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C’était le XXe siècle T.4. De Staline à Kennedy

C’était le XXe siècle T.4. De Staline à Kennedy

Titel: C’était le XXe siècle T.4. De Staline à Kennedy Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Decaux
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d’espionnage et de terrorisme !
    Ce jour-là, on dénombre 1 573 nouveaux réfugiés à Marienfelde.
     
    Le samedi 12, le flot bat tous les records : 2 262. Il fait beau et chaud : 24°C. Le service de renseignements américain note : « À Berlin-Est, les entreprises de transports en commun et les camions ont été réquisitionnés. »
    À 22 h 30, on apprend à Berlin-Est que le métro ne fonctionne plus. Normalement, le S-Bahn roule toute la nuit.
    À 23 heures, au ministère de la Défense de la RDA, le général Heinz Hoffmann réunit les officiers supérieurs de la police et de l’armée du peuple. Posément, il les informe que le camarade Ulbricht a décidé d’interdire, à 0 h 15, l’accès à Berlin-Ouest :
    — Étant donné les préparatifs de guerre du gouvernement fédéral, le Conseil des ministres de la République démocratique allemande a résolu d’exercer une étroite surveillance sur les frontières de la République démocratique allemande, y compris la frontière des secteurs de l’Ouest du grand Berlin comme ont l’habitude de le faire les États souverains.
    À 23 h 30, dans les casernes de Berlin-Est, on commence à distribuer des mitraillettes aux hommes de la police des frontières.
    À 0 heure, le maréchal Koniev met en état d’alerte les unités de la XX e armée qui cernent Berlin. Les quatre divisions de l’armée est-allemande sont elles aussi sur le pied de guerre. La journée du dimanche 13 août 1961 a commencé.
    Le jour du Mur.
     
    Dans le Berlin de l’après-guerre, la porte de Brandebourg, demeurée par miracle intacte, se dresse comme le symbole de la volonté de survie des Berlinois. Orgueilleusement élevée au travers de la plus célèbre avenue de la capitale, Unter den Linden , elle est située en zone soviétique, très près de la ligne de démarcation marquant la limite des deux secteurs. Cette nuit-là, de part et d’autre de cette ligne – de simples rails de tramway jusque-là respectés par tous –, deux détachements armés montent la garde : l’un de l’Allemagne de l’Est, l’autre de l’Allemagne de l’Ouest. À l’Ouest les Schupos – diminutif de Schutzpolizei –, à l’Est les Vopos.
    Le chef de la patrouille occidentale, Franz Schmulda, a pour adjoints Rudy Schulze et Peter Schröder. Au cours de la soirée du samedi 12 août, ils ont constaté – comme à l’accoutumée – de nombreuses allées et venues entre les deux zones : les familles allemandes, qu’elles résident d’un côté ou de l’autre, aiment bien se rencontrer en fin de semaine. À partir de minuit, piétons et voitures se sont faits plus rares. Décidément, la nuit sera calme.
    Vers 1 heure du matin, Schulze et Schrôder aperçoivent une véritable foule, en provenance de la porte de Brandebourg, s’avancer vers eux. Des gens de toute sorte, de tout âge. Des familles entières, surexcitées ou larmoyantes. Ils expliquent qu’ils ont pris le S-Bahn pour rentrer chez eux, à Berlin-Ouest, mais que le trafic s’est trouvé interrompu brusquement. Alors, il a fallu qu’ils rentrent à pied !
    Schulze et Schröder s’en vont informer le chef de patrouille Schmulda qui avertit sur-le-champ le commissariat de police de Tiergarten. De minute en minute, le flot des piétons grossit. Tous dans le même état d’exaspération et de crainte. Schmulda les interroge. Que se passe-t-il en secteur soviétique ? On lui répond que l’on a vu des colonnes de tanks dans la banlieue de Berlin-Est. Des troupes sont massées sur la Marx-Engelsplatz.
    Un peu avant 2 heures du matin, Schulze, resté seul de garde, entend, au-delà de la porte de Brandebourg, un grondement de moteurs – des camions, à n’en pas douter. Au même moment, les projecteurs qui éclairaient le monument, faisant ressortir l’harmonie de ses six colonnes doriques, s’éteignent brusquement. Quelques instants plus tard, un camion passe entre les colonnes de la porte, s’avance sur la Hindenburgplatz, s’arrête. Schulze voit une douzaine d’hommes, armés de mitraillettes, sauter du camion. Ils se postent à la limite extrême du secteur, à une dizaine de mètres, bloquant l’accès par lequel viennent de passer des centaines de piétons. Une autre escouade – des miliciens – débouche de la travée centrale de la porte de Brandebourg, portant des chevaux de frise et des barricades préfabriquées.
    Pendant que Schulze court téléphoner, Schröder prend sa place.

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