Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Chronique d'un chateau hante

Chronique d'un chateau hante

Titel: Chronique d'un chateau hante Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Magnan
Vom Netzwerk:
truands
qu’on affubla d’un uniforme. On offrit ce qu’il restait au demeurant des
spadassins qu’on supplia de nous rançonner et qu’ensuite ils allassent porter
ailleurs leur prédilection. Rien n’y fit. Les restanques au soleil et les nuits
tièdes les intéressaient bien plus que de l’or mangé en pays sombre.
    Pour
éviter leurs congénères devenus gardiens de l’ordre, ils allèrent piller les
campagnes. Tel jour un parti de trois d’entre eux se présenta devant le clos de
l’alchimiste qui prétendait s’en remettre à la garde de Dieu.
    Clairance
était seule au logis. Elle les reçut à coups de taravelle mais succomba sous le
nombre.
    Ils la
lièrent sur un escabeau. Ils mirent en perce une barrique dans la cave
attenante. L’envie de boire fut plus forte que celle de violer. Ils se dirent
que pour ça ils avaient du temps. L’athanor quand ils furent ivres les intrigua
beaucoup d’abord mais ensuite ils y virent leur pire ennemi. Ils le traitèrent
à coups de pied mais il était brûlant, ils voulurent le démonter mais il était
lourd, finalement ils pissèrent contre à tour de rôle avec une telle abondance
qu’il s’éteignit.
    L’escabeau
où ils avaient attaché Clairance était vermoulu. À force de se démener,
celle-ci parvint à se délivrer. Les compagnons ricanants faisaient la farandole
autour du four de toutes les vertus. Ils s’en étaient pris à coups d’épée au
soufflet qu’ils voulaient crever, mais une peau de taureau tannée c’est autre
chose qu’une chair d’homme.
    La rage
de les voir faire donna à Clairance une force surhumaine. Armée de l’escabeau
démantibulé elle se mit à taper dans le tas des brutes avinées. Elle en assomma
deux, l’autre s’enfuit abandonnant son épée sur la table de la salle commune.
Clairance se saisit de cette lame et poursuivit le dernier truand qui titubait
d’alcool mal digéré. Elle lui passa l’épée au travers du corps.
    Le
désespoir de voir l’athanor éteint avait décuplé ses forces et son énergie.
Elle revint vers la maison et, poussant les cadavres hors de son chemin, elle
se mit en devoir de rallumer le four divin.
    Tancrède
et le Mèche rentrant à la vesprée trouvèrent leur épouse et mère à genoux
devant le creuset céleste qui ronflait. L’athanor était rouge sombre. Les lames
des épées tanquées dans le soufflet jouaient du tympanon en s’entrechoquant à
chaque gonflement de la peau de taureau. Tout était en ordre. Clairance à
tue-tête pour couvrir le bruit de l’athanor ronflant et du halètement du
soufflet leur conta brièvement qu’elle avait échappé à la mort. Il ne restait
plus qu’à appeler le curé de Lincel afin qu’il vînt donner l’absoute aux trois
vilains qui avaient cru que la descendante d’une lignée de bretteurs (les Provenchères
avaient porté l’épée pendant trois siècles) n’était qu’une faible femme. Tout
était en ordre.
    — Tu
as fait tout ça à toi toute seule, ma chère Clairance ?
    — Faou
creire moussu lou cura ! (Il faut croire, monsieur le curé !)
    — Eh
bé ! dit celui-ci en hochant la tête. Néanmoins il faut que je t’entende
en confession.
    — Coumo
en confession ?
    — Eh
oui qu’est-ce que tu veux ? Tu as tout de même tué trois hommes.
    — Coumo
j’ai tué ! Mais ils voulaient m’occire ! Mais si je ne les avais
tués, c’est moi qui serais là ! raide morte !
    Elle
désignait le sol d’un doigt véhément.
    Le curé
secoua la tête doucement.
    — Il
n’en reste pas moins que tu es en état de péché mortel. Je dois t’entendre en
confession et toi te repentir. Sans cela, dit-il, tu ne pourras plus ouïr la
messe ni participer à la sainte communion.
    C’était
ahurissant d’entendre cela. Le soir même Clairance se coucha et ne se leva
plus. Elle était en état de terrible injustice. Trois jours elle monologua avec
Dieu dans son for intérieur. Elle mourut le quatrième jour d’une terrible
colère rentrée contre le Créateur.
    Quand le
curé vint néanmoins lui donner l’absoute, il trouva le Mèche sur le seuil et
Tancrède derrière lui qui lui interdisaient l’accès.
    — Non !
dit le Mèche. Tu devrais avoir honte ! tu devrais te traîner à genoux
devant moi ! Tu n’as pas de remords, pas de regrets. Rien !
    — Je
n’ai fait qu’appliquer les formes des Saintes Écritures, dit le curé
humblement.
    Le Mèche
lui ferma la porte au nez.
    — Désormais,
dit-il

Weitere Kostenlose Bücher