Clio Kelly et l'éveil de la gardienne
de court son supérieur. Lorsque j’ai pris l'apparence d'un renard, Janus les a changés en bijoux. En fait, leur rôle est comparable à celui de téléphones portables. Ils me permettent de le joindre quel que soit le lieu ou l’époque où il se trouve…
— Alors, s’ils servent de portables, tu peux m’expliquer comment je me suis retrouvée au dix-huitième siècle au lieu de le faire venir à moi ?
— Parce que tu ne sais tout simplement pas l’utiliser, grogna Janus. Ils servent également de portail à travers le temps et l’espace. Hermès, j’attends ton explication !
— Eh bien, il semble que Clio ait rencontré l’autre gardienne, avoua-t-il en frissonnant et en se repliant sur lui-même pour se faire le plus petit possible.
— Impossible ! répliqua Janus en le foudroyant du regard.
— Si. Un devëlite est venu jusqu’ici et l'a fait courir jusqu'à sa compagne qui l’attendait aux abords de la forêt.
Une fureur froide et silencieuse passa dans les yeux du vieil homme ; Clio aussi bien qu’Hermès savait que cette expression sur son visage ne signifiait rien de bon. Sans prêter attention à Janus, Clio s’approcha avec discrétion de son compagnon et lui demanda à l’oreille ce qu’étaient les devëlites.
— Ce sont des dieux réincarnés en animaux. La plupart d’entre eux sont chargés de veiller sur ceux qui se sont réincarnés en humains, comme les Nymphes ou les Muses. Ils peuvent prendre plusieurs aspects, c’est-à-dire la forme de n’importe quel animal. Cependant, chacun possède une apparence propre et ils peuvent aussi prendre forme humaine.
— Les événements se déroulent plus vite que je ne l’avais pensé.
Janus se tourna vers Clio :
— Je vais te donner un Apophis. Le renard ne pourra pas être avec toi en permanence, je serai plus tranquille ainsi.
Avec douceur, il prit la main de sa protégée et déposa son propre serpent dans sa paume. À peine Clio l’eut-elle touché que celui-ci s'anima : se dressant sur sa queue, il émit un sifflement qui ne la rassura en rien. La gueule ouverte, il plongea ses crocs dans sa chair mais contrairement à la douleur qu’elle attendait, elle n’éprouva qu’un faible picotement tandis qu’il s’enfonçait sous sa peau.
Prise de tremblements, elle le sentit remonter le long de son bras et se figer sur son torse. Avec précaution, elle écarta le haut de son pull. Il apparaissait à présent sur le bas de sa gorge, tel un tatouage. Alors qu’elle s’apprêtait à le toucher, Janus arrêta son geste. Le serpent s’illumina soudain et perça sa peau, sans souffrance. Une fois au contact de l’air, il se solidifia, donnant l’impression de n’être qu’un simple bijou.
— Tu ne dois jamais sortir sans ! ordonna Janus tandis que l'objet tombait dans la paume de sa propriétaire. Si tu as besoin de moi, contente-toi de poser la main dessus !
— Que vas-tu faire à présent ? interrogea Hermès en quittant son perchoir.
— Passer un savon à deux idiotes ! marmonna-t-il avant de disparaître.
— On ne s’en est pas si mal tirés ! s’exclama alors Hermès.
— Tu ne lui as pas parlé de mes visions…
— Heu… Si ça ne t’ennuie pas, Clio, je préférerais que cela reste entre nous pour l’instant.
L’intéressée se contenta de hausser les épaules ; elle se dirigea vers la fenêtre et, là, elle exposa le serpent à la lumière, lequel ne ressemblait plus qu’à un bijou ordinaire.
La neige tombait de plus belle sur le Gévaudan et, debout devant ses carreaux, Clio était de plus en plus habitée par les doutes qui l’assaillaient.
Assis à la table du petit déjeuner, Morgan trouvait sa partenaire bien silencieuse. Les traits tirés, d’une pâleur presque livide, elle lisait la même page depuis une bonne demi-heure.
— Ton thé est froid, lui fit-il remarquer.
— Mmm…
— Tu comptes manger un morceau ou apprendre par cœur ce journal ?
— En fait, ni l'un ni l'autre, dit-elle d’une voix lasse en abandonnant sa lecture. Je n’ai pas faim. Dans combien de temps Romain vient-il nous chercher ?
— Dans…
Il n’eut pas besoin de répondre car le journaliste arrivait à leur table. Ils échangèrent une solide poignée de main. Il leur annonça aussitôt qu’un nouveau crime venait d’être commis et que son coéquipier les attendait dans la voiture.
— Je pars devant, expliqua Romain, qui était venu en moto. C’est Tony qui vous
Weitere Kostenlose Bücher