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C’était le XXe siècle T.4. De Staline à Kennedy

C’était le XXe siècle T.4. De Staline à Kennedy

Titel: C’était le XXe siècle T.4. De Staline à Kennedy Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Decaux
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est-allemand, puisque celui-ci serait désormais indépendant et souverain ! Khrouchtchev gronde :
    — Je veux la paix, mais si vous voulez la guerre, c’est votre affaire.
    — C’est vous, et non moi, rétorque Kennedy, qui voulez obtenir un changement par la force.
    Khrouchtchev balaie l’objection d’un geste méprisant, répète que sa décision est irrévocable : s’il le faut, il signera seul un traité avec l’Allemagne de l’Est. En décembre au plus tard.
    — Alors, l’hiver sera froid, rétorque Kennedy.
    On s’est séparé sans cordialité. Certes, la presse n’a pas rapporté les termes exacts du dialogue, mais les échos assourdis qui ont filtré suffisent pour faire naître l’alarme. En particulier en Allemagne de l’Est. Quand, le 15 juin, les téléspectateurs de la RDA voient paraître sur leurs écrans, au cours d’une conférence de presse, Nikita Khrouchtchev puis Walter Ulbricht, ils comprennent que leur sort va se décider bientôt. Ils n’ont pas tort : Khrouchtchev annonce, non sans emphase, qu’il va signer un traité de paix avec la République démocratique allemande. Le contrôle des accès à Berlin-Ouest sera alors de l’unique ressort de la RDA. Sa voix s’enfle pour proclamer :
    — Si un pays quelconque viole la paix et franchit les frontières – par terre, par air ou par eau – il supportera l’entière responsabilité des suites de cette agression qui sera dûment repoussée !
     
    Du 10 au 16 juin, dans les camps de réfugiés de l’Ouest, on accueille 4 770 personnes. Près de la moitié des nouveaux arrivants ont moins de vingt-cinq ans. La semaine suivante, on enregistre 4 169 réfugiés supplémentaires. Pendant tout le mois de juillet, la moyenne journalière dépasse le millier.
    Le plus grand nombre se rend à Berlin-Ouest par le S-Bahn (le métro). Longtemps, on n’y a pratiqué que de rares contrôles. En juillet, à la station Friedrichstrasse – dernier arrêt avant de passer à l’Ouest – les Vopos commencent à monter systématiquement dans les rames pour faire descendre les voyageurs qui transportent des sacs importants ou des valises. Chaque bagage est soigneusement ouvert et, si le contenu ne correspond pas à la durée du séjour à Berlin-Ouest annoncée par le propriétaire, celui-ci est impitoyablement refoulé. Quand il rentrera chez lui, un rapport l’aura précédé. Dorénavant, la police le tiendra à l’œil. Avant longtemps, il ne lui sera plus possible de renouveler une autre tentative.
    Ceux qui parviennent à passer au travers du filet continuent leur voyage dans le S-Bahn. Dès qu’ils voient apparaître l’inscription Lehrter Bahnhof – première gare en secteur occidental – ils sont sauvés. Presque à chaque voyage, on assiste à des scènes bouleversantes : des hommes et des femmes tombent dans les bras l’un de l’autre, des cris de joie s’élèvent, les rires se mêlent aux larmes.
    La première semaine d’août, la moyenne journalière des réfugiés passe à 1 100 par jour.
     
    Le lundi 7 août, des observateurs américains qui se rendent au QG soviétique de Potsdam constatent que d’importants mouvements de troupes s’accomplissent en Allemagne de l’Est. Ils en font rapport. Le jeudi 10, on apprend que le maréchal Koniev, l’un des chefs les plus respectés de l’armée soviétique, a rencontré Ulbricht. Peu de temps plus tard, les vingt divisions soviétiques stationnées en RDA sont mises sur le pied de guerre. Il n’est question que des cinquante installations de DCA munies de fusées sol-air qui viennent d’être disposées autour de Berlin. Dans la cour des casernes de Berlin-Est, on apporte d’énormes rouleaux de fil de fer barbelé.
    Ce même jeudi 10, Walter Ulbricht reçoit une note émanant des puissances du pacte de Varsovie. Celles-ci – contrairement à leur attitude de mars précédent – demandent instamment à Ulbricht que des « contrôles efficaces soient organisés sur la frontière qui sépare les deux Berlin ». Le feu vert, en somme. Le même jour, à Oberspree, devant les ouvriers d’une usine de câbles, Ulbricht va durcir le ton :
    — Les frontières de notre République seront défendues à n’importe quel prix. Nous ferons tout pour arrêter les activités criminelles des chasseurs de têtes ou des marchands d’esclaves de l’Allemagne de l’Ouest, ainsi que celles des espions américains et leurs quatre-vingt-trois réseaux

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