Comment vivaient nos ancêtres
pour les ruraux comme peur la plupart des citadins le voyage de leur vie et le seul contact avec le monde extérieur.
Partout règne l’esprit de clocher, de « plou », comme on dit en Bretagne. On le mesure par les véritables batailles rangées que se livrent les gosses de chaque communauté dans le meilleur style de La Guerre des boutons , comme par celles qu’organisent les adultes lors des parties de soule ou de crosse. En témoignent également les manifestations populaires communautaires que l’on verra tout au long de l’année, du carnaval à la Saint-Jean, sans oublier les extraordinaires « charivaris » manifestant la désapprobation publique à l’égard des cocus, des mariages mal assortis, enfin de tout ce qui est hors normes.
Car la communauté paroissiale est organisée. Elle se rassemble souvent le dimanche à la sortie de la grand-messe et participe à différentes instances : la fabrique, qui gère les ressources de l’église, puis le conseil municipal, dont les sièges sont souvent âprement disputés.
De façon plus informelle, elle a ses « parlements », avec ce que nos sociologues appelleraient aujourd’hui des lieux de sociabilité, chaque sexe ayant le sien. Les hommes ont la foire et la place du village, et surtout la forge et le café – où les femmes ne pénètrent jamais. Ce n’est donc pas un hasard si beaucoup de maires de village au XIX e siècle sont forgerons ou maréchaux-ferrants. Ce n’est là qu’une confirmation de la réalité : très tôt, dans leur forge, ils ont été de fait les « présidents » des républiques villageoises.
Les femmes, elles, ont le monopole des puits et des fontaines, et surtout des lavoirs. Dans un brouhaha et une effervescence inouïs s’y côtoient laveuses professionnelles et maîtresses de maison qui travaillent en échangeant commérages et potins – en Provence, on dit qu’elles « jaspinent » –, quand ce ne sont des coups de battoir comme Zola le décrit dans la vie de Gervaise.
Il existe enfin une dernière assemblée qui réunit tout le monde, hommes et femmes, jeunes et vieux : ce sont ces veillées dont la fée Électricité puis la télévision feront oublier le goût… Il n’en reste pas moins qu’une réelle solidarité existait en principe au village, expression d’une communauté au pouvoir incontestable.
3 000 POULARDES DE BRESSE
POUR INSTALLER LA RÉPUBLIQUE
Pendant longtemps, l’église et le château sont les seuls liens qui unissent nos ancêtres à l’autorité et au gouvernement. La justice, d’ailleurs, est entre leurs mains.
À la Révolution, une troisième entité apparaît : la mairie, qui devra longtemps rivaliser avec ceux-ci pour s’affirmer.
La mairie est largement symbolique. Elle est la clé de voûte de l’institution républicaine, le centre du décor républicain. Située en face de l’église, intentionnellement souvent plus grande que le château, elle abrite sous son aile protectrice de pierres de taille un groupe scolaire avec écoles de filles et de garçons, parfois salle des fêtes, à quoi s’ajoutera le monument aux morts. Au centre du village, pavoisé de tricolore à chaque occasion, cet ensemble chante la gloire de la République triomphante. C’est à cette dernière que revient donc le privilège de construire des chemins de fer avec viaducs, tunnels et gares, de bâtir des bureaux de poste, etc. C’est pour célébrer ses bienfaits que Loubet, président de la République, organise le 22 septembre 1900 à Paris le banquet général des maires de France qui connaît un fabuleux succès. Sur 36 172 maires invités, 20 777 sont présents – grâce au train ! – et, ceints de l’écharpe tricolore, avalent allègrement les 3 000 poulardes de Bresse, les 1 800 canetons et les 250 bœufs immolés pour approvisionner un menu pantagruélique.
La cloche et le clochard
Eh non ! Le clochard ne doit rien à la cloche… Leurs origines, même si elles passent également par une homonymie, sont totalement différentes.
La cloche du clocher vient d’un mot celtique, qui aurait été importé dans l’ancienne Gaule par des moines anglo-irlandais.
Le mot « clochard » vient au contraire du latin « cloppus » ou « claudus », signifiant boiteux, mot à l’origine de nos verbes « claudiquer » et « clopiner », de notre expression « clopin-clopant », de nos « éclopés » et aussi de « marcher à clochepied ». Ce
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