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Conspirata

Conspirata

Titel: Conspirata Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Harris
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tellement crispé que, même depuis mon
ancien poste d’observation près de la porte – que j’avais dû
reprendre maintenant que Cicéron n’était plus consul –, je pouvais voir
les muscles de sa mâchoire palpiter lorsqu’il se leva pour répondre.
    — Les mystères de la Bonne Déesse ne dépendent pas du
grand pontife puisqu’il n’a même pas le droit d’être présent pendant leur
célébration, dit-il avant de se rasseoir.
    Cicéron prit une expression perplexe et se releva.
    — Mais n’était-ce pas la propre épouse du grand pontife
qui présidait la cérémonie, cette fois-ci ? Il doit au moins avoir une
idée de ce qui s’est passé.
    Il reprit sa place.
    César hésita une fraction de seconde, puis se leva et annonça
tranquillement :
    — Cette femme n’est plus mon épouse.
    Un murmure excité fit le tour de la chambre. Cicéron se leva
de nouveau et, cette fois, sa perplexité ne parut pas feinte.
    — Nous pouvons donc en conclure qu’il y a bien eu
outrage.
    — Pas nécessairement, répliqua César avant de se
rasseoir.
    — Mais si rien de scandaleux ne s’est produit, pourquoi
le grand pontife divorce-t-il ?
    — Parce que l’épouse du grand pontife se doit d’être au-dessus
de tout soupçon.
    Le détachement de la réponse suscita un certain amusement et
Cicéron se garda de se relever, faisant signe à Murena qu’il ne désirait pas
approfondir la question. Plus tard, sur le chemin de la maison, il me confia,
non sans une note d’admiration :
    — C’est la chose la plus impitoyable que j’aie jamais
vue au sénat. Depuis combien de temps dirais-tu que César et Pompeia sont
mariés ?
    — Cela doit faire six ou sept ans.
    — Et pourtant, je suis certain qu’il n’a décidé le
divorce que pendant que je l’interrogeais. Il a pris conscience que c’était la
meilleure façon de se sortir de ce mauvais pas. Il faut lui reconnaître ça :
la plupart des hommes ne seraient pas prêts à abandonner leur chien aussi
facilement.
    Je pensai tristement à la belle Pompeia et me demandai si
elle savait que son mari venait de mettre publiquement fin à leur mariage.
Connaissant la promptitude habituelle de César, je soupçonnais qu’elle serait à
la rue avant la tombée de la nuit.
    Lorsque nous arrivâmes à la maison, Cicéron se rendit
directement dans sa bibliothèque pour éviter de tomber sur Terentia et s’allongea
sur un divan.
    — J’ai besoin d’entendre du grec le plus pur pour laver
la saleté de toute cette politique, commenta-t-il.
    Sositheus, qui lui faisait habituellement la lecture, était
malade, aussi me demanda-t-il si je voulais bien me charger de cet office et, à
sa requête, j’allai chercher un exemplaire d’Euripide dans son compartiment et
le déroulai devant la lampe. Il voulait que je lise Les Suppliantes, sans doute
parce que, en ce jour, l’exécution des conjurés était particulièrement présente
à son esprit et qu’il espérait au moins qu’ayant remis les corps de ses ennemis
à leur famille pour qu’ils soient inhumés avec les honneurs, il avait joué le
rôle de Thésée. Je venais d’arriver à ses vers préférés –  C’est
chose dangereuse que la témérité chez un chef ; chez un capitaine, garder
son sang-froid quand il convient est d’un sage. Pour moi, le vrai courage,
c’est la prudence  – quand un esclave vint annoncer que Clodius
était dans l’ atrium .
    Cicéron jura.
    — Dis-lui de sortir de chez moi. Je ne peux pas me
permettre d’avoir quoi que ce soit à faire avec lui.
    Ce n’était pas une mission très plaisante, mais je posai
Euripide et partis dans l’ atrium . Je m’étais attendu à trouver Clodius
dans une certaine affliction, il affichait plutôt un sourire contrit.
    — Bonjour, Tiron. Je me suis dit qu’il valait mieux
venir voir mon mentor tout de suite pour en finir une fois pour toutes avec ma
punition.
    — Je crains que mon maître ne soit pas là.
    Le sourire de Clodius s’altéra dans la mesure où il se
doutait bien que je mentais.
    — Mais j’ai tout préparé dans le but de lui raconter
une histoire fabuleuse. Il lui suffira d’écouter. Non, c’est ridicule. Je ne
vais quand même pas me faire renvoyer.
    Il me passa devant et traversa l’immense vestibule avant d’entrer
dans la bibliothèque. Je le suivis en me tordant les mains. Cependant, à sa
surprise et à la mienne, la pièce était vide. Il y avait une petite porte à

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