C’était le XXe siècle T.4. De Staline à Kennedy
qu’on les y force, qu’on les évacue un à un, que littéralement on les traîne sur le pont des navires, sur la passerelle de débarquement, jusque sur le quai. Nouvelles photos tragiques publiées par les journaux de tous les pays. Nouvelle colère qui se déchaîne à travers le monde.
Jusqu’à Hambourg, ce monde-là restait divisé quant à la création d’un État juif en Palestine. Comment ne pas être persuadé que le vote de l’ONU, intervenu le 14 mai 1948 et qui a fondé Israël, a découlé en partie de l’image tragique des passagers de l’ Exodus à qui l’on avait voulu interdire la terre de leurs ancêtres ? Dès, lors 90 % d’entre eux vont pouvoir refaire le chemin interdit de 1947. Sans retour, cette fois.
Quelque temps avant sa mort, en 1951, Ernest Bevin, encore ministre des Affaires étrangères, recevra une invitation de l’ambassade d’Israël.
Il ne renverra pas le carton et, tout sourire, se rendra à l’ambassade.
II
Le jour où Staline mourut
6 mars 1953
Jamais, peut-être, il n’a autant neigé sur Moscou : du moins, c’est l’avis des plus vieux habitants. Pendant le mois de février 1953 tout entier, la neige n’a pas cessé de tomber : drue, insidieuse, s’accumulant peu à peu en couches énormes. Puis le vent s’est levé, la pourga glacée, venue de Sibérie. Sous son souffle, la neige s’est prise et transformée en verglas. Circuler dans Moscou ou se hasarder hors de la capitale, sur les routes hérissées d’énormes congères, représente une aventure que l’on hésite à entreprendre. Il semble qu’une barrière de glace enserre Moscou. Seuls de rares trains, précédés de leur chasse-neige, quittent la ville ou y entrent.
Le 4 mars, les auditeurs tôt levés qui se rasent en écoutant Radio-Moscou entendent soudain, à 6 h 19, un simple flash : le speaker annonce que « Staline est gravement malade ».
À 6 h 21, Radio-Moscou précise que « le généralissime est atteint d’une hémorragie cérébrale ».
À 6 h 25, l’agence Tass diffuse une première dépêche : « Staline souffre de troubles cardiaques, il respire avec peine et des bulletins de santé seront diffusés à intervalles rapprochés . »
À 6 h 36, on apprend par Radio-Moscou que « le 3 mars, à 23 heures GMT, l’état du maréchal ne s’est pas amélioré ».
À 6 h 38, l’agence Tass fait connaître que « le pouls de Staline est de 120 et son rythme respiratoire de 38 à la minute ».
À 6 h 55, tombe un communiqué officiel : « Le Comité central et le Conseil des ministres de l’URSS annoncent qu’un grand malheur vient de fondre sur notre Parti et notre peuple : la grave maladie du camarade J.-V. Staline . » Suit un bulletin de santé officiel : « Dans la nuit du 2 mars, le camarade Staline, se trouvant dans son appartement de Moscou, a été frappé d’une hémorragie cérébrale atteignant les régions vitales du cerveau. Le camarade Staline a perdu connaissance. Le bras droit et la jambe droite ont été paralysés. L’usage de la parole a été perdu. De graves troubles cardiaques et respiratoires sont survenus. Les plus hautes autorités médicales ont été désignées pour le traitement du camarade Staline : le professeur thérapeute Lovkomsky, le membre titulaire de l’Académie des sciences médicales de l’URSS Konovalov, les professeurs thérapeutes Miasnikov, membre de l’Académie des sciences médicales de l’URSS, et Tareev, membre de l’Académie des sciences médicales de l’URSS, les neuropathologistes Filimonov, Glazovnov, Tkatchev, Ivanov-Neznamov. Le traitement du camarade Staline se fait sous la direction du ministre de la Santé de l’URSS, Tretiakov, et du chef de service de la santé du Kremlin, Kouperine. Le traitement du camarade Staline se poursuit sous la surveillance du Comité central du parti communiste de l’URSS et du gouvernement soviétique. » Après quoi, s’enchaînent plusieurs paragraphes composés de pleurs lyriques et d’officiels dithyrambes.
C’est ainsi que le monde apprend que le dictateur russe le plus redouté depuis Ivan le Terrible vient d’être touché par l’aile de la mort.
Le 6 mars 1953, Radio-Moscou diffuse, à 2 h 07, un nouveau communiqué annonçant que le maréchal est mort la veille, dans son appartement privé du Kremlin, à 21 h 50 (heure de Moscou), soit à 19 h 50 (heure française) : « Le cœur du camarade et
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