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Charly 9

Charly 9

Titel: Charly 9 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Teulé
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mijote. Sa milice est pourvue de
mèches, poires à poudre garnies et balles de cuivre en quantité.
    Nevers se pourlèche :
    — À Marcel, nous avons déjà
envoyé ce mandement : « Cette nuit, que dans chaque maison de
catholique un homme, croix au chapeau, bras gauche entouré d’une écharpe
blanche, se trouve armé et muni d’une torche derrière une fenêtre. La cloche
donnera le signal et alors… »
    « … À table ! »
frappe des mains Birague tandis que le jeune roi en bégaie :
    — Avec Marcel, nous passerions
de mille à dix mi-mi-mi…
     
    — Dix mille morts ?
    — Voire vingt mille,
pronostique le capitaine d’un air badin. Les fortes chaleurs, le manque d’eau
potable, les fièvres et la cherté du pain due à la venue de nombreux
protestants pour le mariage font que Paris catholique frétille. C’est une eau
bénite qui va bouillir. Tout tournera à l’exorcisme général.
     
     
    — Vingt mille morts ?
    Catherine tapote une main d’Henri
posée sur son épaule puis caresse ses doigts de fille. Charles regarde ce
tableau touchant et tout dans sa tête devient d’un blanc d’implosion :
    — Vous me demandez une chose si
exécrable qu’elle ne fut jamais conçue par les plus barbares nations du monde…
    Le garde des Sceaux, au contraire,
s’exalte :
    — Les rois seront éblouis par
l’audace du jeune Charles IX tellement à l’opposé de leurs inutiles
compromis à n’en plus finir !
    — On me considérerait comme le
plus méchant garçon qui naquit jamais et pire encore que Néron… cauchemarde
Charles IX.
    — La postérité vous admirera
pour la grandeur de cet acte, promet le duc.
    — Jamais cela ne pourrait
sortir de la mémoire de l’humanité, jamais ! C’est une histoire qu’on
raconterait plus tard pour faire peur aux petits enfants…
    — Certes, nous y mettrons tant
les mains à tort et à travers qu’il en restera souvenir de cette
Saint-Barthélemy, reconnaît Tavannes.
    Et la tête du roi, tournée à gauche,
repart dans l’autre sens, poursuit ce saoulant va-et-vient d’essuie-glace en
écoutant une rafale de conseils qui l’assomment littéralement :
    « Majesté, réalisez cette nuit
même le Jugement dernier », « Un roi, parfois, doit verser à longs
flots le sang de ses sujets », « Éveillez-vous,
frappez ! », « À Lépante, la victoire contre les Turcs nous
dicte qu’après les musulmans il faut en finir avec les protestants »,
« Soyez, d’un amas d’aïeux prestigieux, l’éclat héréditaire »,
« Devenez cruel, roi sur la terre ! », « Sire, un mal
violent veut un remède extrême. »
    Girouette, la tête à tous vents de
Sa Majesté ne sait plus que penser et se désole :
    — Je ne voulais pas être roi.
C’est mon frère aîné qui est mort trop tôt ! Je n’étais pas destiné à
régner.
    Anjou, lui, soupire de n’être à la
place de Charles tout en massant les épaules de leur mère qui paraît en
roucouler d’aise. Le monarque se lève !… et préfère aller, vers la fenêtre
ouverte, observer la ville.
    À gauche, un mur du château du
Louvre. Devant, une place vide bordée, là-bas, de silencieuses maisons étroites
à deux ou trois étages (toits pointus, colombages, portes gothiques). Dans
beaucoup d’habitations, derrière une fenêtre, luit une flamme qui attend en
vibrant.
    — Ce serait…
    Les toits s’étagent dans un lointain
tout piqueté d’une multitude de clochers sous une nuit scintillante d’étoiles.
    — Ce serait effroyable et
dépasserait toute conception de l’horreur. On jetterait les gens à travers les
vitres. Cela prendrait des proportions fantastiques. Ce serait…
    « … Fait ! » rient
ensemble sa mère et son frère pour le ridiculiser. Charles juge que :
« C’est impossible d’être aussi cruel. »
    Allez, une main consolante se pose
sur son épaule. Il croit que c’est celle de Catherine. Faut-il être bête, se
dit-il quand il reconnaît la voix du vieux maréchal de France venu lui confier
à l’oreille :
    — C’est cruauté d’être humain
et humanité d’être cruel…
    Le monarque se retourne et revient
s’asseoir près de la table. Il contemple les flambeaux, accrochés aux murs, qui
éclairent son cabinet privé. L’un d’eux brûle derrière sa mère. Charles porte
une main à son front comme une personne lasse. Il a maintenant à son visage
marqué les tares héréditaires des Valois, les signes de

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