Consolation pour un pécheur
alors acquis la conviction que je savais où elle se trouvait et possédais le secret permettant de maîtriser ses pouvoirs destructeurs. Il croyait que Yusuf était le complice de Baptista et pensait qu’il m’avait confié ce qu’il savait.
— Pauvre Yusuf. Il s’intéresse plus aux chevaux qu’à la magie, me semble-t-il, mais certains pensent qu’un jeune Maure doit être versé dans ce genre de chose. Sebastià a alors conçu un autre piège pour vous avoir tous les deux sur cette colline.
— Où nous devions trouver la coupe.
— Et lui apprendre à la manipuler sans risque, compléta l’évêque. Ensuite, Marc vous aurait certainement éliminés. Il est heureux que ce ruffian ait décidé de s’envoler dès ce soir-là.
Une toux discrète interrompit les commentaires de l’évêque.
— Oui, Bernat ? fit Berenguer en prenant un air de martyr docile.
— Votre Excellence, puis-je m’immiscer un instant dans votre conversation ? dit le secrétaire en s’avançant vers eux.
— Certainement, Bernat, qu’y a-t-il ?
— On a mis la main sur le serviteur de Sebastià.
— Bien. Faites-le conduire au palais. J’aimerais lui poser quelques questions.
— Je crains que cela ne soit plus possible, Votre Excellence. On l’a retrouvé au pied d’une petite colline. Il a fait une chute à cause de l’obscurité, apparemment.
— Mort ? demanda l’évêque.
— Mort, Votre Excellence.
— Ce n’est donc pas étonnant qu’il n’ait pas accouru quand Sebastià l’a sifflé, dit Isaac. On m’a dit que la nuit était très sombre. Sait-on de qui il s’agissait ?
— Le sergent de la garde a reconnu en lui un dénommé Marc, un individu louche qui avait jadis été le serviteur de maître Sebastià. Il a quitté la ville il y a quelques années.
— On a entendu un grand bruit cette nuit. Peu avant que les cloches ne sonnent minuit. Je pensais que c’était un renard qui s’était jeté sur un lapin, mais ce pouvait aussi être un homme qui trébuche et tombe.
— L’homme a-t-il crié dans sa chute ? s’enquit Berenguer.
— Non, Votre Excellence.
— C’est étrange, rares sont ceux qui accueillent la mort en silence.
— À moins qu’ils ne soient déjà morts, Votre Excellence, dit Bernat.
— C’est vrai, fit Isaac. C’est une chose rare.
— Il portait une blessure sur le sommet du crâne, expliqua Bernat. Le sergent s’est demandé si quelqu’un ne l’avait pas assommé avant de le pousser dans le vide. En tout cas, comme l’a ajouté le sergent, celui qui a fait ça a rendu un fier service à l’humanité.
— Ce n’est pas moi, Votre Excellence, dit Isaac. Ni Raquel.
— Je ne pensais pas à vous, répondit Berenguer. Et Yusuf était trop bien attaché. J’ai vu les marques sur ses poignets.
— Oui, je les ai senties en le palpant ce matin.
— Si maître Daniel l’avait frappé à la tête avant de le pousser, demanda Bernat, qui l’aurait frappé à son tour ?
— Daniel semble avoir passé une bonne partie de la nuit sur cette colline… totalement inconscient, précisa Isaac.
— Il y avait peut-être quelqu’un d’autre avec vous, maître Isaac, fit remarquer le secrétaire. Quelqu’un qui – peut-être – a vu maître Daniel se faire attaquer et est allé lui porter secours. Peut-être a-t-il frappé l’agresseur sur la tête et, quand il s’est rendu compte que l’autre était mort, s’en est-il débarrassé aussi simplement que ça.
— Est-ce l’opinion du bon sergent ? demanda Berenguer.
— Il a émis cette hypothèse, rien de plus.
— Il pouvait y avoir encore quelqu’un d’autre, dit Isaac. J’ai entendu plusieurs bruits de pas.
— Serait-ce l’homme qui a mis une sorte de coussin sous la tête de maître Daniel ? Et sauvé sa lanterne ? demanda Berenguer.
Nul ne répondit.
— Quelqu’un a creusé ce trou et a pris ce qu’il y avait dedans, fit Bernat.
— C’est très vrai, dit Isaac. Quelqu’un, oui. À moins qu’il ne s’agisse d’un animal. Les animaux aussi creusent des trous.
— C’est possible. Mais dites-moi, maître Isaac, poursuivit Berenguer, comment se fait-il que vous vous soyez trouvés si près de cet endroit précis ?
— Voulez-vous savoir si nous avons été menés là par quelque mystérieux étranger ? Certes non, Votre Excellence, dit le médecin en riant.
— Je suis sûr qu’il existe une explication toute simple, Bernat. Si
Weitere Kostenlose Bücher