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C’était le XXe siècle T.3. La guerre absolue

C’était le XXe siècle T.3. La guerre absolue

Titel: C’était le XXe siècle T.3. La guerre absolue Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Decaux
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J’explique donc à Hardy ce qui va se passer le lendemain et lui confirme de venir avec moi afin qu’il appuie la position que je prendrai  (97) . »
    Alors qu’un nouveau débat s’instituait, en 1985, autour de Hardy et de Barbie, Henri Noguères, avec une bonne foi qu’il faut saluer, a publié un passage de la déclaration d’Aubry qui avait été coupé et que signalaient d’ailleurs les points de suspension entre crochets. Le voici : «  Hardy m’avait raconté son évasion entre-temps en me signalant qu’il avait perdu toutes ses affaires. Je lui ai dit de me faire savoir ce dont il avait besoin pour y parer . »
    Aubry cherche maintenant, avec Raymond Aubrac et André Lassagne, le lieu où l’on pourra se réunir autour de Jean Moulin. Lassagne pense alors à l’un de ses amis, le docteur Dugoujon. Consulté, le médecin donne un accord sans réserve. C’est donc à Caluire que l’on se rendra. À Caluire où ira René Hardy qui, selon la définition de Daniel Cordier, est dangereux .
     
    Le lundi 21 juin au matin, Aubry a soumis à Moulin le nom des participants à la réunion qui se tiendra l’après-midi du même jour. En définitive se retrouveront autour de Moulin : André Lassagne ; Henri Aubry ; le colonel Lacaze à qui Delestraint avait proposé les fonctions de chef du IV e bureau de l’état-major ; Bruno Larat, jeune volontaire de la France libre dès juin 1940 et parachuté en France pour participer aux tâches, de la délégation générale ; Raymond Aubrac ; le colonel Schwartzfeld, un Alsacien que Delestraint avait désigné comme son successeur éventuel.
    Moulin a approuvé tous ces noms. Aubry a omis de lui dire que Hardy l’accompagnerait l’après-midi .
     
    Ici entre en scène un nouveau personnage : une jeune femme, Edmée Deletraz.
    Elle aussi appartient à la Résistance. Elle est jeune, blonde, jolie. Habitant Annemasse, elle a fait passer en Suisse des parachutistes anglais et des Juifs. En décembre 1942, elle est devenue l’agent de liaison du réseau « Gilbert » fondé par le colonel Georges Groussard et a, de ce fait, effectué dès lors de nombreuses missions à Genève.
    En avril 1943, le réseau enregistre l’adhésion d’un nouveau volontaire. Il s’appelle Robert Moog . Sa redoutable efficacité ne tarde pas à être vérifiée. À Lyon, une blanchisserie sert de rendez-vous aux membres du réseau, Moog y tend une souricière. Edmée Deletraz est arrêtée.
    Conduite à l’hôtel Terminus, où Klaus Barbie a installé ses bureaux, elle se réclame d’un alibi : si elle se rend régulièrement à Genève, c’est pour y retrouver sa sœur gravement malade d’un cancer. Pour en être convaincus, les services de Barbie exigent une analyse médicale. Expertise positive. Par ailleurs, on n’a pu mettre la main sur aucun document compromettant, pas plus sur la jeune femme qu’à son domicile. On lui annonce donc qu’elle va être relâchée. À une condition cependant : chaque semaine, elle devra se présenter au siège de la Gestapo. Comme Barbie l’a dit de Hardy, on tient désormais la jeune femme « par un fil ».
    Libre, elle rend compte à ses chefs de réseau : doit-elle se réfugier en Suisse ? Réponse : il n’en est pas question. Qu’elle soit au contraire ponctuelle aux rendez-vous fixés. Qu’elle inscrive dans sa mémoire ce qu’elle verra ou entendra. Elle obéit.
    Le lundi 21 juin 1943, vers 9 heures du matin, on sonne à sa porte. Un homme de la Gestapo est là.
     
    — Venez. On a besoin de vous pour un petit moment.
    Conformément aux ordres de ses chefs, elle suit le policier et monte dans une Citroën noire. Elle a, ce jour-là, revêtu une blouse rouge. Ses cheveux blonds éclatent dans le soleil. On la dépose devant l’entrée de l’hôtel Terminus. Son « ange gardien » la fait entrer dans un bureau. Au bout d’un court instant, survient un homme en qui elle reconnaît celui qui a arrêté l’un de ses chefs – et ami – le colonel André Devigny. C’est Robert Moog. Toujours lui.
    — Nous allons vous présenter un Français qui a compris, lui dit-il.
    Elle s’est souvenue :
    « Robert Moog m’emmène dans une autre pièce. Cinq hommes en civil sont assis sur trois côtés d’une table rectangulaire. On me prie de prendre place sur une chaise, du quatrième côté. En face de moi, est installé Klaus Barbie, flanqué de ses collaborateurs habituels, Fritz Hollert et Paul Heimann.

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