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C’était le XXe siècle T.4. De Staline à Kennedy

C’était le XXe siècle T.4. De Staline à Kennedy

Titel: C’était le XXe siècle T.4. De Staline à Kennedy Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Decaux
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Subsistera alors la ressource du premier étage et, lorsque les fenêtres du premier auront été bouchées, du second. Le 22 août, une femme saute du troisième étage et meurt sur le coup : la première victime du Mur.
     
    À Khrouchtchev et Ulbricht, une telle situation paraît intolérable. Il faut empêcher que ces quelques centaines de « traîtres » suscitent des émules. Les barbelés et les grillages vont donc se transformer en cette muraille « en dur » souhaitée par Ulbricht : pierres, moellons, briques, ciment. Le 22 août, on fait savoir aux Alliés que tous les points de passage vers Berlin-Est leur sont désormais fermés. Sauf un seul qu’ils ne pourront franchir sans présenter leurs papiers au contrôle des Vopos. Décidément, Khrouchtchev a choisi de jouer gros jeu. Paris, Londres et Washington reçoivent des notes mettant leur gouvernement en demeure « d’empêcher les dirigeants ouest-allemands d’utiliser leurs avions pour se rendre à Berlin ». Le lendemain, l’ambassadeur soviétique à Bonn, Smirnov, fait savoir que les vols civils à destination de Berlin « doivent être soumis aussi vite que possible » au contrôle de la RDA. Il préconise que les appareils occidentaux atterrissent désormais sur l’aérodrome de Schönefeld, en secteur oriental.
    C’en est trop. Délibérément, le commandement américain envoie quatre de ses soldats à l’Est et leur enjoint de refuser d’exhiber leurs papiers aux Vopos. Ceux-ci les arrêtent, puis les relâchent. Paris, Londres et Washington adressent à Moscou des notes très sévères. Ce qui n’empêche pas, le 29 août, Khrouchtchev de frapper une nouvelle fois sur la table. Il annonce que « devant la menace des dirigeants des États-Unis et des pays alliés de prendre les armes et de déclencher une guerre en réponse à la conclusion du traité de paix avec la RDA », il va reprendre les essais nucléaires interrompus depuis l’automne de 1958. Le gouvernement soviétique annonce qu’il fabriquera une série de bombes de 20, 30, 50 et 100 mégatonnes !
    En réponse, Kennedy annonce la reprise d’essais nucléaires souterrains. De Gaulle, au cours d’une retentissante conférence de presse, s’écrie :
    — Face à un impérialisme ambitieux, tout recul a pour effet de surexciter l’agresseur… Il y a dans ce tumulte d’imprécations et de sommations organisé par les Soviets quelque chose de tellement arbitraire et de tellement artificiel qu’on est conduit à l’attribuer ou bien au déchaînement d’ambitions frénétiques, ou bien à un dérivatif à de grandes difficultés.
    Le 8, les Alliés rejettent purement et simplement les exigences du Kremlin quant au contrôle des vols pour Berlin. Nikita Khrouchtchev est un homme qui sait parfaitement jusqu’où il ne faut pas aller trop loin. Il déclare :
    — J’ai été métallurgiste. Je sais comment il faut s’y prendre pour faire refroidir un métal chauffé à blanc…
    Il sait s’y prendre en effet. Il souhaite soudainement rencontrer à Moscou le ministre belge des Affaires étrangères Paul-Henri Spaak et, revenu à la plus parfaite bonhomie, lui explique :
    — J’ai compris que les Occidentaux ne signeraient pas le traité de paix, contrairement à ce que j’avais espéré. J’ai compris aussi qu’il vous était difficile de conclure un accord avec la RDA, parce que cela entraînerait sa reconnaissance de jure , ce que l’Occident ne veut pas. Tôt ou tard, vous y viendrez, parce que vous n’êtes pas sincères lorsque vous parlez de réunification. Mais je comprends qu’aujourd’hui cela vous soit difficile. Moi-même, je ne cherche pas à vous mettre dans une situation impossible ; je sais très bien que vous ne pouvez pas vous laisser écraser les orteils.
    Spaak observe que les tracasseries innombrables auxquelles les Soviétiques soumettent les Occidentaux des convois militaires ont été immobilisés sur la route de Berlin et des chasseurs soviétiques ont gêné le vol des avions civils dans les couloirs aériens – peuvent comporter des conséquences très graves et peut-être un conflit armé. Nikita Khrouchtchev arbore l’un de ses sourires de paysan madré et raconte une anecdote. On jugeait en Russie un pêcheur qui avait déboulonné des rails :
    — Je voulais simplement, dit-il, lester mes filets en me servant des boulons.
    — Mais ne vous rendez-vous pas compte que vous pouviez faire dérailler des

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