gestapo, qui se trouvait dans les environs à Oppeln. »
     
    À Heydrich, Naujocks a posé une seule question :
    — Et les cadavres ?
    — On s’en occupe, a répondu Heydrich plus sèchement que jamais. Un seul suffira, et il vous sera fourni sur les lieux au moment voulu par Muller.
    Muller. Des années après la guerre, Naujocks le dépeindra comme l’« un des personnages les plus horribles qu’il eût jamais connu ». L’historien de la Gestapo, Jacques Delarue, le décrit comme « une brute administrative telle qu’il en existe un peu partout. Fonctionnaire jusqu’au fond de l’âme, il ne vivait que pour ses “paperasses”, ses statistiques, ses rapports. Il ne se mouvait à l’aise que dans un monde de notes, d’organigrammes et de règlements. Son souci majeur, l’avancement. Que l’arrière-plan de sa vie fût composé de délations sordides, de

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