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C’était le XXe siècle T.3. La guerre absolue

C’était le XXe siècle T.3. La guerre absolue

Titel: C’était le XXe siècle T.3. La guerre absolue Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Decaux
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Robert Moog prend place à ma droite. À ma gauche, siège un homme qu’on me désigne comme étant “Didot” À ce moment, j’ignore totalement que c’est le pseudonyme de René Hardy, chef du “Sabotage-Fer”en zone nord, récemment détaché auprès de l’état-major de l’Armée secrète.
    « Robert Moog me dit : “Il y a des chefs de la Résistance qui vont tenir une réunion très importante. Le délégué du général de Gaulle sera présent. M. Didot est convoqué. Il a rendez-vous à 14 heures au départ du funiculaire de la Croix-Rousse. Mais il ne connaît pas le lieu de la réunion. Vous vous y rendrez à la même heure. Vous le suivrez et vous reviendrez nous dire où il est entré.”
    « En mon for intérieur je pensais que ce Français s’apprêtait à jouer un tour aux Allemands. Mais voilà qu’il pose cette question : “Si le rendez-vous a lieu dans un immeuble, cette femme ne pourra pas dire à quel étage et dans quel appartement je suis rentré.”
    « Long moment de silence. C’est “Didot” qui le rompt, en disant à Barbie et consorts : “Donnez-moi un paquet de cigarettes. Je le viderai et je laisserai tomber l’emballage sur le paillasson.”
    « Les Allemands éclatent de rire. L’un d’eux lance à “Didot” un paquet de cigarettes. Ils donnaient tous l’impression de préparer une bonne blague. »
    Dès lors, une seule pensée va obséder Edmée Deletraz : « Ces gens que l’on veut arrêter sont des résistants, je veux les sauver. »
    Stupéfaite que ces gestapistes n’aient pas eu l’idée qu’elle puisse prévenir la Résistance, c’est librement qu’elle quitte l’hôtel Terminus. Précisément, elle a rendez-vous à midi avec l’un des chefs de son réseau, le professeur Jean Cambus. Elle vole au lieu convenu. Cambus n’y est pas ! À son intention elle griffonne ce message :
    «  Une réunion très importante des chefs de la Résistance doit se tenir en début d’après-midi. Elle a été dénoncée par un certain Didot qui y participera. Prévenez tout de suite . »
    On l’a avertie que, dans un cas grave et urgent, elle pourrait aller trouver, à la Croix-Rouge française, le colonel de La Brosse : il appartient à l’Armée secrète. Elle y court. Le colonel la reçoit, elle lui raconte tout : Que d’incrédulité dans les yeux de son interlocuteur ! Elle crie :
    — Il faut donner l’alerte immédiatement !
    — Rassurez-vous. Nous allons faire le nécessaire.
    Edmée Deletraz court alors prévenir Mme Richard qui assure la liaison avec le service de renseignements de l’Armée et promet d’alerter sur-le-champ son chef direct.
    Avant midi, Edmée Deletraz est sûre d’avoir pris de vitesse Klaus Barbie. Rassurée, disciplinée, elle regagne le siège de la Gestapo. On le lui a reproché et parfois en des termes injurieux. Au procès Hardy, Maurice Garçon l’a présentée comme un agent allemand confirmé, une véritable espionne. On doit savoir que, tout au long de sa vie, Edmée Deletraz s’est demandé si, en l’occurrence, elle avait bien agi. Angoisse qui devrait au moins susciter de l’estime.
    Comme prévu et à l’heure dite, les Allemands la conduisent au départ du funiculaire de la Croix-Rousse, la « ficelle », comme disent les Lyonnais. De loin, au milieu de ceux qui attendent, elle reconnaît ce Didot qui lui est apparu, le matin, comme étant cul et chemise avec Barbie et qui – elle le sait – attend un autre résistant. L’un des deux hommes qui l’escortent s’approche d’elle :
    — Vous allez les suivre et vous reviendrez nous faire votre rapport.
    Plus rien ne pourra arrêter la machine infernale.
     
    Neuf personnes connaissent le lieu de la réunion, quatre n’ignorent rien de son objet et des noms de ceux qui y assisteront. Treize personnes en tout. Nul n’a songé à faire assurer, par l’un des corps francs toujours prêts à se mobiliser, la surveillance de la maison et la protection des participants. Pire encore : la demeure du docteur Dugoujon ne possède qu’une seule entrée. Aucune possibilité de repli.
    Chez Dugoujon, à 13 h 30, c’est à vélo que Lassagne arrive le premier. Il veut vérifier que tout se passera bien. Rassuré, il enfourche de nouveau sa bicyclette et, comme prévu, s’en va, dans un bar, rejoindre Aubry qui ne connaît pas le chemin.
    Le second est le colonel Lacaze. À la domestique qui lui ouvre, il murmure le mot de passe. Elle le

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