Comment vivaient nos ancêtres
immondices et excréments en tout genre. Il suffit de crier « À l’eau ! » en se penchant par la fenêtre pour avoir le droit de déverser son pot de chambre dans la rue ! « Rouen se sent d’une demi-lieue », remarque un écrivain normand. Bouchers et rôtisseurs inondent les rues de sang, tanneurs et teinturiers de relents pestilentiels si bien que les marchands de vin (les cafetiers) voient souvent leur marchandise souillée. De plus, nos citadins ont longtemps conservé les habitudes rurales de leurs grands-parents en continuant à élever animaux et volailles. En 1654-1655 à Nancy, on doit interdire d’élever des poules dans les appartements, et combien de villes ont dû lutter durement pour se débarrasser des ânes, des chèvres et des cochons en liberté dans les rues infectées de leurs excréments.
La ville d’antan n’est ni riante ni pimpante. Elle connaît la délinquance, souvent due à des marginaux venus s’y établir, et la prostitution avec son « château-gaillard ». Elle connaît également une activité intense qui vaut bien certaines des scènes de notre vie urbaine. Au milieu des cris multiples des marchands ambulants, une foule de gens travaillent dans la rue : les femmes filent, le teinturier fait sécher ses draps, le charpentier ses merrains… On se bat dans les auberges et, au moindre coup de vent, les enseignes de bois ou de fer forgé se mettent à grincer, balancées en cadence. Images pieuses ou simples symboles, ces enseignes sont de toutes sortes : un cercle pour un tonneau aux portes des cafés, une branche ou une gerbe d’épis pour les cafés ou les auberges, souvent un bouquet de paille ou de lierre, un « bouchon », d’où les petits bouchons lyonnais, ou diverses autres inventions imagées qui donnent aux établissements de curieux noms, tels que « Le chien qui rit », « La pie qui boit », « L’âne qui veille », « Le veau qui tête », « Le chat qui pelote », « Le cheval blanc » ou encore, calembour à la clé, une lettre k barrée qui n’est autre que le rébus de « cabaret ».
La ville d’autrefois a elle aussi ses lieux de sociabilité : foire, cafés, lavoirs, auxquels s’ajoutent au XIX e siècle la promenade ou le kiosque à musique, lieux de rencontre plus recherchés. L’Église y est tout aussi présente et influente (Rouen comptait autrefois 35 paroisses !) et le clergé surabondant.
À ces noyaux communautaires viennent s’ajouter les puissantes corporations de métiers. Tout ce monde participe à une importante activité sociale qui s’exprime, comme au village, lors des fêtes traditionnelles ou des charivaris.
La ville a toutefois une administration plus élaborée qu’à la campagne. Ainsi à Nancy, en 1777, deux peintres sont embauchés pour peindre les numéros sur les immeubles des rues ; Lille voit ses artères éclairées par des becs de gaz à partir de 1837. Enfin, la conquête de l’eau aidera l’hygiène à s’imposer. La ville, alors, commence à servir de modèle à la campagne, de modèle et de terre promise !
EMBOUTEILLAGES, MOULINS ET « MAÎTRES FIFI » :
PARIS D’HIER OU D’AUJOURD’HUI ?
« … voicy l’heure de Midy,
Et c’est aujourd’huy Samedy,
Nous trouverons cinq cens Charrettes,
Des Tumbereaux, et des Brouettes.
J’appréhende fort l’embarras,
Allons viste, car tu verras,
Qu’il nous sera impossible
De sortir de la presse horrible
Que nous rencontrerons là-bas ;
Je voy déjà qu’un Savetier
Veut aller gourmer le Chartier,
Car il accroche avec sa rouë
Un Tumbereau remply de bouë,
Et s’il avance encore un pas,
Je voy le Tumbereau à bas ;
…
Mais sur cecy survient un Coche,
Lequel voulant passer s’accroche
À deux ou trois grands chariots
Pleins de coterets et de fagots.
Là se commence un préambule,
Le Cocher veut que l’on recule,
Un Chartier dit qu’il ne peut pas
Reculer seulement un pas… »
Nul ne s’étonnera que cette scène se situe à Paris ; en revanche l’année 1714, date à laquelle un certain Berthod la décrivit, a de quoi surprendre. Déjà à cette époque, les rues de Paris étaient embouteillées !
Mais furent-elles jamais libres pour la circulation ? Astérix et Obélix prétendent que non… Paris ne doit finalement cette saturation qu’à sa situation de capitale. Or, jusqu’au XIII e siècle, la ville en réalité n’a rien de la capitale d’un grand royaume tant la puissance royale est morcelée et
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