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Charly 9

Charly 9

Titel: Charly 9 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Teulé
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1
    — Un mort ?
    Un gentil garçon semblant à peine
sorti de l’adolescence – il vient d’avoir vingt-deux ans – écarquille ses
grands yeux :
    — Quoi ? Vouloir que
j’ordonne, pour cette nuit, l’assassinat d’un convalescent surpris en plein
sommeil ? Mais vous n’y pensez pas, ma mère ! Et puis quel homme,
l’amiral de Coligny que j’appelle « mon père ». Jamais je ne
scellerai cet édit !
    Tout loyal, franc, ouvert du cœur et
de la bouche, le garçon, à haute fraise blanche entourant sa gorge jusqu’au
menton, s’étonne :
    — Comment pouvez-vous venir me
réclamer la mort de mon principal conseiller qui déjà hier matin, sortant du
Louvre, fut arquebusé dans la rue par un tueur caché derrière du linge séchant
à une fenêtre ?… Il n’est que blessé. Ambroise Paré dit qu’il s’en tirera
et je m’en réjouis.
    — Pas nous, répond une voix de
matrone au fort accent italien. D’autant que c’est ton jeune frère et moi qui
avions commandité l’attentat.
    — Quoi ?!
    Le garçon, d’un naturel aimable et
ayant de bonnes dispositions, n’en revient pas. Sous un bouquet de duvet de
cygne à sa toque, il tourne lentement la tête vers les six personnages assis
côte à côte devant lui. L’un d’eux, vieux gentilhomme vêtu d’une jupe de damas
cramoisi, regrette :
    — Sire, le seigneur de
Maurevert, tueur professionnel mais mal habitué aux armes à feu, voulait faire
ça à l’arbalète. Pour plus de sûreté, nous lui avons imposé l’arquebuse. Mal
nous en a pris. Au moment du tir, Coligny s’est penché pour réajuster sa mule.
Maurevert a manqué sa cible.
    Le jeune roi aux joues arrondies
hoche la tête d’un air consterné :
    — Quand je pense que cet
après-midi je suis allé rue de Béthisy, au chevet de l’amiral, lui promettre de
faire rechercher et punir les coupables… C’étaient ma mère et mon frère !…
Mais pourquoi avez-vous décidé ça, tous les deux, mamma ?
    Mamma ,
assise juste en face de son rejeton royal, porte autour du cou une immense
collerette tuyautée en façon de roue de carrosse. Couverte d’une poudre de riz
parfumée, celle-ci enfarine le haut des manches bouillonnées d’une robe noire
de veuve. Yeux globuleux et joues molles, les lèvres lippues de la reine mère
remuent :
    — Charles, écoute-moi… Gaspard
Coligny de Châtillon, certes grand amiral de France mais aussi chef du parti
protestant, a maintenant trop d’emprise sur toi. Et depuis des semaines, il te
presse en secret d’intervenir aux Pays-Bas espagnols sous prétexte que
Philippe II y opprime les huguenots.
    — Comment le savez-vous puisque
c’est en secret ?
    — Je le sais. Je sais tout ce
qui se dit au Louvre.
    — Encore l’escadron volant de
vos espionnes, magicienne florentine ?… sourit le doux roi indulgent.
    Catherine de Médicis reprend :
« Ton jeune frère Henri – Mes Chers Yeux – … » Charles a un tic
à la mâchoire tandis que sa mère poursuit : « … ainsi que ton Conseil
qui est ici, les Guise à la tête du parti catholique et moi, ne voulons pas de
cette guerre. »
    — Mère, si des protestants sont
maltraités quelque part, il faut sans doute aller les défendre.
    — Eh bien non, il ne faut
pas !
    Elle s’explique :
    — Lutter en Flandre contre la
très dévote Espagne reviendrait à engager la France du côté des huguenots et à
s’attirer la colère du pape.
    L’imposante Italienne secoue un
éventail à girouette – bâton au bout duquel est collé un petit drapeau fixe
décoré de fleurs de lys et qui fait du vent :
    — Ma ! Quelle chaleur
encore à bientôt dix heures du soir… En tout cas, avant-hier jeudi, au chef
protestant, tu as chuchoté que tu prendrais ta décision d’ici lundi.
    — Vos espionnes ont l’ouïe
fine… reconnaît le roi Charles.
    — Tu allais céder à ce Coligny.
J’en suis certaine. Alors oui, on a tenté de l’abattre afin qu’il ne te soit
plus de mauvais conseil. Mais ça a raté alors on vient te demander
l’autorisation de recommencer cette nuit même.
    — En voilà bien, tout d’un
coup, des scrupules, mamma ! s’amuse le monarque. Vous étiez moins
embarrassée, hier vendredi, quand Maurevert avait le doigt sur la gâchette.
    — C’est à dire que… hésite mamma ,
pour ce qu’on veut dorénavant accomplir, il nous faut obligatoirement ton
autorisation qui a force de loi. Quand Coligny, cette fois-ci, sera

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