Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Clopin-clopant

Clopin-clopant

Titel: Clopin-clopant Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Annie François
Vom Netzwerk:
vous pouviez vérifier dans l’annuaire. »
    Ainsi, d’emblée, François a tout su de mes pires défauts :
tabagisme, impatience, frivolité, rouscaille et mauvaise foi. Après un an de
relations platoniques et trente ans de vie commune, il cherche encore le
meilleur.

Un macho à Mexico
    Les puants remugles de cigares (des vrais) m’ont paru suaves
dès lors qu’ils furent mâchouillés par d’aimables barbus ou de séduisants
imberbes. Ils se fournissaient directement à la source, au point que je me
demande encore si certains élans procastristes ne tenaient pas aux seuls
havanes ou si, réciproquement, le goût des havanes ne renforçait pas quelque
attirance idéologique. Sans vouloir entrer dans un débat que je fuyais déjà, je
note que les castristes et apparentés par le havane cultivaient une jovialité
qui contrastait agréablement avec l’austérité de militants d’autres obédiences
et rendait leur sectarisme beaucoup plus supportable.
    À court de combustibles, ils s’approvisionnaient comme tout
le monde chez le buraliste ou, quand nous étions au restaurant, auprès de la
dame des cigarettes. Pour des raisons d’acoustique, je me souviens avec
ravissement de celle de la Coupole. Son éventaire sur l’estomac, elle avançait en
guettant un signe, un regard à droite, à gauche, et lançait haut et clair un « Cigarettes ! »
qui dominait le brouhaha sans l’entamer. Parfois, elle brandissait une ardoise
où était écrit le nom de l’appelé en clamant « Téléphone ! ». Ce
n’était pas toujours la même personne – donc la même voix – mais le timbre se
détachait avec la netteté d’une soliste sur le chœur dans cette salle qui a
perdu sa coupole et donc sa caisse de résonance. Point de nostalgie. Juste un
bon souvenir auditif.
    La mansuétude des fumeurs de cigares trouva un brutal
démenti un soir à Mexico. Accompagnatrice auprès d’un groupe de psychiatres en
congrès, je m’aperçus que j’étais encore en panne de cigarettes. Jo m’offrit un
de ses puros que notre patron dans cette expédition, et néanmoins ami
commun, m’arracha : « Une dame ne fume pas le cigare. » Maman !
Ce gros lard prétendait se substituer à ma mère, la seule autorité à laquelle
je m’étais d’ailleurs dérobée. Je récupérai mon cigare, le coupai d’un coup de
dents, me le plantai dans la bouche et lui demandai du feu.
    Ce geste scella pour toujours mon indépendance envers les
machos à la manque, mais je ne fumai jamais plus le cigare, qui reprit ses
fragrances détestables. Je ne le tolère que par réciprocité envers mon propre
tabagisme.

Coke en stock
    Le casque ailé des paquets de Gauloises m’aura peut-être
protégée d’autres toxicomanies. Comme beaucoup, j’ai tâté du haschisch mais
sans conviction ni plaisir. Les gestes et la lenteur du rituel m’agaçaient. L’officiant
mettait une bonne plombe à rouler un joint et à le faire circuler. Aspiration d’asthmatique,
air recueilli, comme au retour de communion, m’évoquaient l’apothicairerie et
la sacristie, et ne me valaient que fou rire et froid aux pieds. Or, si j’ai le
rire plutôt facile, j’ai grande vergogne à me faire une bouillotte en compagnie.
Je persistai mollement. Un soir où j’avais les orteils glacés, je songeai à ma
grand-mère évoquant ses rapports avec l’opium : « Par curiosité, j’ai
fumé quelques pipes. Ça ne me faisait rien. L’idée de devenir opiomane pour pas
grand-chose m’a découragée. Ça tombait bien, ton grand-père étant muté à
Belfort, on aurait eu du mal à se fournir. » Cette histoire d’approvisionnement
constituait d’ailleurs un problème : soit il fallait dépendre des copains,
soit me ravitailler moi-même. Je me voyais mal plonger dans la clandestinité
pour un résultat si médiocre. Bref, quand le joint circulait, je passais mon
tour.
    Les choses se corsèrent avec l’apparition dans mon entourage
des héroïne, cocaïne, LSD, amphétamines, etc. Que les amphétamines soient requalifiées
de drogue m’en boucha un coin. La Coridrane était encore en vente libre ; à
des fins purement utilitaires, j’en prenais innocemment deux comprimés après chaque
nuit blanche, puis deux après déjeuner pour rester fraîche et rose au boulot. Le
jour où un copain en dilua et filtra un tube entier, j’en restai comme deux
ronds de flanc. Considérant les liens qui m’unissaient au jeune homme, je le
laissai engloutir seul son

Weitere Kostenlose Bücher